Longtemps le marketing expérientiel fut réservé à quelques heureux ou moins heureux élus. Animation dans un bar avec une escouade de pétulantes midinettes à la courte jupette, kiosque photo coloré lors d’un festival de la patate quelconque, fallait être là, sinon ça n’avait jamais eu lieu. Les nouvelles technologies allaient changer la donne.

Nicolas Marullo, président et chef de la direction, CINCO

Nicolas, tu as démarré Cinco en 2002 en réaction au marketing dit traditionnel. Pourquoi ?

Nicolas : À cette époque, je m’interrogeais sur la valeur du marketing de masse, dont la prémisse était de rejoindre le plus de paires d’yeux possible. Toutes les entreprises basaient leurs plans là-dessus. Générer cinq millions d’impressions avec un seul et unique message. Je trouvais ça ridicule.

Surtout qu’on n’a que l’impression d’avoir livré ces impressions. Difficile à tracker des yeux qui conduisent sur une autoroute ;) Mais en même temps, les médias de masse génèrent une très grande portée, ce qui n’était pas le cas du marketing événementiel.

Nicolas : En effet. Les marketers se disaient : pourquoi payer des milliers de dollars pour rejoindre un tout petit groupe de gens alors que je peux parler à tout le monde ? Le gamble que je fis à l’époque était basé sur les hypothèses suivantes : 1. Un petit groupe de personnes allait pouvoir générer beaucoup d’impact. 2. On allait avoir besoin de messages personnalisés. 3. L’expérience allait prendre la place du message au cœur des campagnes de communication.

Des exemples de ce que vous faisiez à l’époque.

Nicolas : Le nom CINCO veut dire « cinq » en espagnol. J’y voyais une césure entre le 9 à 5, le monde du travail, et le 5 à 7, celui de l’après-travail. On a donc organisé des performances artistiques dans des contextes de 5 à 7 de professionnels. Par exemple, un défilé de mode avec des mannequins coiffées de cellulaires Telus dans les cheveux ou une contorsionniste dans une Cadillac. Cela peut sembler banal aujourd’hui, mais à l’époque, c’était révolutionnaire !

Mais ça demeurait tout de même des actions à petite échelle. J’imagine que l’arrivée des médias sociaux vous a donné un petit coup de main ?

Nicolas : Pendant quatre, cinq ans, on était en effet David qui se battait contre Goliath. L’arrivée des médias sociaux nous a effectivement permis une croissance exponentielle.

L’arrivée des téléphones intelligents aussi.

Nicolas : Tout-à-fait. Dorénavant, une personne qui vit une expérience intéressante peut la partager avec des milliers de personnes via les réseaux sociaux. Grâce à cette nouvelle connexion entre le réel et le numérique, plus besoin de forcer le message dans la gorge des gens.

Max Lenderman disait dans son excellent « Experience the message », « la campagne de marketing expérientiel vient avec une invitation personnelle à se joindre à la conversation. Cette invitation est en opposition à l’aspect invasif du marketing traditionnel. » Cette invitation allait avoir un impact sur la nature même des expériences. Pas sûr que je vais sortir mon iPhone parce qu’un beau jeune homme me donne une cannette de Cola au coin de Peel et Sainte-Catherine ! (RIRES)

Nicolas : Les expériences allaient en effet devoir devenir plus importantes, plus larges, plus créatives. Et la technologie allait nous aider à réaliser ceci. En 2008, nous avons créé CINCO Lab, notre département de R&D technologique. Je reviens d’ailleurs d’une mission exploratoire en Chine, au Japon et en Corée où j’ai rencontré des gens œuvrant dans des firmes technologiques, des startups, des universités afin d’identifier des technologies que l’on pourrait intégrer dans nos expériences.

Toute cette technologie ne risque-t-elle pas de déshumaniser l’expérience, et de ce fait, cette précieuse relation que l’expérientiel tente de créer entre une marque et un consommateur ?

Nicolas : La techno doit être au service de l’expérience, pas le contraire. Mais c’est clair qu’elle va jouer un rôle important dans notre capacité à créer de meilleures expériences connectées. Pense seulement à la réalité virtuelle !

Perpective d’avenir pour CINCO ?

Nicolas : On continue d’évoluer. Une entreprise qui stagne est une entreprise qui meurt. On veut ouvrir un bureau à Shanghai. À la fois pour être plus près de cette zone névralgique de l’innovation technologique, mais aussi pour profiter de la croissance, notamment en Chine où le marketing expérientiel est tout nouveau pour eux. Et on continue de créer des expériences connectées pour nos clients tels que Bell, Loto-Québec et Ford dont notre programme de commandite pour le TIFF s’est mérité le Best in Show au dernier Sponsorship Marketing Council Canada.

Une belle expérience, ça ! (RIRES)

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