Crédit photo : Donald Robitaille

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Pour Cora Tsouflidou, les déjeuners, c’est du sérieux. Trente ans qu’elle se casse le coco à trouver de nouvelles façons d’embellir nos matins, c’est beaucoup d’amour, ça ! Pointe de conversation avec celle qui a donné ses lettres de noblesse au p’tit déj' !

Bon matin, Cora. Vos 130 restaurants sont présents dans toutes les provinces du pays. Vous vous apprêtez à affronter le marché américain. Le segment est en pleine explosion. Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce créneau que vous avez vous-même créé ?

Cora : Lorsque j’ai quitté le foyer avec trois ados, on n’avait rien; juste ce que l’on avait sur le dos. Et malgré mes 18 ans d’études en philo et en littérature — je voulais être écrivaine —, personne ne voulait m’engager. J’ai donc ouvert un petit resto dans un casse-croûte désaffecté à Saint-Laurent. Trouvant ridicule de servir du mélange à crêpes Aunt Jemima à mes clients — des policiers et des travailleurs — j’ai décidé de leur faire de vraies crêpes. Avec de vrais fruits. Les gars étaient en extase ! Dans ce petit bouiboui de rien du tout, je découvrais la chose la plus importante au monde: la créativité, ça ne passait pas seulement par la rédaction de livres. Par mes déjeuners, je pouvais créer pour les autres. Et recevoir en retour de l’amour !

Comment se fait-il que personne n’ait eu l’idée de faire une spécialité des déjeuners avant vous ?

Cora : Parce que personne n’avait pu prouver que c’était rentable. Il y avait bien les brunchs des hôtels, mais ce n’était pas donné. Nous, on a pris l’extravagance des brunchs et on l’a amenée au niveau de la rue. Un petit déjeuner à quatre, c’est moins cher qu’un souper au resto. Et c’est plus convivial. Au-delà des œufs et des crêpes, on a démontré que le déjeuner pouvait devenir un moment précieux à passer en famille ou entre amis.

Depuis l’ouverture de votre premier restaurant en 1987, on a assisté à une véritable ruée vers l’œuf. Chaque semaine, des Mère poule, des Eggspectations, des Allo ! mon coco et autres Eggsquis ouvrent boutique. De toutes ces chaines, n’est-il pas ironique de constater que Cora soit la seule à ne s’être pas affublée d’un jeu de mots boiteux avec « œuf », « coco » ou « egg » pour indiquer son appartenance à la catégorie ?

Notre succès a en effet attiré beaucoup de nouveaux joueurs, les « eggquelquechoses » comme on les appelle. La rançon du succès, faut croire ! Même Saint-Hubert, mon modèle d’inspiration, s’apprête à offrir des déjeuners les fins de semaine.

Ce qui vient clore le débat. C’est définitivement l’œuf qui vient en premier, la poule le concédant elle-même ! (RIRES) Même McDo met maintenant de l’avant ses cocos à longueur de journée.

Cora : Quelque part, c’est pas fou. Après tout, l’infirmière qui se lève à 14h a droit elle aussi à son petit déjeuner avant son quart de soir. Peut-être qu’on fera ça un jour, nous aussi.

J’ai découvert que Cora offrait également des repas à l’heure du lunch. Après être devenue la reine du déjeuner, allez-vous devenir la king du lunch ?

Cora : La matière première d’une tricoteuse, c’est la laine. Nous, c’est l’offre déjeuner. Mais il s’agit d’une offre qui s’étend relativement facilement sur l’heure du lunch. Après tout, si en France, les gens mangent des omelettes au souper, aucune raison de ne pas en manger le midi, ici !

Donc pas question de vous lancer dans les burgers ? Eggspectations le fait déjà - ce qui est assez ironique considérant qu'ils sont pris avec le mot "egg" dans leur nom ! (RIRES)

Cora : Non. Je vais leur laisser cette tale. On ne peut être bon dans tout, n'est-ce pas ? On a encore tout plein d'opportunités, pourquoi s'éparpiller ?

Comment fait-on pour être meilleur que les autres quand ceux-ci nous imitent, alors ?

Cora : La compétition pourra toujours reprendre le nom de nos plats sur ses menus, elle pourra toujours prendre des photos de nos assiettes afin de les copier, Cora demeure l’original. Le déjeuner, c’est un créneau qui demande beaucoup d’attention, beaucoup d’amour, beaucoup d’authenticité. Ça, ça ne s’imite pas je crois.

Pas facile à faker, l’amour...

Cora : Exactement. Notre mission est de constamment faire mieux que les autres. De chouchouter nos clients. De leur offrir des petites attentions.

Comme mon morceau de sucre à la crème à la caisse ?

Cora : Tout à fait. On ne vous le donne pas parce qu’on pense que vous n’avez pas assez mangé. C’est un simple petit geste qui démontre symboliquement qu’on aime en donner plus que ce à quoi on s’attend.

Et n’est-ce pas là, chère Cora, une belle définition de l’amour ?

Cora : Bien dit. C'est ça l'amour !

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