De toutes les motivations évoquées par les professionnels qui choisissent de s’exiler en région, fuir les bouchons de circulation gagne la palme d’or. La qualité de vie en général, la proximité de la nature, les conditions économiques plus avantageuses et les opportunités intéressantes font aussi l’unanimité. Pour un citadin pur et dur, se convertir à la campagne est-il un exercice ardu ? Révélations d’anciens travailleurs urbains qui aujourd’hui maîtrisent l’art de vivre à l’extérieur des grands centres.

Passer à la vitesse supérieure

Marie-Noëlle Lajoie est animatrice radio depuis 23 ans : « Quand tu fais ce métier-là, tu veux animer et aussi grandir à travers l’entreprise pour laquelle tu travailles. Après plusieurs années à Montréal, je me suis rendu compte que les possibilités étaient extrêmement limitées, particulièrement à cause de la structure, la bureaucratie et l’arrivée des vedettes au micro ». En 2015, Marie-Noëlle sent que le moment arrive à point pour découvrir un nouveau marché. Elle accepte donc de se joindre à l’équipe d’animation et de programmation musicale de Boom FM en Montérégie : « Ce que j’apprécie ici, c’est que tout est à faire. Ainsi, j’explore une autre facette du métier qui m’aurait sans doute échappé à Montréal. Je suis appelée à mettre la main à la pâte, à m’impliquer dans la poutine quotidienne et en prime, je suis plus près des auditeurs que jamais ». Travailler dans un petit milieu radiophonique laisse place à plus de liberté, de spontanéité et de créativité. Parlant de créativité, celle de l’animatrice a été très féconde depuis son exil : elle qui avait déjà un garçon à l’époque est aujourd’hui maman d’un joyeux quatuor. « J’ai eu des offres alléchantes pour retourner à Montréal, mais passer du temps avec mes enfants au lieu d’être retenue dans la circulation, ça n’a pas de prix », conclut Marie-Noëlle.

Se donner le feu vert

Associés chez Vert-Lime Média, Luc Weil-Brenner et Caroline Généreux forment un couple : « Après avoir eu un coup de cœur pour une maison, nous nous sommes établis à Magog. Comme nos clients sont situés un peu partout au Québec, notre localisation importe peu. Le monde du travail a évolué et on peut aujourd’hui travailler à distance sans problème. À preuve, la plupart de nos clients ignorent que notre entreprise mène ses activités à l’extérieur de Montréal », relate Luc. L’accès à l’information et les moyens de communication actuels facilitent effectivement la décentralisation des services, notamment dans le secteur des communications. D’ailleurs, il n’est plus rare que le lieu de travail soit un incitatif alléchant pour recruter des talents : « Être en mesure d’attirer des employés grâce à la qualité de vie que la région peut offrir fait toute une différence dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre », explique l’Estrien d’adoption. La force des médias régionaux et la vitalité des entreprises qui offrent des opportunités d’affaires pour les boîtes en communication sont vraiment bénéfiques. Luc raconte : « Déménagés depuis à peine quelques mois, Caroline et moi avons réalisé que plusieurs entreprises spécialisées en technologies de l’information fondées à Montréal ont choisi de s’établir ici. Étant spécialistes en rédaction, conception et marketing, passer moins de temps dans notre auto contribue à diminuer le stress et nous aide à activer le mode création plus facilement ».

Faire un détour obligé

Pour Martin Champoux, directeur de compte chez Absolu, la région s’est imposée d’elle-même : « Tant que nous ne sommes pas extraits de notre routine, on ne voit pas toutes les occasions qui se présentent à l’extérieur de la métropole. On y devient sensible après y avoir goûté et quand on en a plein son casque d’être dans le trafic, rigole-t-il. Bref, quand nous sommes à Montréal, on se croit au meilleur endroit alors on ne cherche pas à savoir ce qui se passe ailleurs. Normal, tout est à portée de main », ajoute Martin. Plus qu’un changement de localisation, c’est un changement de carrière en ce qui le concerne. Animateur à la radio et à la télévision pendant plusieurs années, Martin a agi à titre de directeur marketing au Village Québécois d’antan à Drummondville avant d’accepter l’offre de l’agence Absolu : « Maintenant que je suis du côté service client, j’expérimente la différence d’approche entre la région et Montréal. Ici, je remarque que les gens sont plus détendus et donc se montrent mieux disposés. Et, cela n’a rien à voir avec la qualité des humains, c’est tout simplement que le contexte s’y prête plus facilement », observe Martin.

Clairement, les régions exercent un pouvoir d’attraction sur les professionnels. L’avenir appartiendra-t-il à ceux qui se lèvent loin ?

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Marie-Noëlle Lajoie
Crédit photo : Stéphanie Lachance

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Luc Weil-Brenner et Caroline Généreux

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Martin Champoux