Comment les créateurs de contenu d’ici font-ils pour vivre de leur art? Bien sûr, on peut lister les redevances de certains médias sociaux comme YouTube et les très répandus partenariats publicitaires, mais on retrouve de plus en plus couramment Patreon dans la liste des revenus d’artisans québécois de tout acabit. Parmi les créateurs, on peut retrouver des musiciens, des illustrateurs, notamment de bandes dessinées, des auteurs, des podcasteurs et bien plus encore.

ABC de Patreon
Cette plateforme de mécénat participatif permet aux créateurs d’offrir des contenus exclusifs aux patrons (traduction anglophone littérale de mécène) qui acceptent de payer des frais mensuels pour faire partie de leurs communautés. Ces abonnements peuvent varier entre quelques dollars et une centaine de dollars, mais avec une règle du pouce, on peut réaliser que la majorité des contenus offerts par des Québécois est disponible avec un abonnement sous la barre du 5 $/mois. Avec Patreon, les personnes proposant leur contenu reçoivent 90% des dollars versés par leurs abonnés. Les 10% restants sont divisés entre les frais de redevances à la plateforme (5%) et les frais transactionnels (5%). 

Paliers de fanatiques 
Il est aussi possible d’offrir des niveaux d’accès au contenu. Si un amateur peut décider de choisir l’abonnement le plus accessible, souvent un ou deux dollars seulement, nombreux sont les fanatiques qui vont plutôt opter pour l’option la plus onéreuse pour avoir accès à des contenus supplémentaires comme des behind the scenes, des textes supplémentaires ou tout autre type de contenu normalement offert par le compte auquel on souhaite s’abonner. Il est tout de même intéressant de noter que la différence entre les paliers n’est souvent que de quelques dollars, rendant l’abonnement premium d’autant plus intéressant. 

Croissance
Bien que la plateforme ait été fondée en 2013 par le musicien Jack Conte et le développeur Sam Yam, les yeux des Québécois et Canadiens ne s’y sont tournés plus sérieusement que dans les dernières années. À ce jour, Patreon compte plus de 6 millions de mécènes, dont plus de la moitié ont rejoint la plateforme dans les 3 dernières années. Suite à cette croissance fulgurante (et après avoir levé 412,1 millions en capital), on évalue la valeur de la plateforme aux alentours de 4 milliards de dollars américains. 

Récemment, le CPO de Patreon, Julian Gutman, annonçait dans une entrevue avec TechCrunch que les plans de l’entreprise étaient de doubler le bassin d’employés en 2022.

L’entreprise ne souhaite pas être définie par ses huit premières années et espère plutôt continuer à évoluer et à innover. Pour ce faire, l’entreprise prévoit plusieurs projets ambitieux pour la prochaine année, comme la création d’une plateforme de vidéos natives. Patreon a aussi prévu une refonte de son système de paiement, qui de son propre aveu cause de la confusion et de la frustration chez les mécènes. 

Du côté des artistes, on compte plus de 210 000 créateurs qui sont soutenus par au moins un mécène. Au total, depuis 2013, c’est plus de deux milliards de dollars qui ont été remis aux créateurs de la plateforme Patreon. 

Créateurs d’ici 
Au Québec, Patreon est plus souvent utilisé comme revenu d’appoint que comme base économique solide. L’illustrateur et humoriste, Alex Lévesque, derrière la bande dessinée Dessine bandé confiait à Quatre,95, la plateforme à saveur financière d’Urbania, qu’il retirait environ 400$ par mois de sa présence sur la plateforme. Pas de quoi payer un loyer dans la grande métropole, mais tout de même plus qu’en publiant les mêmes contenus gratuitement sur les médias sociaux. 

Il est difficile d’identifier avec précision quels sont les comptes québécois les plus populaires, étant donné que la majorité des créateurs préfère masquer le nombre de mécènes. Après tout, une règle de trois permettrait d’estimer les revenus des artistes, ce que la majorité préfère éviter. Cependant, même sans statistiques officielles, on peut constater que les comptes les plus populaires dans la Belle Province sont ceux des humoristes, des podcasteurs et bien évidemment des podcasteurs humoristiques. 

Le vétéran de la plateforme est sans contredit Mike Ward avec son projet Sous écoute, mais on retrouve aussi d’autres gros noms comme Jay du Temple et son projet Jay Du Temple discute et Les Denis Drolet avec Rince-crème

Avec Patreon, plus vous avez de succès, plus vous aurez de dollars, c’est logique. Ce sont donc les plus grands artistes qui en ressortent le plus d’argent. La plateforme n’est peut-être pas la manière de percer, mais elle peut offrir une certaine indépendance à des créateurs établis tout en arrondissant les fins de mois de ceux qui débutent.

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