Depuis plus de 40 ans, le Studio Harmonie offre un large spectre de services de production sonore. Il est d’ailleurs un précurseur de l’offre élargie dans le domaine. De fait, à une certaine époque, chaque studio avait sa propre vocation pendant que Michel Boucher et son équipe étaient parmi les rares à offrir autant de services en audio.

« Il y a cinq ou six ans encore, on disait que le Studio Harmonie se devait d’être spécialisé dans un seul secteur, lui qui offrait trop de services. Pourtant, la majorité des studios de production en fait autant aujourd’hui, et ce, à grande échelle. De plus, contrairement à eux, nous avons gardé notre côté très intimiste, faisant de nous l’un des seuls survivants, en tant que PME, à Montréal à occuper un créneau personnalisé », raconte le fondateur.

C’est à Longueuil que le studio a fait ses premières armes, principalement dans la publicité, le domaine corporatif et la musique, alors que l’industrie du disque était encore en excellente santé. Une occasion d’acquérir une entreprise qui œuvrait dans le domaine du documentaire et de la série télévisée s’est présentée et c’est ainsi que le Studio Harmonie a ouvert un second bureau à Montréal, maintenant son siège social : « Les douze employés permanents peuvent compter sur des pigistes de manière ponctuelle pendant l’année, car certains projets sont saisonniers. Il n’y a qu’à penser, par exemple, à LOL qu’on enregistre sur une période de six mois et qui nécessite une équipe de bruiteurs et concepteurs. Lorsque nous faisons du doublage, c’est aussi de manière momentanée, alors j’engage temporairement détecteur, adaptateur et directeur de plateau pour travailler sur le projet », explique-t-il. C’est d’ailleurs la grande polyvalence des professionnels qui gravitent autour du studio qui fait sa grande force et qui lui a permis de traverser le temps.
 

Les grands changements

Au cours des quatre dernières décennies, le monde de la production sonore a connu de grandes révolutions. Michel en a été témoin et nous partage comment il les a vécues : « Le premier grand choc a été celui de la chute de la demande des musiciens en studio. On les a remplacés par des synthétiseurs ou ce que nous appelons dans le métier, des sampler. Nous avons été un des premiers, avec Gilles Valiquette, à avoir un studio midi. Des gens travaillaient dans un studio annexé pour créer de la musique originale et souvent, il suffisait que de trois musiciens tout au plus pour faire tout l’orchestre.

Puis, l’ère du numérique est arrivée pour remplacer les rubans. Cette nouvelle technologie coûtait très cher à l’époque. Les équipements coûtaient 10 fois plus cher il y a 20 ans, mais cependant, il faut les remplacer plus souvent. Aussi, on peut les revendre très difficilement, puisque ça évolue très rapidement. Depuis quelques années, le domaine du son et les méthodes de production se transforment allègrement avec les nouveaux médias et sont fragilisés par la mondialisation. Les jeunes qui veulent y percer doivent développer des services adaptés à cette réalité. Avant, pour enregistrer une voix, le talent devait se déplacer pour que l’environnement sonore soit optimal. Cela nous permettait aussi de signer des contrats avec l’UDA ou l’ACTRA. Avec le changement technologique vers le numérique, les professionnels ont commencé à s’équiper chez eux et à travailler à distance. On ne peut pas arrêter le progrès, mais nous sommes rendus à un point où n’importe qui peut faire ça de n’importe où. Une entreprise peut embaucher, par exemple, un narrateur à la retraite aux États-Unis, qui plus est, n’est pas dans l’UDA et sa production va lui coûter quatre fois moins cher car il n’y a pas d’infrastructure à supporter. C’est un phénomène répandu dans la musique, les voix, la conception sonore, dans tout, quoi ! », explique Michel.

En conclusion, Michel relève le point culminant qui fait que, selon lui, le monde de la télévision et de la publicité est en transformation en ce moment : « La nouvelle génération, qui fréquente les réseaux sociaux, possède des tablettes et des cellulaires et n’écoute plus la télévision conventionnelle. De plus, les jeunes consomment de moins en moins de contenu francophone. Cela fait en sorte que toute la culture télévisuelle est en pleine transformation. Ma problématique en tant que fournisseur de services et producteur est que la qualité sonore n’a plus sa place comme avant. J’ai vu des jeunes dans le métro écouter des séries sur une tablette. En réalité, ils ne les écoutent pas, ils lisent les sous-titres ! Tout ce qui est image et son sur ces appareils ne requièrent pas la qualité d’une image haute définition ou d’un système Surround audio. Le marché change à une vitesse folle. Il faut savoir rester dans le coup et suivre le rythme ».