Scénario, préproduction, tournage, postproduction, découpage… si le langage est identique en long métrage, en télévision et en publicité, l’approche créative n’est pas la même. Simon-Olivier Fecteau nous plonge dans les réalités bien différentes de la réalisation d’un 30 secondes, d’un 22 minutes et d’un 90 minutes.

Il compte à son actif de nombreuses publicités pour des marques telles que Plaisirs Gastronomiques et Les fromages d’ici, un long-métrage : Bluff, et plusieurs expériences télé, dont Ces gars-là. Simon-Olivier est un réalisateur qui a façonné son métier : « J’écris ce que je réalise et je joue dedans. » Cette approche est à la fois stimulante et stressante. « Pour Ces gars-là, nous tournons 10 épisodes par année, s’il y en avait un onzième, je crois que je ferais un burn-out », confirme-t-il en riant.

La source d’inspiration


Pour Simon-Oliver, l’idée d’un scénario de télé ou de film part d’une expérience personnelle. Ces gars-là est inspiré d’une histoire interminable avec son ex et d’un été passé avec Sugar Sammy. Il nous fait remarquer que c’est aussi vrai pour un film comme Star Wars : une relation père-fils compliquée et des poursuites de vaisseaux inspirées du passé de pilote de Georges Lucas. « On part souvent de nous et on romance ».

En publicité, le mandat est bien différent, car l’idée doit partir d’un produit et d’un objectif précis : la vente. Dans ce cas, l’inspiration peut venir d’un peu partout, même d’un comédien. « Lors du casting pour Plaisirs Gastronomiques, Bruno Marcil avait une couleur différente et nous avons construit l’univers et le ton autour de son personnage. »

Le bon gris


Simon-Olivier précise qu’un bon réalisateur de pub n’est pas nécessairement un bon réalisateur de long métrage! Alors qu’un film raconte tout d’abord une histoire, une publicité compte généralement plutôt sur l’esthétique afin de bien communiquer son message. Elle permet d’avoir une certaine latitude créative, mais le travail de réalisation demeure basé sur des idées existantes. « Il y a des choix à faire comme les couleurs, les cadres… mais c’est plus pointu. On peut s’obstiner pour un gris. Le range de décisions est moins grand, mais les décisions à prendre sont plus précises. » Ces deux domaines demandent une expertise différente, mais sont tous deux l’expression de la créativité. « J’ai beaucoup de respect pour les gens qui aiment faire ça [de la publicité]. C’est un art en soi. Dans notre société québécoise, il y a plus de publicités qui vont passer à l’histoire que de films », souligne-t-il.

La pub, une voiture de luxe


« La pub, c’est comme être en Lamborghini. Tu as une journée pour tourner 3-4 plans : c’est un gros luxe! Tu as le temps de travailler. En cinéma, on tourne 3 à 5 pages en une journée et en télé, de 10 à 12 pages. Et elle est là la grande différence », nous explique Simon-Olivier. Ce précieux temps joue beaucoup au niveau de la prise de décisions. « Plus tu vas vite, plus tu laisses tomber des éléments », complète-t-il. Les budgets en publicité sont également plus grands qu’en cinéma et en télévision. Ceci se fait ressentir à toutes les étapes de la réalisation. « En publicité, tu as tout ce qu’il te faut pour travailler, alors qu’en cinéma et en télé, il y a toujours des concessions à faire, car il n’y a jamais d’argent. Ça nous force à être plus créatifs et à écrire des scénarios plus simples! »

Le client


Par sa nature, la publicité demande à l’équipe de production de travailler avec un client. « Le plus gros travail de la réalisation en pub est de rassurer le client. Il faut savoir gérer son insécurité face à un domaine qu’il ne connaît pas ou peu », précise-t-il.

En long métrage et en télévision, il n’y a peut-être pas de client à proprement dit, mais d’autres facteurs peuvent venir influencer la création. « 99 % des films québécois sont produits avec les fonds de la SODEC et Téléfilm Canada. Le scénario doit donc être accepté par ces instituts. Il y a déjà un choix éditorial à cette étape. Il peut aussi y avoir des mésententes entre le producteur et le réalisateur, ou la relation entre l’auteur et le réalisateur peut être plus difficile : il ne voit peut-être pas les choses comme l’auteur les voit…», explique Simon-Oliver.

Quand on lui demande de choisir entre pub, télévision et long métrage? « La pub est en troisième peu importe, puisque la motivation reste de vendre un produit. Même si c’est bien amusant et que ça fait vivre de belles expériences, ce n’est pas comme raconter une histoire personnelle. Entre le cinéma et la télé… j’ai fait beaucoup de télé ces derniers temps, alors j’ai maintenant le goût de faire du cinéma! »

En chiffres…


Long métrage
Écriture : De 6 mois à 10 ans…
Préproduction : 90 jours
Tournage : 30 jours
Postproduction : 125 jours

Télévision (10 épisodes de 22 minutes chaque)
Écriture : 14 jours par épisode (21 jours avec les corrections)
Préproduction : 45 jours
Tournage : 2 à 3 jours par épisode
Postproduction : 7-8 jours par épisode

Publicité
Conception : 21 jours
Préproduction : 14 à 21 jours
Tournage : 1 jour
Postproduction : 14 jours

  • Ces chiffres sont basés sur un projet moyen et ne sont pas représentatifs de tous les types de productions au Québec.


Article paru dans le Grenier magazine du 25 avril. Pour vous abonner, cliquez ici.


Simon-Olivier Fecteau sur le plateau de tournage de « Ces gars-là »