L’école nationale de théâtre du Canada existe depuis 1960. À l’aube de son soixantième anniversaire, l’auguste institution est en mode transformation. On jase théâtre et marketing avec Michel Rafie, directeur des communications et du marketing de cet établissement.

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Michel. Comme toutes les institutions académiques, l’École doit elle aussi faire face à de nombreux enjeux, notamment en matière de compétition, d’outils de communication et d’audiences. Comment ça se passe de votre côté ?

Michel : L’École existe depuis près de 60 ans. Conscients des nouveaux défis sociaux, démographiques et économiques d’aujourd’hui — et dans le souci d’assurer sa pérennité pour les années à venir —, nous nous sommes dotés voilà deux ans d’un plan d’action que l’on appelle Vision 2020.

En quoi consiste ce plan ?

Michel : De façon générale, il s’agit de démocratiser l’accès aux arts de la scène.

De créer de nouvelles voies d’accès à l’École et de diversifier la communauté qu’elle regroupe.

C’est-à-dire ?

Michel : En 58 ans, nous avons formé plus de 2000 artistes. À l’époque, l’École formait 60 artistes par année. Aujourd’hui, on parle de 170 diplômés par année. Nous voulons désormais toucher encore plus de Canadiens. Des milliers de Canadiens !

Par exemple ?

Michel : L’été dernier, nous avons lancé un programme à l’attention des jeunes de 13 à 17 ans où une quarantaine d’entre eux ont suivi une formation intensive de 10 jours. On a décidé d’intégrer ce programme aux sessions d’automne et d’hiver. Et dès l’automne 2018, on va ajouter à cette offre de la formation à l’attention des adultes.

Nous avons également mis la main sur un festival de théâtre canadien qui existe depuis 70 ans et qui regroupe 7500 jeunes à travers le pays. Sears commanditait ce festival. Nous sommes venus à sa rescousse afin d’en assurer la suite.

Tout ce rajeunissement et cette ouverture de clientèle ont dû changer drastiquement la façon dont l’École se mettait en marché ?

Michel : Tout à fait. Nous avons entamé un virage numérique. Nous ne faisons à peu près plus d’imprimé. Nous voulons être là où sont les jeunes, donc en ligne et sur les médias sociaux. Mais pas seulement être là pour être là.  Il faut comprendre que l’on s’adresse à une clientèle très spécifique. Des jeunes qui s’intéressent énormément à la culture, à l’art. Des jeunes qui ont des opinions sur la société. Nous voulons donc créer des lieux de conversation, des lieux de débat. D’échanges.

Ainsi, nous avons créé le blogue de l’École. Et nous avons lancé MomENTs théâtre, une série de capsules vidéos où des enseignants de l’École partagent des trucs du métier. On a également procédé à ce que l’on appelle un Instagram take-over. Durant la saison scolaire, on donne accès au compte Instagram de l’École aux étudiants. Chaque jour, un étudiant raconte sa journée du lever au coucher.

Hmmm... Ça n’a pas dû être évident pour votre institution de laisser les clés du char aux jeunes ? (RIRES)

Michel : En effet. Mais il n’y a eu aucun dérapage ! Nous sommes au contraire très fiers de ce qu’ils font. Les jeunes cherchent l’authenticité. Les messages publicitaires trop bien ficelés, ça ne passe plus. Ils veulent se reconnaitre. Quoi de mieux à cet effet que de laisser le micro, ou la caméra plutôt, à nos étudiants actuels pour informer nos futurs étudiants ?

La compétition est féroce, j’imagine. Les programmes universitaires de théâtre. La danse, le cinéma, la musique. Les écoles internationales. Comment tirez-vous votre épingle du jeu ?

Michel : Nos compétiteurs — les universités — sont d’immenses institutions avec d’énormes moyens. Nous, nous misons sur nos atouts.

La situation de l’École est unique dans le marché. Sous le même toit, nous avons une école francophone et une école anglophone. Et comme nous sommes un organisme indépendant, nous avons plus de flexibilité, d’agilité. Enfin, nos 300 enseignants sont des professionnels actifs dans le milieu, et non pas des enseignants de profession.

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Michel Rafie, directeur des communications et du marketing, École nationale de théâtre du Canada

300 profs pour 170 élèves ? Méchant ratio ! (RIRES) Pouquoi cette décision de démocratiser vos actions ?

Michel : Parce qu’afin de faire face à la complexité de notre époque, les gens ont besoin de moyens qui leur permettent de bien réfléchir et de prendre les bonnes décisions. Nous pensons que l’art, et particulièrement le théâtre, a cette capacité. Ultimement, ce que l’on forme, ce sont des artistes à qui on va demander de faire la différence dans la société de demain.

Plus de gens toucheront au théâtre, ou seront touchés par celui-ci, meilleur sera le monde. J’aime ça. Je vous dis "merde" !

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