Ce vendredi soir, ma dulcinée et moi nous sommes offerts un concert à la Maison symphonique de Montréal; haut lieu de prédilection pour écouter et savourer un beau concert de musique. Au programme: L’univers symphonique du cinéma – Hommage à John Williams avec l’orchestre FILMharmonique sous la direction de Francis Choinière. L’occasion était rêvée d’apprécier toutes les subtilités de ces œuvres musicales magistrales composées par Williams : Star Wars, Jaws, E.T., Indiana Jones, Jurassic Park, Schindler’s list, Harry Potter, et d’autres.

Mais…dès les premières notes de la première pièce, deux surprises nous attendaient. Une quarantaine de barres lumineuses entourant les musiciens scintillaient à la verticale en alternant les couleurs et les motifs avec, j’imagine, pour intention « d’augmenter » l’expérience de l’auditoire. On voulait peut-être créer un effet immersif pour séduire un public plus large? Possible, je l’ignore. L’autre surprise concerne mon cerveau. J’avais la désagréable impression que ces artifices lumineux faisaient ombrage au plaisir d’écouter la musique interprétée. Je ressentais une forme de perturbation, d’intrusion par un parasite dans mon expérience musicale qui étouffait mon plaisir.

À ce sujet, des recherches en neurosciences ont d’ailleurs montré que l’attention visuelle et l’attention auditive se partagent des ressources limitées. Ainsi, lorsque des stimuli visuels saillants, par exemple des lumières qui clignotent captent l’œil, ils réduisent la capacité du cerveau à traiter les sons en temps réel : on parle alors de « surdité attentionnelle » (inattentional deafness). Des études ont clairement démontré que l’augmentation de la charge visuelle entraîne une baisse mesurable de la détection et du traitement cérébral des sons (Macdonald & Lavie, 2011; Molloy et al., Journal of Neuroscience, 2015; Regenbogen et al., PLoS ONE, 2012).

Je pense que c’est une erreur que de désirer à tout prix bonifier une expérience d’écoute avec du « bling bling » parce que, finalement, on perturbe l’écoute plutôt que de l’améliorer. Non seulement la bonification de ladite expérience est un échec, mais on contamine la plaisir attendu, espéré : accueillir une musique sensée nous transporter. Ça traduit bien notre époque, où l’on veut tellement que tout soit à son paroxysme, que tout corresponde à l’ultime fois où…

Cher lecteur vous sentez probablement mon désarroi. Allons! Venez avec moi vers la lumière. Bien qu’éclairante, cette lumière vers laquelle je vous convie n’est pas visible, c’en est une beaucoup plus subtile, une lumière symbolique et positive, une lumière qui vous invite à une réflexion. Donnez une pause à vos yeux, évitez de leur jeter trop de poudre, soyez tendre avec eux et toutes les fonctions cognitives en lien avec les perceptions visuelles qui vous grugent chaque jour. Profitez de ces moments précieux pour éveiller d’autres sens; votre ouïe par exemple. La musique c’est magique…ça stimule émotion et bien-être, l’imagination, la beauté, l’élévation et elle est un extraordinaire véhicule à voyager dans le temps. Tout ça est lumineux en soi, sans besoin d’artifices, c’est beau et ça se reçoit très bien assis dans une grande salle de concert comme à la Maison symphonique.

Élevons-nous collectivement vers un repos de nos yeux et stimulons notre ouïe. Les bienfaits en seront décuplés. Non seulement vous offrirez un repos à vos yeux, mais vous jouirez pleinement d’expériences musicales grandioses. J’estime que c’est souvent dans le dépouillement que l’émotion est la plus forte. Pour citer Léonard De Vinci : La simplicité est la sophistication suprême.

Jean-François Roy, amoureux du son
Cactus production sonore