La communication interne n’échappe pas à l’évolution de la société et aux bouleversements que rencontre le monde du travail. C’est pourquoi sa fonction, qui est de plus en plus particulière au sein des entreprises, doit s’adapter aux nouvelles réalités apportées par la pandémie.

Qu'on en nomme quelques-unes: selon Statistique Canada, la pénurie de main-d’œuvre est encore un obstacle majeur pour 35 % des entreprises au pays et à en croire les prévisions, ce n’est pas demain la veille que cette crise sera résolue. Si on se fie au récent rapport du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale du Québec, «on estime que, de 2021 à 2023, quelque 1,4 million d’emplois seront à pourvoir notamment en raison de départs à la retraite, en plus des emplois qui ont été perdus en raison des effets de la COVID-19.» Parallèlement, le bien-être des employé·es constitue un second défi de taille, puisqu’au Canada, chaque semaine, c’est près de 500 000 personnes qui sont incapables de travailler parce qu’ils ou elles sont touché·es par des problèmes de santé mentale. Ainsi, on n’apporte rien de nouveau ici sur la table: l’attraction, le bien-être, la rétention et la mobilisation des talents constituent des défis de taille pour les équipes de communication et les ressources humaines

Mais qu’est-ce que les communications internes ont à voir avec tout ça? Elles sont un outil indispensable de rassemblement, nous dit Jonathan Viens, CRHA et partenaire d'affaires en ressources humaines. «J’y vais de façon plus large, les communications internes, ça a toujours été important dans les entreprises, que ce soit avant ou après la pandémie. Une bonne stratégie de communication interne a un impact direct sur l’organisation et ses membres. On peut d’ailleurs en identifier trois piliers importants: le premier, ça reste un vecteur d’information pour les employé·es lié avec le devoir de communiquer les valeurs de l’entreprise, les bonnes pratiques attendues, les projets en cours, etc., et ce, de l’intégration d’une personne à son cheminement professionnel au sein de l’organisation. Le second pilier concerne l’alignement de la mission de l’entreprise et de ses attentes. Le dernier pilier est tout aussi important que les deux premiers, il s’agit de répondre aux questions et aux inquiétudes de ses équipes. Et il faut comprendre que la communication, pour qu’elle rassemble et fortifie les équipes de travail, doit être bidirectionnelle. Autrement dit, quand il y a des écarts entre les attentes, la mission ou les valeurs de l’entreprise, les gestionnaires doivent être à l’écoute pour s’ajuster.»

Le travail hybride, la pandémie et les communications
Toujours selon Jonathan Viens, les communications internes ont d’autant plus d’importance maintenant que le télétravail est devenu une norme dans beaucoup d’entreprises: «Comme ce sont les conversations autour de la machine à café qui se sont perdues avec le télétravail, il faut comprendre que même si ça a du bon, la flexibilité, ça impacte énormément les tissus sociaux des entreprises. Et c’est un peu le devoir des communications internes, soit de maintenir des échanges perdus d’une manière originale qui rejoint vraiment ses équipes.» Pour la conseillère marketing aux communications à l’ITESMEDIA, Mélina Deschênes, il s’agit d’une des missions capitales des communications internes : «Avec la pandémie, on a complètement changé nos façons de travailler. Dans ce contexte, pour rejoindre les autres, on doit les appeler ou leur écrire pour faire des suivis. C’est la même chose pour les 5 à 7, et il faut comprendre que si on veut que tout le monde se sente inclus·es, il faut trouver des manières de les rejoindre au sein de nos canaux internes. Et il faut faire l’effort de le faire.» Cet avis est partagé par son collègue et directeur aux ventes, marketing et opérations, Raphaël Drolet-Leclerc. Ce dernier affirme que les bonnes pratiques apprises par l’ITESMEDIA concernent la communication entre les gestionnaires et les équipes : «J’ai en tête une phrase connue qui dit en gros que dans la vie, presque tous les problèmes sont causés par des problèmes de communication. J’y crois. Et la communication – interne ou pas – peut éviter des malentendus. C’est, à mon avis, au cœur de toutes les solutions et de tous les problèmes. Je pense qu’on focalise souvent beaucoup sur les communications externes et peu sur notre monde, à l’interne. Dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre, c’est bien beau faire preuve de flexibilité et d’agilité envers ses employé·es, mais il faut aussi investir du temps pour mettre à disposition des outils de communication entre les gens à l’interne.»

Prendre le taureau par les cornes et redéfinir ses pratiques
Encore faut-il que la profession soit compatible avec le travail hybride. Pour une société d’État comme la SAQ, la communication interne post pandémie entre les gestionnaires et les équipes en succursale, en entrepôts et en télétravail a aussi son lot de défis, si on se fie à la directrice des affaires publiques et communication, Stéphanie Morissette. «Pour nous, la pandémie nous a forcés à revoir nos pratiques et nous a autorisés à essayer des choses. Résultat, aujourd’hui, on en est sortis beaucoup plus grands. Parce que c’est en fait toute la fonction stratégique des communications qui a été mise en lumière en période de crise et je crois qu’on en a retiré des apprentissages fondamentaux. Il faut comprendre que c’est une minorité de gens qui font du télétravail à la SAQ, la plupart sont sur les lieux de travail et ont tout aussi besoin d’être rejoint·es.» Et comment gère-t-on ces situations différentes ? En mettant d’abord de côté le syndrôme de vouloir que tout soit parfait, affirme en souriant la directrice des affaires publiques et communication. «C’est comme si, quand on entre dans le mode “gestion de crise”, on en arrive à des questions capitales et essentielles comme “qu’est-ce qu’on peut faire autrement ?” Et je crois que cette liberté d’essayer des manières originales de rejoindre nos gens a porté fruit. Par exemple, on a beaucoup utilisé le code QR, qui est facile d’utilisation et disponible pour tous et toutes. On a aussi revu nos communications afin qu’elles soient directes, claires et sans ambiguïté. Cette façon de rédiger est restée, même après la pandémie. Même nos manières de travailler ont été réfléchies: et le fait d’être en crise a révélé qu’il y avait trop de silos qui se creusaient. Pour nous, ça nous a fait réaliser qu’on devait être plus connecté·es aux besoins des employé·es et qu’on devait mieux les comprendre pour les intéresser aux messages qui véhiculent nos valeurs et notre mission.»

Solidifier la base
Pour Stéphanie Morissette, tout comme pour Mélina Deschênes et Raphaël Drolet-Leclerc de l’ITESMEDIA, les outils mis à la disposition des équipes servent au bon fonctionnement de l’entreprise, mais ont aussi révélé une utilité indéniable pour solidifier les liens entre les gens. «Les deux plus grands enjeux du télétravail, c’est la culture d’entreprise et l’esprit d’équipe, explique Mélina Deschênes, et les communications internes servent à ne pas perdre ces deux éléments importants de vue.» Du côté de la SAQ, la base, c’est aussi le bien-être des employé·es: «C’est sûr que la pandémie a généré des nouvelles stratégies de communication. C’est pourquoi on a choisi, entre autres, de mettre l’employé·e au cœur de nos priorités, autant sur le plan de la santé sécurité que du bien-être. Les communications nous servent désormais à faire vivre et rayonner la parole de celles et ceux qui travaillent tous les jours pour une entreprise, autant à l’interne qu’à l’externe. Et c’est vraiment apprécié des gens à l’interne, on le voit. Ainsi, on met de plus en plus en place des moyens pour faire rayonner l’expertise de nos gens et ça fait maintenant partie de nos objectifs aux communications, soit de contribuer autant au positionnement à l’interne qu’à l’externe.»

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