Le monde de la postproduction est très différent selon qu’on le vive — et surtout qu’on en vive! – à Québec ou à Montréal. On discute de cette altérité avec Jean-François Dugal, cofondateur de Studio Élément, boite de postproduction sise à Québec... et à Montréal!

Jean-François Dugal, Directeur général, Studio Élément

Pointe de conversation en moto sur la 20 avec Jean-François Dugal


Jean-François, 10 ans après avoir fondé Studio Élément à Québec, ton partenaire (et ami de longue date) Éric Denis et toi avez décidé d’ouvrir un second bureau de postproduction, cette fois à Montréal. Pourquoi cette décision  ?


JF : Cela faisait déjà plusieurs années que nous envisagions une percée à Montréal, principalement pour ajouter le volet publicité à notre offre. Nous faisions déjà du film, du corporatif, du mapping architectural (pensez Moment Factory, si vous ne savez pas ce que c’est), mais très peu de pub; à peine 20 % du volume à Québec alors que c’est près de 95 % à Montréal.

Est-ce à dire que malgré la présence de plusieurs agences de publicité à Québec, la postproduction publicitaire se fait surtout à Montréal ?


JF : Comme la majorité des boites de production publicitaire ont pignon sur rue à Montréal, tout le reste en découle : les réalisateurs, les comédiens, les équipes techniques, les clients sont à Montréal. Donc évidemment, toute la postprod se fait elle aussi à Montréal. Au début, on envisageait un petit studio avec un seul artiste, histoire de faire le pont avec le bureau de Québec — et de permettre par exemple des approbations client à partir de Montréal ; pratique pour les comptes gouvernementaux provinciaux.

Et... ?


JF : En novembre 2014, on a eu vent que La Cavalerie voulait se départir de son volet de postproduction. On a jasé, vite. On s’est dit « let’s do this ». Trois mois plus tard, en février 2015, on ouvrait nos portes.


Jamais un voyage entre Québec et Montréal ne s’est fait aussi vite (RIRES) ! Et ça se passe comment avec les maisons de prod à Montréal ?


JF : Comme nous sommes restés dans les mêmes locaux, les premiers projets provenaient principalement de La Cavalerie, et de Jet Films [maintenant Morrison]. Mais comme nous sommes une entité distincte, on a construit notre porte d’entrée, histoire de démontrer notre indépendance.

Sachant à quel point l’industrie est compétitive, les autres maisons de prod l’ont-elles franchie cette porte ?


JF : Quelques-unes ont osé, mais pas toutes ! D’ailleurs, on s’attendait à cette réaction; c’est sûr que notre proximité physique avec La Cavalerie et Jet en a effrayé quelques-unes. De fait, ce sont surtout les agences qui sont venues nous voir directement. L’an 1 a surtout servi à roder le studio, la mécanique. Et je te dis qu’on n’a pas chômé ! Donc, on n’a pas vraiment eu l’occasion de démarcher les autres maisons de production. Ça va venir... on est ici pour servir toute l’industrie montréalaise. Comme toute autre maison de postproduction.

Chaque chose en son temps, c’est sage. 
Et l’avenir du bureau de Québec dans tout ça ? Va-t-il devenir le centre de service du bureau de Montréal ?


JF : Pas du tout. En fait, notre arrivée à Montréal a même nourri le bureau de Québec. Lorsqu’on déborde à Montréal, nos artistes de Québec peuvent facilement s’intégrer aux équipes en place, à distance. Mais de toute façon, le marché à Québec est totalement différent. Notre croissance n’y passe pas par la pub, mais plutôt par la production de films et de séries. À cet effet, on a d’ailleurs créé notre propre compagnie de production. Avec mes partenaires, j’ai produit Les Feuilles mortes — avec Roy Dupuis — et on envisage déjà la création d’une série tirée du film. On travaille également sur Le pacte des anges (qui sort en salle le 4 novembre prochain) et sur Squat, le prochain film de Samuel Matteau. Et sans oublier Mission Yéti, film d’animation produit par 10e Ave. C’est donc quatre films sur lesquels on aura planché cette année, ce qui dépasse largement notre ancienne moyenne d’un film aux trois ans !


La suite de Montréal ?


JF : Pour l’instant, ce bureau n’a que la moitié de la taille de celui de Québec, toutefois il est définitivement appelé à grandir. Comme je te disais, on n’a pas fini de développer la publicité. Et il y a le film, la fiction, éventuellement. L’avenir est donc très excitant pour nous. Et la coexistence de ces deux bureaux va nous forcer à raffiner notre méthode de travail à distance entre Montréal et Québec. Ce qui devrait nous permettre de développer l’extérieur par la suite. On l’a déjà fait avec Los Angeles et avec l’Europe. Et ça fonctionne très bien.

C’est certain que si vous réussissez à faire disparaitre les frontières entre Québec et Montréal, le monde entier est à votre portée (RIRES) !


JF : J’avoue !