On parle déjà depuis un bon moment de la «grande démission». C’est le phénomène de l’augmentation du taux de roulement, expliqué par un mélange de remise en question collective accélérée par la pandémie et de contexte de pénurie de main-d'œuvre.

On pourrait dire que c’est l’Eldorado de la relève. C’est l’occasion pour les nouveaux professionnels entrant sur le marché du travail de choisir les employeurs autant que les employeurs choisissent les employés. On en a discuté avec deux personnes dont les équipes restent solides malgré le contexte: Raphaëlle Huysmans, vice-présidente exécutive chez Urbania, et Eric Laflamme, directeur principal, Services linguistiques chez Deloitte

Comme beaucoup d’entreprises, Urbania et les services linguistiques de Deloitte sont en phase de croissance et ont tous deux remarqué une hausse de départs,  malgré des taux de roulement historiquement très bas. Chez Urbania, Raphaëlle décrit les départs comme des remises en question plus que des départs traditionnels: «Des cas où la personne ne sait juste plus quoi faire et prend une pause, oui ça arrive quand même plus qu’avant.» 

Pour Eric, le télétravail expliquerait en partie l’augmentation du nombre de départs: «Le télétravail forcé pour tout le monde, ça a un peu uniformisé le milieu de travail et donc les gens sont peut-être plus à l’aise d’aller faire ailleurs des tâches qui ressemblaient à ce qu’ils faisaient dans un emploi précédent. Je pense que ça les a rendus prêts à un changement.»

Alors, comment on fait pour tirer son épingle du jeu? Pour Urbania, ça passe par un programme de stage qui s’améliore et se modifie d’année en année. Raphaëlle a d’ailleurs commencé sa carrière chez Urbania par un stage, gage que la pratique ne date pas d’hier: «Moi, je suis un produit de stage. Ça fait 14 ans que je suis chez Urbania et j’ai commencé en stage à l’université, mais je dois dire que le programme actuel est vraiment plus cool maintenant qu’à l’époque.»

Si l’embauche de stagiaires est une pratique bien ancrée chez Urbania, l’équipe ne prend pas la formule pour acquise. C’est important pour l’équipe de continuer d’évoluer, d’année en année, pour offrir le meilleur et attirer les meilleurs. «On a toujours eu des stagiaires, mais maintenant, c’est beaucoup plus organisé et formateur et ça nous permet d’identifier les bons talents. On a lancé une nouvelle formule en cohorte, et on a déjà fait une embauche de cette gang-là. On va certainement collaborer avec d’autres aussi, il faut dire que ce n'est pas tout le monde qui a terminé son cursus», ajoute Raphaëlle

Identifier les talents avant même la sortie de l’université serait donc une tactique clé pour l’équipe créative d’Urbania. Cela étant dit, attirer les talents n’est pas suffisant. Il faut ensuite les garder. Pour Raphaëlle, tout est une question de culture. Le secret serait d’être ouvert, d’évoluer et de s’ouvrir aux réalités et sensibilités de la relève: «L’ensemble de nos collègues est super jeune, alors on n'a pas le choix d’évoluer avec eux. C’est sûr que parfois, ça peut être confrontant, mais du même coup, on valorise tellement ça. On veut être audacieux, alors il faut s’ouvrir à ce que les plus jeunes nous apportent comme point de vue.»

Pour Eric, la rétention passe principalement par la modernisation des pratiques de travail: «Notre principale stratégie de rétention, c’est la flexibilité. On veut vraiment que les gens travaillent à leur manière, quand ils veulent. Les bureaux du centre-ville sont rouverts et les gens peuvent y aller ou pas. On veut aussi que les gens puissent adapter leur horaire à leur vie, beaucoup plus qu’avant. C’était déjà en partie dans la culture chez Deloitte, ça fait au moins 7-8 ans qu’on permet le télétravail.»

Eric explique aussi que Deloitte s’assure de garder ses bons éléments en investissant dans le futur de ses employés et dans leur bien-être: «On essaie de voir les embauches comme des carrières, pas comme des jobs. Ça veut dire qu’on investit beaucoup en formations et en qualité de vie pour que, par exemple, les gens puissent se créer des bureaux à la maison, etc.»

Bref, peut-être que la solution à l’attraction et la rétention serait simplement l’adaptabilité. La relève parle, il suffirait de l’écouter.

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