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Au cours des 20 dernières années, il a vécu de très près l’évolution vertigineuse des technologies numériques. Il leur a survécu même, devrais-je dire. Car pendant que de nombreux autres joueurs sombraient, victimes de l’inévitable obsolescence des modes technologiques, Robert Gosselin a su réajuster constamment le cap. Pointe de conversation à la sauce résilience avec le président de WAI (We Are Interactive).

Robert. Comment es-tu arrivé dans le monde numérique ?

Robert : Après un DEC en multimédia, j’ai débuté ma carrière en tant que spécialiste de l’expérience client (l’ancêtre du très prisé UX/UI) dans des entreprises technologiques telles que Nurun. Par la suite, j’ai travaillé chez Infogrames, une compagnie de jeux vidéo. À l’époque, c’était aussi gros qu’Ubisoft, sinon plus.

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Robert Gosselin, président directeur général | WAI

Et après ça, Sid Lee en tant que codirecteur de création numérique, une première à l’époque. Tu as fondé WAI tout de suite après ?

Robert : Non. Quand j’ai laissé l’agence, l’intention était de profiter de la vague du flash pour offrir mes services à la pige. La demande était énorme.

À qui le dis-tu ! Toute la ville se battait pour une dizaine de flasheux, tous morts de rire. Jusqu’à ce que le iPhone sorte.

Robert : Ouenye… À mon départ de Sid, Philippe Meunier m’avait dit : « méfie-toi, les technologies, ça change aux 2-3 ans ». Dans ma petite tête naïve de jeune programmeur, je m’étais dit : ben voyons donc, il sait pas de quoi il parle. Ben, il savait de quoi il parlait ! (RIRES)

En janvier 2010, avec un partenaire, tu fondes WAI.

Robert : Oui. À ce moment, on agissait surtout en tant que studio de production pour les agences de publicité. Les agences n’étant pas vraiment structurées à l’interne, la demande était forte.

Comme pour flash. Et comme pour flash, le marché a évolué, les agences se sont équipées. La prophétie de Philippe frappait encore !

Robert : En fait, la demande était tellement éclatée, je réalisais qu’en m’éparpillant, je me fragilisais. J’ai décidé de focaliser sur le mobile. Tout le monde voulant son app ! J’avais une équipe de développeurs mobile à l’interne.

En effet, tous les clients voulaient avoir leur app coûte que coûte. Même si on leur expliquait que de refaire le site dans une app ce n’était pas une app, ils la voulaient pareil. Les apps sont-elles mortes elles aussi ?

Robert : Je ne dirais pas ça. Mais la demande a diminué de beaucoup. Je n’en fais presque plus. Je pense qu’on a appris que celles qui réussissent sont tout d’abord utilitaires. On en a conçu une pour notre client Uni-Sélect (un détaillant de pièces d’auto) qui permet au personnel des ateliers mécaniques de capturer et centraliser les données d’inspections automobiles à partir de leur iPad. Pas mal plus efficace que de tout noter sur des feuilles pleines de cambouis.

Parlant auto et applications, il se passe quoi avec Prkair, ta startup qui voulait réunir locateurs d’espaces de stationnement urbain et travailleurs à l’affût d’un espace de stationnement ?

Robert : C’était une très bonne idée. La preuve, plusieurs l’ont copiée depuis. Mais à cette époque, j’ai dû affronter une grosse épreuve personnelle : ma femme est tombée malade. Ça m’a forcé à revoir mes priorités ; tu ne peux pas t’occuper de ta famille tout en étant un superman entrepreneur. De toute façon... Même si j’avais bootstrappé l’application (NDLR financé), je n’avais pas les moyens de la commercialiser. Peut-être ai-je trop hésité au moment où j’avais des offres d’investisseurs. Bref, une belle histoire à raconter...

Beaucoup plus qu’une belle histoire, si tu veux mon avis. Oui, il y a un Robert qui est sorti un peu magané de cette aventure. Mais je vois en même temps un Robert professionnellement et humainement grandi.

Robert : Tu as raison. Je pense être devenu un meilleur entrepreneur. Moins avide de croissance à tout prix — j’ai finalement réalisé que ça ne correspondait pas à ma vraie nature. Aujourd’hui, plutôt que de focaliser sur telle ou telle technologie, WAI œuvre en amont. On analyse les besoins du client, on développe des stratégies en vue de créer des écosystèmes numériques, on peaufine l’expérience usager, on arrime les systèmes déjà en place. Oui, on fait encore de la programmation, mais au lieu de se dire on fait du mobile, ou on fait des apps, on reste technologiquement agnostique. On choisit celles qui font le plus de sens dans un contexte X.

Tiens, tiens, une approche à l’abri de l’obsolescence technologique. C’est Meunier serait fier de toi ! (RIRES)

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