Le 3 octobre dernier, jour de vote, la campagne électorale est à son apogée et les candidat·es tentent de séduire les indécis·es et gagner leur appui. L’un des enjeux importants pour l’électorat lors de cette campagne-ci est l’environnement. Quoi faire pour assurer un avenir aux futures générations? Chaque parti a son plan (ou presque), pour réduire les gaz à effet de serre, mais qu’en est-il des émissions de la campagne elle-même? Comment faire pour que ces valeurs environnementales passent de promesses à réalité? Caroline Laroque, chargée de projets en développement durable au Réseau des femmes en environnement et son Conseil québécois des événements écoresponsables (CQEER), nous aide à y voir plus clair.

Les stratégies de déploiement des campagnes électorales sont, somme toute, similaires d’un parti à l’autre: des pancartes à tous les coins de rue, une présence en ligne, certain·es font des publicités à la radio, à la télévision, dans les journaux… Sans oublier la tournée des villes et villages du Québec pour aller rencontrer les gens, serrer des mains, répondre à des questions et se présenter aux différents débats télévisés. Tout ça a un coût pour l’environnement.

«Parmi les différents aspects à prendre en compte pour réduire l’impact des campagnes électorales, il y a, bien sûr, la réduction des déplacements par les différent·es candidats·es. Il est nécessaire d’optimiser les déplacements pour réaliser le moins de kilomètres possible et de les faire avec le moyen de transport le moins polluant. L’utilisation des autobus de campagne devrait être comparée aux autres modes de transport et chaque jour, on devrait choisir le mode le plus adapté. Le choix de l’autobus de campagne devrait se faire sur des critères écologiques», dit Caroline. Il y aurait donc un gros travail de recherche à faire pour s’assurer que le choix des véhicules et des destinations soient cohérents avec l’objectif d’une campagne verte.

Un autre aspect souvent négligé est l’émission des gaz à effet de serre générée par les événements organisés par les partis. Ces événements occasionnent des déplacements de la part des participant·es et ils sont rarement comptabilisés, bien que différents outils existent pour le faire facilement. Le Conseil québécois des événements écoresponsables a d’ailleurs développé une application web permettant aux organisateur·trices d’événements d’être autonomes dans ce calcul. Il serait donc faisable pour les partis de calculer et prévoir leurs déplacements en conséquence.

Certains partis ont de grands objectifs de réductions des gaz à effet de serre dans leurs promesses électorales. Par contre, leurs campagnes ne vont pas en ce sens. «Afin de rester en cohérence avec les programmes environnementaux des partis, ceux-ci devraient montrer l’exemple en s’assurant que les événements qu’ils organisent et auxquels ils participent fassent des efforts significatifs pour réduire leur empreinte.»

Selon Caroline, il y aurait plusieurs solutions simples pour y arriver. À commencer par inciter le public à faire du covoiturage, prendre le transport en commun ou encore, offrir un bonus aux personnes qui adoptent un moyen de transport durable. «Cela se remarque également par des efforts pour être zéro déchet, en utilisant notamment de la vaisselle réutilisable et en choisissant consciencieusement leur menu avec le plus d’éléments végétariens et en favorisant l’économie locale, dont les produits de saison.»

On en parle de plus en plus, le numérique a aussi une empreinte environnementale. Bien que cette empreinte soit non négligeable, offrir la webdiffusion de certains événements peut éviter beaucoup de déplacements en voiture et s’avérer moins nocive pour l’environnement!

Quant aux pancartes électorales, «plusieurs moyens de communication web peuvent en remplacer un certain nombre. Il est par contre difficile de les éliminer complètement, alors les pancartes qui sont produites devraient être écoconçues et imprimées sur des affiches faites avec le plus de contenus recyclés post-consommation et s’assurer, en fin de vie, de trouver une façon de les revaloriser ou de les donner à une organisation les recyclant réellement», mentionne Caroline. Tout ça engendre des coûts supplémentaires, oui, mais il faut penser autrement. Dans plusieurs aspects de nos vies, on accepte de payer plus cher pour un service ou un objet parce qu’on sait que sa qualité est meilleure, qu’il durera plus longtemps ou que ses bienfaits sont supérieurs. Alors, pourquoi ne pas appliquer cela à l’environnement? Être prêt·es à payer un peu plus (en temps ou en argent) pour une empreinte moindre ou inexistante devrait aussi devenir un réflexe.

C’est difficile de prendre des décisions en ce sens pour un parti en ce moment, sans risquer de perdre des votes. Pour assurer des campagnes vertes pour tous les partis, «les lois électorales devraient davantage encadrer l’empreinte environnementale des campagnes afin de limiter les excès et de respecter nos engagements climatiques. Les candidats·es ne devraient pas avoir à choisir entre respecter leurs valeurs environnementales et être élu·es. Les campagnes électorales devraient se faire dans le respect de notre société et donc évoluer vers des pratiques plus écologiques, plus saines et qui respectent les capacités climatiques actuelles», précise Caroline.

Finalement, une campagne électorale complètement verte serait beaucoup de travail, de changement et d’adaptation de la part des partis et de leurs candidats·es, mais aussi des électeur·trices. Petit train va loin…si on ne commence pas à changer nos façons de faire, rien ne changera.

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