On a pendant très longtemps enseigné et glorifié la méthode Pixar pour raconter des histoires. Des récits touchants, remplis de personnages bien développés et de moments qui nous arrachent une larme. Cette méthode de storytelling repose sur une structure bien rodée qui suit souvent un schéma précis : on commence par un personnage dans une situation normale, puis un événement majeur vient chambouler sa vie. Ce moment pivot déclenche une série d’aventures, de défis et de transformations personnelles.

Ça suit généralement le modèle suivant :

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Pixar, c’est intelligent et bien réfléchi, mais c’est lent. Très lent. Sur les plateformes numériques, les gens consomment du contenu à vitesse grand V. Ils défilent, cliquent, et swipent dans la seconde. Si ça ne capte pas leur attention, ils passent à autre chose. C’est dommage et c’est fâchant pour les créatifs, mais la réalité est que nous n’avons plus le luxe de faire une belle intro, de poser un contexte et de prendre son temps. Il faut accrocher dès le départ, de risque de les perdre et de les voir passer à autre chose.

Ma plus récente conversation avec Jean-Jacque Stéliski pour le podcast La Grande Idée, aborde d’ailleurs ce sujet. « Actuellement on est dans quelque chose qui fait plutôt peur et qui menace dans une certaine façon le storytelling. J’irais même jusqu’à dire que de ce point de vue-là, la publicité, si c’est véritablement le canal qu’elle veut emprunter, elle est relativement menacée. Elle est menacée, surtout d’incapacité de faire ce qu’elle prétend vouloir faire. Et le temps qu’on impartit à cela aujourd’hui est une espèce de temps saucissonné en 10 secondes, 15 secondes, 30 secondes. Ça ne m’apparaît pas tout à fait intéressant pour la survie de la pub », affirme Jean-Jacques Stréliski.

L’importance d’un bon hook
Sur la majorité des médias sociaux, où l’attention se mesure en secondes, il devient essentiel de capturer l’attention de l’audience immédiatement. Là où Pixar prend son temps pour installer un contexte et construire une tension, les créateurs de contenu moderne doivent, eux, aller droit au but. Une vidéo doit commencer avec un hook fort, quelque chose de visuellement frappant ou émotionnellement poignant qui capte l’attention sur-le-champ… à la limite du clickbait parfois.

La méthode Goldfish
Les audiences, lorsque sur ces plateformes, ne cherchent pas nécessairement des histoires complexes. Ce qu’elles veulent, c’est de la clarté, de l’impact et de l’immédiateté. Chez Studio Kay, on a développé la méthode Goldfish pour raconter des histoires. Cette anatomie de storytelling nous force à gagner l’attention des gens dans les premières secondes et à réinfuser une dose d’excitation toutes les 5-10 secondes, à travers une multitude de hook. Un hook peut prendre la forme d’une statistique choquante, une affirmation qui remet en cause une croyance, une anecdote qui connecte personnellement, un effet sonore, un mouvement caméra inattendu, etc. On embarque donc les gens dans une montagne russe d’émotions, qui nous permet de les garder attentifs, le temps de livrer notre message publicitaire.

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Un peu d’espoir
Là où Pixar trouve encore sa pertinence, c’est dans sa capacité à tisser des récits visuels sur des plateformes où la consommation est plus lente. Les formats comme les web-séries, les podcasts, la fiction, les expériences immersives ou encore les documentaires permettent de prendre le temps d’installer une atmosphère, de construire des personnages et de faire monter la tension. Dans ces environnements, le public est plus disposé à s’immerger dans une histoire qui évolue progressivement, offrant ainsi aux créateurs l’opportunité de jouer avec la profondeur et la nuance. Ce contraste souligne que, bien que les règles du jeu aient changé pour la création de contenu rapide sur les réseaux sociaux, les formats plus longs et immersifs ont encore leur place. La clé est d’adapter la méthode narrative au bon canal.

Le storytelling est en pleine transformation. Les créateurs doivent comprendre que le contexte dans lequel une histoire est consommée détermine la manière dont elle doit être racontée. Sur les réseaux sociaux, le temps est compté et chaque seconde perdue est une occasion manquée. Il faut frapper fort, surprendre et divertir pour maintenir l’attention d’un public habitué à une consommation effrénée de contenu. En revanche, dans des contextes plus lents et immersifs, l’art de la narration classique — avec tout son développement émotionnel, ses nuances et ses détours — peut encore prospérer.

Chez Studio Kay, nous croyons en une approche hybride qui marie la rapidité des réseaux sociaux avec la profondeur des récits traditionnels. Nous reconnaissons qu’il est crucial d’évoluer avec les attentes du public tout en respectant l’intégrité narrative. Nous devons continuellement réinventer notre façon de raconter des histoires tout en restant fidèles à notre mission : capturer l’attention, éveiller les émotions, et, surtout, créer un lien durable entre l’audience et les marques. Que ce soit dans un format rapide ou plus étendu, la véritable magie réside dans notre capacité à adapter notre storytelling sans sacrifier son essence.