Apparus sur le marché en 2017, mais plus largement connus par le grand public en 2021, les jetons non fongibles (NFT) séduisent de plus en plus le monde du marketing. Que ce soit Gucci, Givenchy ou encore Adidas, les efforts des grandes marques pour intégrer le marché de la cryptomonnaie prouvent que les NFT représentent «un nouveau moyen d’expression pour une marque, qu’il convient d’intégrer au mix de communication». C’est du moins l’avis de l’expert en stratégie de marque, Mathieu Sakkas, qui explique «qu’en termes de branding, les NFT peuvent être envisagés comme un nouveau support pour faire la publicité et la promotion d’un produit, ou comme une nouvelle manière d’interagir avec les consommateur·trices, en proposant un parcours d’utilisation innovant. Ils peuvent également permettre plus facilement le développement de nouveaux produits, en misant sur une implantation dans le quotidien numérique de leur public ou la proposition d’authentification à des contenus de marques».

S’intéresser à une marque grâce aux NFT? C’est possible.
Sur son site Internet, la plateforme française d’émission de NFT pour le secteur de la mode .Arianee invite les marques à réfléchir aux opportunités du marché numérique: «Le monde immersif, ou métavers, offre diverses opportunités aux marques avant-gardistes. Les NFT deviennent la solution pour une expérience client transparente sur tous les canaux.» Ce qui fait la valeur des NFT, c’est bien l’unicité de chaque jeton et il faut comprendre que tout est traçable dans cet univers numérique: la provenance est gravée et enregistrée dans la blockchain et les NFT sont alors protégés au maximum contre la fraude et les contrefaçons. Ce que ça signifie pour les marques de luxe? Plus question de s’en faire avec le marché alternatif des copies, et les marques peuvent désormais commercialiser des actifs numériques de manière complètement nouvelle. C’est une des opportunités, bien sûr, mais elle s’accompagne d’autres avantages, surtout pour les marques qui cherchent à se positionner dans un système où la rareté est synonyme du luxe. L’attribution de la provenance des NFT peut contribuer à ajouter de la valeur aux produits et donne plus de bénéfice au droit d’auteur et à la marque.

Les avantages d’une marque à s’activer dans le monde des NFT sont assez clairs. Il faut toutefois rester sur ses gardes, nous avertit le directeur général de l’agence Dragon Rouge, Mathieu Sakkas, puisque «les marques ne doivent pas utiliser les NFT pour le principe ou pour s’aligner, elles doivent montrer qu’elles ont compris et savent s’approprier les codes qui régissent cet univers».

Si les opportunités sont intéressantes, il reste que ce secteur comporte des risques d’un point de vue légal.

Peut-on éviter certains risques? Oui, mais attention.
Sur cette question, Frédéric Letendre, avocat et stratège chez YULEX, indique clairement que la législation des NFT n’est pas pour l’heure réglementée: «nous ne savons donc pas quelles seront les intentions du législateur vis-à-vis de ce sujet. De plus, comme les NFT n’ont gagné en popularité que dans la dernière année, la justice n'a pas eu l’opportunité de se prononcer sur les éventuels problèmes qui pourraient découler des transactions en lien avec les NFT ou la création d’œuvres destinées à être transposées sur des jetons non fongibles.» Ainsi, Frédéric Letendre nous rappelle que «les lois du monde réel s’appliquent dans le monde virtuel» et qu’il faut y faire «les adaptations nécessaires». Cela dit, il convient de penser que le format des NFT complique le chemin entre la diffusion d’une œuvre et sa création: «Le seul fait de créer un NFT n’attribue pas la propriété de l’œuvre (photo, illustration, chanson, etc.) à la personne qui crée le NFT.»

En revanche, Frédéric Letendre précise que la prudence est de mise dans ce secteur qui gagne en popularité: «Dans une optique où il est inévitable que, pour toute agence de marketing, les NFT deviendront une avenue fort intéressante afin de diversifier leurs services, les conseils qu’on peut donner sont que la prudence est de mise à plusieurs niveaux. En effet, la marque doit:

  • vérifier auprès des organismes réglementaires si la plateforme sur laquelle aura lieu l’échange se conforme aux lois et aux règlements en vigueur;
  • vérifier que la personne qui vend le NFT (le publiciste ou la clientèle) détient les droits de l’œuvre;
  • s’assurer de bien communiquer ce qui est vendu à travers le jeton en établissant un contrat de vente clair. Comme la vente d’un NFT est différente d’une vente d’une œuvre physique, il serait prudent d’établir les différents droits que les partis impliqués accordent au détenteur du NFT;
  • vérifier l’identité des personnes avec lesquelles la marque fait affaire, ainsi que la légitimité de la transaction.

Enfin, tous ces conseils découlent des risques inhérents aux cryptomonnaies en général.»

Les NFT sont-ils un nouveau lien étroit entre les individus et les marques? Peut-être.
Et seul l’avenir nous le dira. Mais plusieurs spécialistes s’entendent pour vanter les NFT comme un vecteur renouvelé de communication envers sa clientèle. On peut se fier aux marques qui se sont lancées dans les NFT en s’associant à une cause (Givenchy et la cause LGBTQ+) ou encore les collaborations très exclusives avec des artistes comme la marque de champagne Dom Pérignon qui s’associe à Lady Gaga. Même Budweiser a profité des NFT pour lancer une collection artistique «Heritage» qui met en valeur tous les formats de ses bouteilles. Quoi qu’il en soit, il reste que les NFT offrent de nouvelles manières pour une marque de communiquer ses implications, mais aussi d’exposer son audace en innovant dans un secteur nouveau et où tout est à faire.

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