On parle de la fin de l’ « ère papier » un peu comme lorsqu’on annonçait la mort des cinémas à l’arrivée des clubs de location vidéo, des cassettes au lancement des disques compacts, et du Walkman à la commercialisation du iPod. Vrai pour certains, faux pour d’autres, une chose est sûre, les technologies changent les façons de consommer le contenu et la survie dépend bien souvent de la capacité d’adaptation.

Est-ce que le papier est (vraiment) mort ?


Pour sa part, Pierre Proulx, consultant marketing auprès des intervenants de l’industrie des livres, magazines et périodiques, ne croit pas que le papier va disparaitre. Le côté organique de cette matière le rend unique et fait vivre une expérience différente. « Les derniers chiffres que nous avons eus dénotent une hausse du lectorat. Cependant lorsqu’on fait une analyse plus poussée, on remarque que cette hausse marquée est du côté de l’édition de niche. » Pierre constate que la difficulté est en effet principalement vécue par les magazines généralistes. Avec le Web, l’accès aux nouvelles est rendu facile et rapide ce qui les impacte fortement. Pour assurer leur succès, « les éditeurs [généralistes ou niches] doivent développer du contenu en fonction de trois éléments importants : la personnalisation, la valorisation et la convergence. »

Pierre Proulx
Consultant marketing

Les contenus multiplateformes convergents


La première étape est d’élaborer une stratégie de diffusion de contenus multiplateformes, si ce n’est pas déjà fait, ou encore de l’optimiser s’il y en a une existante. « Au départ, il y avait l’imprimé et le site Web. Maintenant, il y a une grande variété de plateformes et applications accessibles », souligne Pierre. Les dirigeants de magazines peuvent rapidement se perdre dans cette jungle de possibilités. L’idéal est de commencer par établir « quels sont présentement les moyens du magazine, ceux qu’ils peuvent utiliser et qui sont ses lecteurs. Ces bases permettent de bâtir du contenu pertinent et de trouver le meilleur moyen pour le diffuser. » Ricardo et Nouveau Projet, deux magazines niches, sont de bons modèles selon Pierre. « Ils se démarquent par la richesse de leurs contenus et leur capacité à pouvoir offrir plus au lecteur. »

Qui est votre lecteur  ?


Cet élément semble évident, mais il peut être facilement oublié lors de vos nombreuses sessions de travail, changement de stratégie, création de contenus… Il ne faut jamais perdre de vue que le lecteur est celui qui consomme le contenu. Il est l’ambassadeur de la marque dans son entourage. Jean-François Morin, responsable à l’association québécoise des éditeurs de magazines, explique qu’il y a plusieurs moyens accessibles et plutôt rapides pour bien le connaître. « Les éditeurs peuvent créer des banques de données avec les infolettres par exemple et faire des sondages auprès de ses abonnées. » Ces données sont précieuses pour assurer la pérennité du magazine.


En offrir plus


Un éditeur qui connaît bien ses lecteurs peut personnaliser son contenu. « Le magazine doit être en mesure de développer du contenu convergent, exclusif et adapté pour faire rayonner sa marque sur l’ensemble des plateformes. C’est ce qui lui permettra de se démarquer. Présentement, les lecteurs sont habitués à rechercher l’information sur leur mobile. Il faut donc être capable de leur offrir plus. Aujourd’hui, l’éditeur ne peut pas passer à côté de l’infolettre, de l’évènementiel et des produits dérivés », précise Pierre. Le tout permet de diversifier les sources de revenus sans uniquement compter sur le lectorat primaire. Encore une fois, « Ricardo le fait très bien. Il est une marque niche, multiplateforme, et offre de nombreuses choses pour soutenir sa marque. » Jean-François souligne qu’il est également intéressant de proposer du contenu payant. « Le lecteur a accès à beaucoup d’informations gratuites sur le Web ce qui peut rendre la tâche un peu plus ardue, mais il existe des solutions. Le magazine peut offrir une période d’essai gratuite pour la version numérique ou proposer l’achat à la pièce comme le fait Protégez-Vous. Ce dernier rédige du contenu de qualité, recherché par son lectorat. » Les clients sont plus enclins à payer pour des articles qui ont une valeur ajoutée et contiennent des données d’experts plus difficilement accessibles ailleurs.

L’ « ère papier » semble être viable pour les années à venir tant et aussi longtemps que les magazines continueront à s’adapter et à évoluer. Les trois mots clés à toujours se rappeler pour y arriver restent : « personnalisation, valorisation et convergence ».