Avez-vous les moyens de négliger vos données?

Replaçons-nous au début des années 2000. Une époque d’ordis beiges, de cellulaires à flip et de disques compacts. Une vie sans réseaux sociaux, mais où on pouvait échanger via Caramail. De sa France natale, Antoine Grosfilley s’intéresse déjà aux données et à tout le potentiel qu’elles recèlent. Son souhait : bâtir une relation entre une marque et ses client·es basée sur l'écoute de leurs besoins et leur capacité à offrir des réponses les plus personnalisées possible. Aujourd’hui, les données sont incontournables pour toute bonne stratégie de marketing. Et « ce qui est certain, c'est que si vous n'utilisez pas vos données à leur plein potentiel, il y a de fortes chances que vos compétiteurs le fassent et qu'ils viennent vous grappiller des parts de marché. » Bien noté, Antoine.

Grenier : Pourquoi les entreprises devraient-elles s'intéresser à leurs données?

Antoine : À moins d'être un commerce de proximité où les employé·es connaissent bien les préférences de chaque client·e, la donnée est le seul moyen de connaître le consommateur. Cette connaissance permet certes de générer des offres personnalisées pertinentes, et donc de se positionner avantageusement. Mais la plus grande valeur ajoutée réside dans la capacité à entretenir un dialogue qui permet de bâtir une relation de confiance durable entre sa marque et ses client·es. Ces derniers sont généralement volatils, mais des stratégies data-driven permettent de créer une meilleure fidélité, basée sur la satisfaction de la relation.

Par ailleurs, les données permettent des gains d'efficacité. Elles viennent, entre autres, rendre obsolète la fameuse citation de John Wanamaker: « Je sais que la moitié de mes investissements publicitaires est dépensée en pures pertes; le problème, c'est que je ne sais pas laquelle. ».

Enfin, en raison de l'entrée en vigueur des différentes technologies (ex: ITP2 d’Apple) et des lois de contrôle de la confidentialité, notamment sur les cookies (ex: GDPR, CPRA, projet de loi québécois C-64, etc.), il me semble primordial que les organisations bâtissent leur propre actif de données.

G : Quelle erreur fréquente vois-tu chez les compagnies qui commencent à analyser leurs données?

A : Les deux principales erreurs que je vois sont tout d’abord un focus trop ciblé sur certaines sources de données. Par exemple : regarder seulement le profil sociodémographique ou seulement les transactions en ligne. Pour bien comprendre ses client·es, il faut les considérer dans leur ensemble, le plus vaste possible afin d'avoir une vue globale de leurs comportements et de leurs préférences.

Une autre erreur est d’utiliser les données uniquement dans un contexte de vente. Dans la majorité des cas, la vente est l'aboutissement d'une relation qui a été bâtie progressivement. Les organisations devraient s'assurer que les données soient exploitées à tous les stades du cycle de vie, pas seulement quand ça « semble » (les guillemets sont importants!) compter le plus pour les revenus.

G : Penses-tu qu'en général les entreprises sont en retard là-dessus au Québec?

A : Il faut de tout pour faire un monde et le tissu industriel du Québec ne fait pas exception à la règle. Il y a de grosses organisations qui sous-utilisent (voire pas du tout) leurs données, alors que des PME ont bâti des programmes relationnels surprenants.

Exploiter ses données pour fidéliser et générer plus de revenus, c’est super. Mais comment faire pour se retrouver devant cette multitude d’informations? La réponse le 3 mai.