À ce jour, les options de divertissements numériques ne manquent pas aux enfants : de TikTok à YouTube, en passant par Snapchat à Instagram jusqu’à Twitch, on constate que ces médias ont tranquillement remplacé les contenus traditionnels (comme la télévision). Compte tenu du potentiel de la cible et de l’impact majeur que les jeunes téléspectateurs en ligne peuvent avoir sur les autres et sur les parents, les investissements dans les publicités numériques pour les enfants ont atteint des chiffres records aux quatre coins du globe, et plus particulièrement aux États-Unis.

Comme l’AFP le rapporte, les plateformes YouTube, Snapchat et Instagram ont même été accusées, comme Facebook, «de nuire à la santé mentale et physique des enfants en les surexposant aux vies apparemment idéales d’autres personnes, ainsi qu’à des images et publicités inappropriées». Mais, si la publicité auprès des jeunes dérange autant, c’est bien parce que ceux-ci ne savent pas tracer la ligne entre le contenu publicitaire et l’activité sociale sur les réseaux. Et malheureusement, tout ceci est possible grâce au marketing d’influence.

Les relations parasociales et la publicité
Le marketing d’influence se base sur l’idée d’authenticité de l’influenceur. De ce fait, le groupe de consommateurs s’intéresse au créneau offert par l’influenceur, qui exerce un double rôle, « à la fois comme membre d’une communauté et comme agent marketing». Le caractère assez unique du marketing d’influence se construit autour du fait que l’influence provient des interactions entre l’influenceur et ses abonnés : ils peuvent accéder à sa vie privée, ses voyages, ses expériences, rencontrer son entourage, etc. Ce faisant, beaucoup peuvent être sous l’impression de partager énormément de choses avec cette idole suivie, tous publics confondus.

L’impact de cette stratégie marketing est plus important qu’on ne le pense, comme nous le rapporte Option consommateur, parce que les enfants de moins de 13 ans constituent un groupe cible vulnérable en matière de persuasion. En effet, on rapporte que «les jeunes auraient davantage tendance à s’engager dans une relation parasociale, puisque leurs capacités cognitives encore limitées ne leur permettent pas de distinguer rationnellement les moments amusants des publicités ciblées ».

Les relations parasociales désignent les liens que les consommateurs tissent et développent avec des personnages dans la publicité. En quoi ces relations peuvent-elles devenir nuisibles aux jeunes?  Le problème vient du fait que les réseaux sociaux amplifient ce genre de phénomène – la relation entre le jeune et l’influenceur est univoque, mais pourtant très forte – puisque les capacités cognitives, la régulation des émotions et le développement moral ne sont pas encore développés dans le cerveau de l’enfant de moins de 13 ans. C’est sans surprise que beaucoup d’études ont prouvé que les jeunes ne savaient pas faire la différence entre une publicité et un contenu, disons « anodin » de sa chaîne favorite. Et puis, les stratégies des marketeurs deviennent de plus en plus élaborées. Pensons notamment au célèbre vlogger pour enfants Ryan, de Ryans World, qui compte plus de 19 millions de téléspectateurs. À sept ans, cet enfant est déjà un influenceur des médias sociaux et a beaucoup d’impact sur sa communauté. Lorsque les jeunes consommateurs s’identifient à un produit ou à un influenceur (qu’on peut presque confondre avec un produit aussi), on constate que leur apprentissage social est marqué par des sources publicitaires et donc conduit par une modélisation de leur comportement et de leur identité. Les consommateurs plus jeunes auront ainsi plus tendance à vouloir imiter des comportements observés sur les réseaux sociaux que la clientèle adulte. 

Un effort mondial pour encadrer la publicité
En entrevue avec Le Devoir, Me Clarisse NKaa confie que «pour les plus jeunes, il est même parfois inconcevable de penser que ces contenus peuvent être de la publicité, même s’ils sont clairement identifiés comme tels. Les influenceurs sont des sources d’information qui deviennent de plus en plus une référence pour bien des gens, incluant les enfants, qui tournent souvent le dos aux médias traditionnels comme la télé, où la publicité est mieux encadrée et mieux comprise». Connaissant aussi le rôle social que la publicité a acquis au cours du temps, il ne faut pas réduire l’impact et les conséquences qu’elle peut avoir sur les jeunes, qui consomment de plus en plus de contenus numériques.

« Au Canada, poursuit Me Clarisse NKaa, pour le moment, le Bureau de la concurrence évalue à la pièce les cas possibles de publicité trompeuse. On pourrait suivre l’effort mondial pour uniformiser ce que nous exigeons des propriétaires de ces plateformes. Mettre un peu d’ordre dans ce secteur serait bon pour tout le monde : le public, les plateformes et les influenceurs. » Le récent rapport d’Option consommateur éclaire à ce sujet l’impact du marketing d’influence et les zone floues dans la législation.