Que celui qui n’a jamais visité de site porno lève la main gauche. Ensemble, les sites pornos rejoignent plus de 450 millions d’usagers mensuellement, soit plus que les clientèles de Netflix, Amazon et Twitter réunies. Alors, pourquoi faire de la pub pour ces sites ? On en parle avec Alexandre Émond Turcotte de Brad.

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Alexandre. Je sens que cette conversation va se retrouver naturellement truffée de double sens. Histoire d’alléger l’atmosphère, chaque fois que cela arrivera, on met 25 cents dans un pot plutôt que de rire nerveusement, d’accord ? (RIRES)

Alexandre : C’est un peu ce qui s’est passé lorsque l’on a commencé à travailler sur le compte de Pornhub. Tu sais, en partant, des filles et des gars qui regardent de la porno sur les heures d’ouvrage, dans des aires ouvertes, ça crée de beaux malaises. Et une belle banque de jeux de mots niaiseux ! Mais on finit par passer à travers.

Alexandre Emond-Turcotte

Alexandre Emond-Turcotte, chef de groupe à la création | Brad Montréal

Pornhub est reconnue mondialement pour ses pubs disjonctées telles qu'une campagne pour prévenir la propagation du Zika lors des Jeux Olympiques de Rio, une champagne de financement pour du porno dans l'espace, une trame sonore électro conçue uniquement avec des sex-toys. Comment vous êtes-vous retrouvé au lit avec eux ?

Alexandre : Ce que les gens ignorent, c’est que leurs bureaux sont situés à Montréal. Les dirigeants de l’entreprise nous ont rencontrés, voilà deux ans ; ils aimaient bien ce que l’on faisait. On s’est ramassé avec un premier mandat : Speak from the Heart, un microsite de cartes de souhaits « osés » pour RedTube, un des sites du réseau Pornhub.

Un Hallmarkxxx !

Alexandre : Exactement ! Mais avec des messages un peu plus épicés que ceux que l’on retrouve sur les cartes chez Jean Coutu. Ça a bien fonctionné. Les gens ont embarqué — 20 millions de vues par jour ! — et ils ont acheté les cartes.

On rit là, mais ça doit pas être facile de faire de la pub de porn.

Alexandre : C’est effectivement facile de tomber dans les jokes de gars, les jeux de mots poches, le vulgaire. Mais pour un créatif, c’est du bonbon. Un peu comme les pubs de Viagra, tu ne peux pas parler directement du produit. Tu dois trouver d’autres chemins, tu dois être plus intelligent.

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Crédit photo : Donald Robitaille 

Pourquoi un site comme Pornhub annonce-t-il ?

Alexandre : La marque aime profiter du PR. Elle recherche donc des occasions d’apparaitre au grand jour. Comme dans le cas des Olympiques de Rio. Ou encore avec l’offensive Gives America Wood, où la marque plantait un arbre pour chaque 100 vidéos visionnés dans une catégorie précise (je te laisse deviner laquelle !).

Elle vise donc à détabouiser la consommation de la porno. En étant présente au grand jour, elle s’inscrit dans le quotidien. C’est d’ailleurs un peu ce que vous avez fait avec votre arbre généalogique. Hey, c’est pas rien ! Une pub de Pornhub pour souligner la journée de la famille, pincez-moi quelqu’un ! (RIRES)

Alexandre : Alors qu’ultimement, chaque visite sur le site se convertit en occasion ratée de créer une famille ! (RIRES) On savait qu’on fessait fort. D’ailleurs, certains médias ontariens ont refusé notre pub.

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Pourtant, il est plutôt cute votre arbre. Comment en êtes-vous arrivé à ce concept ?

Alexandre : L’idée de départ était de dire que nous sommes la somme de tous nos fantasmes. De là, le saut créatif vers l’arbre généalogique où des archétypes du porn forment une grande famille. Ainsi, la granny et le dirty grandpa ont enfanté la housewife et le step-dad qui, à leur tour, avec le plumber et la MILF ont donné naissance à la nurse (qui elle-même s’est mariée avec une autre nurse !), et ainsi de suite. Avec au bout de l’arbre, la simple mention : You.

Tu en parles comme s’il s’agissait d’une vraie famille !

Alexandre : J’avoue qu’on a beaucoup réfléchi sur ces couples et le fruit de leur union ! (RIRES) Par exemple, la femme à la maison et le plombier, ça ne pouvait pas donner la maitresse d’école ou la secrétaire. Ça devait être plus col bleu. Comme la next door’s girl!

Prochaine initiative ? Le jour du déménagement pour le Québec ?

Alexandre : On y a pensé. Ça reste à voir. Ce moment a été tellement surutilisé en pub que c’est difficile d’être surprenant.

Pourtant, vous avez déjà le pizza guy de votre bord ! Au fait, on est rendu à 25,75 $ en trente sous. On se fait venir une pizza livrée par une cougar habillée en collégienne et accompagnée par un monsieur muscle à la cagoule de cuir ?

Alexandre : Pas le temps. Je dois travailler sur la prochaine campagne Pornhub. (RIRES)

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