Elodie Doua

Elodie Doua, Gestionnaire de projets, LG2
Crédit photo : Luc Brissette

  • Une cause qui te tient à cœur : L’inclusion avec un grand « I ». 
  • Qu’apportes-tu sur une île déserte : Mon téléphone.
  • Si tu étais une plante/un livre/une œuvre d’art/un événement historique, tu serais : Livre : Kafka sur le rivage de Haruki Murakami. Plante : N’importe quel cactus. Une œuvre : l’album Because of the Internet de Childish Gambino. Un événement historique : l’élection de Kamala Harris comme VP (récent, mais significatif).
  • Ton mot favori : Je remplace ça par une expression « je dis ça, je dis rien ».

Je n’ai jamais eu d’ami noir

Aussi fou que ça puisse sonner. Aucun. 

Je suis pourtant née sur le continent africain, d’un père ivoirien. Mais j’ai grandi juste en bas du 49e parallèle, en Abitibi, avec ma mère québécoise. Dans une ville où la population noire — aussi petite que la diversité sexuelle d’OD — pouvait littéralement se compter sur une main. J’exagère à peine. 

Si parfois on me rappelait que j’étais différente, avec des questions maladroites ou des commentaires insignifiants, je l’ai souvent oublié. J’ai tout fait pour l’oublier. Consciemment ou inconsciemment. J’ai défrisé mes cheveux, j’ai écouté La Chicane, j’ai perdu mon accent. 

Je suis une abitibienne à la mélanine foncée.

J’ai réalisé que j’étais noire le 25 mai 2020. Une personne de couleur. Une minorité visible. Une personne à risque. J’ai réalisé que j’étais une statistique. Pour les RH. Pour la police. Une expérience exotique sur Tindr.

Je suis invisible dans mon milieu. Et pourtant je saute aux yeux.

Il n’y a pas qu’une seule sorte de noirs. On n’est pas un groupe homogène. Mais dans les yeux de beaucoup de gens, je représente toute une communauté. Parce que je suis leur seule collègue, amie, voisine ou date noire. Je porte le poids de tous les biais et idées préconçues… Sans jamais avoir vécu cette réalité. 

Je suis une noire facile. Comme le couple de black dans un téléroman qui se tient juste avec des blancs. On ne sent pas la différence. Peut-être parce que moi-même j’apprends c’est quoi ma différence. 

J’ai le syndrome de l’imposteur de la noire par moment. 

J’ai réalisé que j’étais noire le 25 mai 2020. Et depuis ce moment, j’essaie de comprendre ce que ça veut dire. J’essaie d’apprendre mon histoire. À célébrer ma beauté, plutôt que de la cacher. À m’exprimer pour ma communauté. 

J’apprends à être fière. 

J’apprends à être noire. 

J’apprends à être moi

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Afin que toute notre industrie se fasse davantage voir et entendre, le Grenier aux nouvelles souhaite présenter des modèles inspirants issus de la diversité culturelle, de sexe, d’identité de genre, d’âge et en situation de handicap dans sa nouvelle série « Dans l’œil de… ». Cette série vise à donner l’espace à des talents cachés de l’univers de la communication – publicité, production, côté agence et côté client, et à nous faire découvrir des personnes qui auraient lancé une initiative pour favoriser l’équité, la diversité et l’inclusion dans leur organisation. Si vous souhaitez soumettre votre portrait, ou connaissez une personne qui serait intéressée, écrivez-nous à [email protected].