Elle est venue au monde après la démocratisation de l’Internet, représente près de 20% de la population et jouit d’un pouvoir d’achat de plus en plus intéressant aux yeux des marques. Mais la question demeure : comment rejoindre la génération Z? Discussion sur le sujet en compagnie de Greg Lauzon et Sébastien Guérard

Il y a quelques jours, nous apprenions que Justin Bieber et Tim Hortons scellaient leurs destinées l’instant d’une campagne publicitaire, alors que l’éphèbe ontarien à la voix de rossignol et le géant de la restauration rapide lanceront, le 29 novembre prochain, une nouvelle gamme de bouchées Timbits portant le nom poétique... de Timbiebs. Trois nouvelles saveurs plus funky les unes que les autres, donc, qui auront la tâche de séduire les jeunes Nord Américains et d’amener une clientèle ô combien prisée aux comptoirs de commandes. « Tim Hortons s’est payé une star pour tenter d’aller chercher une audience que l’entreprise tente désespérément de séduire, affirme Greg Lauzon, chercheur en marketing au Edward School of Business de Saskatoon. Imaginez ce qu’il a pu leur en coûter pour convaincre une vedette internationale comme Bieber d’aller manger des beignets (aussi bons soient-ils!) en prime time à la télé et vous comprendrez la valeur que l’entreprise accorde au pouvoir d’achat actuel (et surtout potentiel) de la génération Z. »

Le REER Z
Ce qui nous amène un trio de questions fondamentales : qui sont les Z, que vaut réellement leur pouvoir d’achat et comment réussir à attirer leur attention? « Trois questions qui valent leur pesant d’or, s’amuse Greg Lauzon. D’un point de vue démographique, les Z sont une génération dont les membres sont nés entre 1996, 1997 et 2010. Ce sont eux, les Z – ou encore les zoomers, si on veut leur donner un petit sobriquet, qui fait clin d’œil aux boomers. Si on fait un calcul rapide, les aînés de cette génération ont aujourd'hui entre 18 et 24 ans. C’est la plus scolarisée des générations à ce jour (c’était le cas jusqu’au début de la pandémie, du moins). Une génération de jeunes gens éduqués qui revendiquent des valeurs fortes, qui prônent la qualité du produit et les causes sociales qui lui sont associées. Une génération qui a aussi littéralement grandi avec les réseaux sociaux et les influenceurs. C’est aussi un groupe d’individus dits désintéressés par les médias traditionnels (ai-je surpris quelqu’un?) et qui est en train d’entrer en force sur le marché du travail. Du côté des marques, investir dans l’attention des Z équivaut à une sorte de gros REER qu’il leur sera possible de décaisser dès 2025. »

Génération filtre
Mais revenons à l’essentiel : comment capter leur attention? « S’il y a quelque chose que nous pouvons affirmer sans généraliser, c’est que le best est de leur présenter des contenus courts, stimulants, affirme quant à lui Sébastien Guérard, directeur artistique chez Boo Design. Les Z ont une durée d’attention très courte, vous comprendrez donc que les influenceurs sont très efficaces pour s’adresser à eux. Pour une marque, il faut interagir avec eux le plus souvent possible, leur donner le plus de contenu qui soit. En tant qu’ambassadeurs, ils sont exceptionnels : ils n’hésitent pas à partager et repartager les contenus qu'ils jugent pertinents sur l’ensemble de leur réseaux sociaux – je parle bien sûr ici d’Instagram et TikTok, car vous pouvez oublier Facebook. Du côté des canaux de diffusion, YouTube est évidemment leur préféré. C’est aussi une génération qui a grandi avec les filtres, avec la réalité augmentée. En matière d’accroche visuelle, disons qu’elle n’est pas insensible aux colorations vives et qu’elle n’est pas allergique aux fioritures clinquantes. »

Luxe et durabilité
Il serait aussi de bon augure pour les marques de savoir comment les Z aiment dépenser leur argent. « Ils aiment investir dans la qualité, poursuit Greg Lauzon. J’oserais même dire dans les produits plus luxueux que le faisaient les X et les Y. Le prestige est une valeur qui revient à la mode avec eux. Même pendant la pandémie, près de la moitié des Z disaient vouloir continuer à s’informer sur des produits dits non essentiels ou sur des marques de luxe. Cela ne fait pas d’eux des dépensiers irréfléchis, au contraire : les Z veulent en avoir pour leur argent. Ils associent le luxe, si je puis dire, à la durabilité des produits. Ils aiment avoir un retour sur leur investissement monétaire, d’où leur appréciation des marques plus chères, mais de plus grande qualité. » Des marques telles que les Timbiebs à saveur de gaufres au gâteau de fête? « Peut-être! rigole Greg Lauzon. Il y a toujours un malaise à parler globalement d’une génération, car on ne sera jamais capable, heureusement, de mettre les natifs d’une entière décennie dans un même panier. Ce serait de faire fi de leurs contradictions, de leurs différentes sensibilités. Hâte de voir aussi quel effet aura eu la pandémie à moyen terme sur eux. Cela dit, que vous soyez boomers, X, Y ou autre : habituez-vous à ce que vos marques se mettent au diapason des Z. C’est eux la nouvelle cible. » 

Gen Z