Après 22 mois de distanciation sociale à géométrie variable, les attentes sont grandes envers le monde de l’événementiel. L’année 2022 regorgera-t-elle de nouvelles tendances ou si nous assisterons plutôt à un (autre) rendez-vous manqué avec les festivités? Discussion sur le sujet en compagnie de Nadine Ménard et Micah Desforges.

Des festivals. Des événements talk of the town.

Des premières, des vernissages, des lancements.

Du beau monde. De l’ambiance, des DJ, des dégustations de produits locaux, des hologrammes, des puces Neuralink - et quoi d’autre? Pondre un texte sur les tendances événementielles que nous réservera l’année 2022 était une excellente idée.

Jusqu’à la mi-décembre dernier.

Car hormis un influenceur vapotant sur les ailes de Sunwing, d’aucuns n’ignorent le nouveau tsunami de restrictions sanitaires imposé par l’arrivée du dernier variant. Et alors que la vie retrouvait un semblant de normalité, voilà que le secteur du divertissement est de nouveau happé de plein fouet par l’interdiction de rassembler des gens en présentiel: le pain et le beurre de l’événementiel, en d’autres mots, même si les deux dernières années ont vu apparaître sur le radar une multiplication d’offres d’événements virtuels.

«Une tendance qui est là pour rester, nous lance d’entrée de jeu Nadine Ménard, fondatrice et propriétaire de l’entreprise SUITE22 Événements. COVID ou pas, c’est écrit dans le ciel que l'évènementiel virtuel, ou à tout le moins hybride, est là pour rester. Si on peut dire que la pandémie aura servi d'accélérateur au développement des événements virtuels, n’en demeure pas moins que nous avions ce type d’expérience dans le collimateur depuis bien avant. Car en dehors de la distanciation sociale, l’évènementiel virtuel répond à un besoin criant: celui de rassembler des gens qui ne pourraient physiquement être en présence les uns des autres, et ce, pour leur faire vivre une expérience et une émotion dont ils se rappelleront.»

Bienfaits de l’expérience humaine
Son de cloche en partie similaire du côté de l’organisation dite expérientielle. «Je crois aussi que les formats d’événements virtuels et hybrides sont là pour rester, affirme Micah Desforges, Président et fondateur de Tribu Experientiel. Dans des cas spécifiques comme le monde du tourisme d’affaires (dans lequel on retrouve des congrès pharmaceutiques et autres types de marchés d’exploitation de formats, par exemple), suis d’avis que les entreprises y penseront deux fois avant de débourser des sommes astronomiques de voyagement maintenant que nous savons que des congrès virtuels peuvent parfaitement remplir leur mission. Cela dit, je crois dur comme fer aux bienfaits du présentiel en matière d’expérience humaine, que ce soit d’un point de vue sensoriel, affectif ou intellectuel; un C2 Montréal en virtuel, par exemple, peut faire la job, mais ce n’est pas l’idéal pour développer des affaires avec d’autres individus. Et vivre un festival en plein air n’a que peu ou pas d’équivalent en virtuel. À tout le moins: ça devient dès lors deux expériences complètement différentes.»

En faire moins, le faire mieux
Les promoteurs d’événements sont-ils optimistes pour la suite de 2022? «Je le suis, poursuit Micah Desforges. Je ne peux pas parler au nom de la science ni faire des spéculations basées sur des présomptions, mais si le futur proche (voire les prochains mois) est incertain en ce qui a trait à l’organisation d’événements en présentiel, la suite pourrait nous ramener aux libertés que nous avions connues avant la pandémie. Mais attention, je ne dis pas que tout redeviendra comme avant, au contraire: nous avons beaucoup appris de ces deux dernières difficiles années, et si une tendance devait en émerger, ce serait certainement celle du proverbial less is better. En faire moins, mais en faire mieux. Moins de festivals, mais des événements encore plus marquants; moins de poudre aux yeux, mais des événements encore plus riches en émotions; moins de patentes en plastique remis lors des événements, mais plus d’offres de cadeaux premiums. Peut-être même moins de participants, mais des billets plus chers pour jouir de l’intimité. Je crois que tout cela sera à envisager.»

Révolution virtuelle
Même chose pour les événements virtuels et hybrides? «Même chose, ajoute Nadine Ménard. Plusieurs individus n’ont malheureusement pas gardé de très glorieux souvenirs de leur party de bureau Zoom et autres événements auxquels ils ont participé devant leur ordinateur. Et je les comprends: parce qu’ils n’y participaient pas, justement, et qu’ils assistaient de façon passive à quelque chose devant leur écran. Comme s’ils étaient branchés à leur téléviseur. À cela je dis que le succès de l’événementiel virtuel passe invariablement par l’art d’engager son audience dans l’événement en question, dans ses valeurs – ainsi qu’en dépassant les objectifs des clients-organisateurs. Il faut répondre à un besoin qui va au-delà de faire un party; les partys, bien que divertissants en personne, sont éphémères : il faut viser à offrir une expérience qui transcendera le médium. Il ne faut plus assister à un événement virtuel comme on assiste passivement à une réunion Zoom. Je crois personnellement que 2022 sera le théâtre d’une petite révolution en matière d’événementiel virtuel.» 

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