Ils partagent un atelier transdisciplinaire et nomade, une famille, et une passion sans borne pour le fil narratif. Insubordination est l’acmée du parcours professionnel de Catherine Martellinni, ex-rédactrice en chef d’Infopresse, et de Simon Beaudry, ex-publicitaire en agence. À deux, ils inventent mille et une possibilités. Conversation de fin d’après-midi avec des créateurs qui n’ont qu’une quête, celle de raconter une histoire du début jusqu’à la toute fin.

Insubordination
Photo et retouche : Philippe Richelet

Un alliage unique
Si le mot Insubordination peut être perçu de manière péjorative, Catherine Martellini et Simon Beaudry l’envisagent plutôt comme une nouvelle façon d’agir ou de réfléchir. « C’est beaucoup plus relié à une démarche personnelle et à un état d’être », laisse entendre l’artiste visuel et directeur de création. En plus de son expérience en publicité et design chez Radio-Canada, McCann Marketel, Sidlee, Urbania, Bos et K72, on lui doit des projets artistiques tels que Câliboire, Véhicule et scalp, Poste-Québec : Rejoindre le monde, Nécropolitique : les momies québécoises, Québécosse : Une identité et un pays transculturel, La Charge : Fiction et réalité dramatiques). « On se place toujours dans une situation où on peut explorer une avenue créative qui n’a pas été empruntée parce qu’on pense que la solution n’existe pas nécessairement dans la commande », explique-t-il.

« Toutes les grandes révolutions sont nées de l’Insubordination en général, ajoute la rédactrice, créatrice et directrice des contenus, qui a prêté sa plume par le passé à Infopresse, Isarta, 37e Avenue et Bible urbaine et qui collabore toujours aux cahiers spéciaux du Devoir, à la plateforme Devenir entrepreneur, au Fonds des médias du Canada et au Centre PHI. Il ne faut pas croire non plus que tous nos projets sont contre l’ordre établi ! (RIRES) »

Seulement, Catherine Martellini et Simon Beaudry ne souhaitaient plus être campés dans un seul rôle qui leur collait à la peau. «Je ne veux pas faire que de la pub. Catherine ne veut pas faire que du journalisme. On en fait, et on en fait bien. Ce qui nous intéresse, c’est inventer un projet », développe Simon Beaudry. Alliant la force d’impact de l’art visuel et de la publicité avec la rigueur de la méthode journalistique, le duo raconte des histoires qui se veulent évolutives, multiformes et multiplateformes. Ensemble, ils forment un alliage unique et une véritable expertise incarnée. Et si on vous disait que leur modèle d’affaires et leur façon de vivre étaient intrinsèquement imbriqués l’un dans l’autre ? Si, si.

Insubordination_duo
Photo et retouche : Philippe Richelet

On récolte ce que l’on sème
Malgré les étranges moments de confinement à l’échelle planétaire, le contexte de la pandémie a été un tremplin pour Insubordination. Comme quoi dans le chaos peut germer une noble idée. Aux premiers balbutiements de la crise, qui n’avait pas encore atteint nos frontières, le duo de créateurs se catapultait dans le vide, car il croyait que le contenu avait un avenir. « C’est un mot-valise, évoque Simon Beaudry. C’est à nous de le définir. On essaie d’inventer un contenu que les gens choisiront de consommer plutôt que de se le faire imposer. » C’est donc dans cette optique que le couple navigue depuis maintenant 1 année sa fabrique nomade.

Le duo estime que lorsqu’on s’implique, et lorsqu’on offre son aide à la collectivité, sans attentes, et bien, les choses se passent. À preuve ? Un cri du cœur en plein Téléjournal de Patrice Riendeau, agriculteur au Potager Riendeau. Celui-ci redoutait le manque de main-d’œuvre saisonnière pour assurer la récolte. Touchée, la paire Martellini-Beaudry répond à l’appel, en compagnie de la progéniture de Simon, Ulysse et Aglaé. C’est ainsi que de juin à août, la famille se lève à l’aurore à raison de trois jours par semaine pour se rendre aux champs à St-Rémi et prêter main-forte — tout en poursuivant ses mandats créatifs ! Au passage, elle récolte — non seulement de la salade —, mais aussi un mandat de création d’une nouvelle marque pour le marché anglais en Ontario et aux États-Unis, un projet de documentaire lié à son expérience (le tout capté sur iPhone) et des camarades du sud pour la vie. Les choses se passent, qu’on disait ?

Champs
Extrait vidéo du Projet «Sur-le-champs» | Image : Simon Beaudry

Vivre de passion et d’eau fraîche
Insubordination
aspire à demeurer de taille humaine pour se donner le luxe de choisir des projets (et des collaborateurs) qui font écho. Pour l’instant, cela se résume davantage à se faire approcher par des collaborateurs plutôt que l’inverse. Sauf que ce qui se ressemble s’assemble, alors ça lui sied drôlement bien. Pour celles et ceux qui croient : voilà la devise de l’atelier. « C’est à eux que ça s’adresse, spécifie Catherine Martellini. Des personnes passionnées avec qui on veut travailler. Les gens nous ont approchés en raison de notre positionnement différent : soit le passé de Simon ou le mien. Au final, ça revenait à nous deux, et ça revenait à des gens avec qui on aurait voulu collaborer de toute façon. »

Insubordination 4
Extrait vidéo du Reel de l'Insubordination, Acte 1 - version officielle
Image : Simon Beaudry

L’un des exemples les plus tangibles de l’amalgame de leur force est sans contredit l’instarécit Parenthèse — une première expérience du genre pour le studio d’animation français de l’ONF. L’atelier de création a d’abord été interpellé pour les compétences en scénarisation, en stratégie des médias sociaux et en rédaction de Catherine Martellini afin de décliner le fil narratif de sept illustrateurs sur Instagram de différentes façons (publications, Stories, Highlights), en plus de contribuer à la recherche du nom du récit, de même que de proposer une grille graphique qui allait mettre de l’avant le projet. Il se devait d’être vu et connu ! C’est ici que toute l’expertise en art visuel et en publicité de l’autre moitié d’Insurbordination est entrée dans la danse. Imaginées par Simon Beaudry, les publicités servaient à mettre Parenthèse sous les projecteurs. Une campagne dont les artistes illustrateurs et animateurs de l’instarécit eux-mêmes ont participé. Inception ?

« On n’est plus seulement dans la pub, l’art visuel ou le journalisme. On a été invité en tant qu’auteurs pour un récit documentaire interactif », s’ébahit Simon Beaudry, en faisant allusion à une invitation, cette fois du studio interactif de l’ONF, pour un projet dont la première phase d’études vient de se terminer. Il va sans dire que c’est grâce à la pensée connectée du duo qu’Insubordination a été approchée pour cet autre projet qui concorde avec sa passion.

Passionnée, mais insubordonnée ! La paire signe deux autres projets qui lui tiennent à cœur suite à une démarche dite insubordonnée, avec cette envie de faire les choses différemment. À la base un mandat publicitaire, la campagne de L’Université de chez vous de l’Université TÉLUQ est issue du souhait de l’atelier d’y ajouter un volet contenu, qui n’était pas prévu. Autre projet de cœur ? La campagne de financement Donnez-vous une autre voix pour Le Devoir, en collaboration avec l’agence Featuring. En plus d’être passionnée et insubordonnée, Insubordination est engagée aussi ! La campagne Sauvons l’héritage, une collaboration interrégionale, le reflète très bien.  

Le Devoir
Campagne Le Devoir «Donnez-vous une autre voix»
Cocréation Featuring et Insubordination

Héritage
Campagne engagée «Sauvons notre héritage», combat citoyen pour préserver la traverse de Trois-Pistoles.
Crédit : Insubordination, Guillaume Legault et le comité citoyen #Sauvonsl'Héritage
Image : Sebrioux.com

Fabriquer des rêves une bonne idée à la fois
L’une est créatrice dans l’âme, l’autre est créateur dans l’âme. À eux deux, ils forment Insubordination, et veulent s’éloigner le plus possible de la gestion – et de tout ce qui fait en sorte qu’ils ne pourront pas passer du temps à créer. « C’est ça notre valeur ajoutée, notre force et c’est ce qui nous anime », révèle Simon Beaudry. « On espère que ça aille encore plus dans la liberté créative et que ça reste diversifié, et qu’il n’y ait pas une seule sorte de création », enrichit Catherine Martellini. L’atelier fabrique du contenu libre ou de marque par la vidéo ou l’image fixe, le numérique, le documentaire, la balado, l’installation et l’expérience qu’elle soit artistique ou commerciale (publicité, design graphique, branding, la stratégie créative et marketing). Pour être diversifiée, Insubordination l’est !

« On a que des amis, révèle Simon Beaudry. On peut travailler pour nous-mêmes, pour des projets personnels, on peut travailler avec des marques ou des entreprises directes qui veulent notre style de création, et on peut aussi travailler avec des agences ou des studios de création et des maisons de production ». Pas de limite à la créativité ! Puisqu’Insubordination ne se considère pas comme une agence, et ne ressent pas le besoin de se positionner comme « les meilleurs » pour servir des clients, l’atelier de création transdisciplinaire progresse au gré des projets.

Le plus beau dans ce cheminement ? Catherine Martellini et Simon Beaudry ont fondé l’atelier afin d’utiliser les profits pour fabriquer des projets. « On veut prendre le profit qu’on va faire pour le réinvestir dans des projets qu’on bâtira seuls ou avec d’autres artistes. Ce n’est pas de s’enrichir qui nous intéresse, c’est de créer. On va juste essayer de ne pas faire faillite si possible (RIRES) » concluent nos deux créateurs à la philosophie « Robin des bois ».

« Insubordonnez-vous » avec eux ici, sur Facebook, Instagram et Behance.

Insubordination 3

Insubordination 2
Photo et retouche : Philippe Richelet