Off the record : qu’utilisez-vous comme images pour illustrer vos billets de blogue ? La toile abonde d’articles recensant les meilleures banques d’images libres de droits afin d’agrémenter le marketing de contenu. On n’a qu’à prendre le top 10 de banques d’images gratuites de My Little Big Web ou encore celui de l’agence Sparkling. Au menu : Unsplash, Storyblocks, Burst… Les choix ne manquent visiblement pas.

À la poursuite de banques d’images   

Début avril, le photographe (et concepteur créateur de contenu) Manny Fortin, de l’agence Republik, a dévoilé une série de photos d’un Montréal vacant durant la crise de la COVID-19. Après plusieurs discussions avec son agence, à savoir si les photos devaient être publiées sur ses plateformes ou celles de Republik, ils sont parvenus à la conclusion de les diffuser sur Unsplash afin de rejoindre et d’aider le plus de gens possible. « Il y a les temps normaux, et il y a les temps de crise. Et en ce moment, nos décisions sont prises en fonction de la crise », nous livre-t-il.

Bien que ses images aient été reprises par nombre de sites, dont le Grenier, le fait qu’elles soient libres de droits ne fait pas entièrement l’unanimité. D’un côté, on vante la générosité de partage, et de l’autre, on se questionne sur la valeur de l’image. Quelles places occupent les banques d’images libres de droits dans notre industrie ?

MANNY

Le photographe derrière les images de la métropole aux airs
« apocalyptiques » avoue avoir recours aux banques d’images pour des pitchs à l’interne ou pour des moodboards. « Les banques d’images gratuites me permettent d’aller chercher des choses qui ressemblent un peu à ce que je veux comme cadrage, éclairage, etc. C’est super pratique à ce niveau-là », révèle-t-il.

Audrey S. Racine, stratège média numérique chez Dialekta, use elle aussi des sites comme Pexels et Unsplash dans le cadre de son projet personnel, scool.ca, une plateforme pour simplifier la recherche d’écoles secondaires.

Agent aux communications pour un Ordre professionnel reconnu, Maxime (nom fictif) utilise fréquemment les banques de photos. Souhaitant garder son anonymat, le communicateur pige dans les banques gratuites comme payantes, et parfois même dans ses propres photos.

« Il y a 10 ans, c’était un peu la guerre, estime Christian Tremblay, photographe et réalisateur. Maintenant, c’est un peu devenu la norme, mais tu ne peux pas vraiment aller contre le vent dans la vie. Je pense que les banques d’images ont leur place dans certaines utilisations et que la plupart des agences de publicité l’utilisent à bon escient. Évidemment, tout a un lien avec le budget du client et je peux comprendre qu’avec l’avènement des médias sociaux, la durée de vie des images est beaucoup plus éphémère. Ceci dit, ça n’enlève rien au travail qu’on a à faire. Il y a encore des grosses campagnes imprimées, moins qu’avant, mais pour ces besoins-là, il va toujours y avoir besoin de photographes, de vidéastes, de cinéastes et de réalisateurs pour faire ces images-là ».   

Pro bono en temps de crise

Depuis le début de la crise du coronavirus, on accueille l’essor de solidarité à bras ouverts (à deux mètres de distance). Rose PR, une agence de relations publiques, offre ses services pour venir en aide aux entreprises qui éprouvent des difficultés en communication, et ce, sans frais. Le cabinet d’avocats Jean-François Bertrand avocats inc. s’est lui aussi mis de la partie en offrant des services juridiques pro bono. Plusieurs services web (PlayPlay, Bitrix, Beekast, pour ne nommer que ceux-là) ont étendu leurs plans gratuitement afin de soutenir les PME. English Department offre ses services d’adaptation et de traduction, à raison d’un projet par semaine, sans frais non plus. Pour favoriser le télétravail, Vidéotron et Rogers ont retiré les limites de données de leurs forfaits. Bref, nous ne sommes pas à court de gestes d’entraide.

« Je n’aurais pas pu vendre mes photos de toute façon, affirme Manny. On m’aurait accusé de vouloir capitaliser ça pour profiter de la situation et de faire de l’argent. L’idée était de penser à l’intérêt collectif et être solidaire avec mon industrie en temps de pandémie. Si on parle d’un temps normal, effectivement, je suis d’accord avec l’idée que ton travail et tes photos, ça vaut quelque chose et il faut respecter cette valeur-là ».

« Peut-être que c’est un bel élan de générosité, mais ça n’aide pas son métier, croit Christian. Je trouve que c’est enlever beaucoup de valeur au travail du photographe ». Selon lui, ce qui dicte le prix d’une image, c’est sa portée, son temps de vie et le territoire qu’elle va couvrir : « c’est toujours là-dessus que je me suis basé. Ma photo, je la fais pour toi et je la vends pour ton utilisation commerciale ».  

Achat local et diversité

Christian craint que lorsque la roue repartira une fois la crise terminée, les clients hésitent entre utiliser du stock shop — car moins de budgets — ou engager un photographe québécois. « En ce moment, on parle beaucoup d’achat local pour encourager les entreprises d’ici, dit Christian. Eh bien, les maisons de productions et les photographes font aussi partie de l’équation économique du Québec », conclut-il.

Coordonnatrice du Partenariat Familles en mouvance à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et de l’Observatoire des réalités familiales du Québec (ORFQ), Héloïse Roy se sert régulièrement des banques d’images pour illustrer des articles de vulgarisation. Elle déplore toutefois le manque de diversité.

En effet, on reproche souvent les banques d’images de manquer de représentation et de diversité. On se rappellera notamment de l’initiative de Dove, en collaboration avec Getty Image, afin de créer une photothèque diversifiée et inclusive pour répondre à cette carence.

Alors, quand cette pandémie prendra fin un jour ou l’autre, si on pensait davantage diversité et local ?