Et si nous étions des chiens de Pavlov face à nos appareils connectés ? Au moindre bruit de notification, nos oreilles se dressent! C’est une réaction chimique qui se passe alors dans nos cerveaux, une poussée de dopamine. Comment en prendre conscience, comment poursuivre la rédaction d’un texte malgré la sonnerie et le petit «1» qui apparait sur notre icône Slack. On parle de plus en plus au droit à la déconnexion, mais qu’est-ce que ça implique réellement ?

On en discute avec Laurie Michel, conférencière et formatrice spécialisée dans le bien-être numérique. Ancienne accro à son téléphone, elle décide en 2019 de créer Vivala afin d’aider la communauté à mettre en place de saines habitudes autour de la technologie. Elle accompagne les organisations à instaurer le bien-être numérique dans leur culture d’entreprise et faire vivre le droit à la déconnexion.

laurieLaurie Michel

À quoi fait-on référence lorsqu’on parle de «bien être numérique» et de «saines habitudes numériques»?
Laurie:
La technologie est l’une des plus grandes révolutions de notre monde et aussi géniale soit-elle, elle est arrivée dans nos vies de façon fulgurante et sans manuel d’utilisation pour notre bien-être! On passe plus de 7h par jour sur Internet et l’hyperconnectivité est devenue un enjeu sociétal.

Dans ce contexte, le bien-être numérique c’est la mise en place de saines habitudes autour de la technologie pour prendre soin de sa santé mentale, physique, relationnelle. Reprendre le contrôle de sa consommation en ligne, décider de ces moments de connexion sans se laisser envahir. Mettre en place de saines habitudes numériques c’est replacer la technologie à sa place d’outil!

On peut distinguer le bien-être numérique en entreprise qui va se différencier par une aide à la gestion des distractions numériques, la mise en place d’actions pour réduire le présentéisme numérique, la surcharge informationnelle et l’accès à un droit à la déconnexion en dehors des heures de travail. Le bien-être numérique en entreprise s’inscrit dans une démarche de mieux-être au travail.

Selon toi, pourquoi le droit à la déconnexion, notamment en dehors des heures de travail, est un sujet de plus en plus courant?
Laurie:
La frontière entre la vie personnelle et la vie professionnelle se réduit de plus en plus à cause des outils numériques ! Cette disponibilité constante épuise. Le droit à la déconnexion est l’une des solutions pour réduire les risques psychosociaux de l’hyperconnectivité. Notre mode de travail a évolué au cours des dernières années avec l’augmentation du télétravail. Cela a amené un défi supplémentaire pour lâcher prise en fin de journée, car désormais il n’y a plus de séparation physique entre le travail et la maison. Pas de période de transport pour décrocher. Tout se déroule au même endroit et cela complique considérablement la déconnexion mentale et numérique de son travail. Dans un monde où on doit toujours aller plus vite, il n’est pas toujours évident de s’autoriser à ralentir et accéder à de vrais temps de repos ressourçants. Je dirais donc qu’il y a une demande de la part des équipes qui souhaite évoluer dans des environnements de travail qui prône la saine performance, qui s’engage pour une bonne conciliation famille-travail et le droit à la déconnexion en est l’une des clés.

Des pays européens ont mis en place des actions autour du droit à la déconnexion. La première loi au Canada est passée en juin 2022 dans la province de l’Ontario et cela a ouvert la discussion d’un point de vue légal sur ce droit au repos en dehors des heures de travail.

Comment expliquerait-on que la majorité d’entre nous ont le vertige à l’idée d’être déconnecté·es?
Laurie:
Les plateformes populaires que nous utilisons tous les jours ont été conçues par des équipes désirant nous faire consommer leur solution sans fin pour des raisons financières (pub). Plus on est en ligne plus on leur rapporte de l’argent. Ces entreprises ont mis en place des stratagèmes pour ancrer des habitudes chez les utilisateurs.

On parle de 99,2 % des utilisateurs de téléphone intelligent qui souffrent de nomophobie, la peur de se séparer de son téléphone. Il se passe énormément de choses sur Internet, certaines personnes peuvent avoir la sensation de manquer des choses à chacune de leur déconnexion numérique que ce soit dans la sphère perso ou pro, c’est le fameux syndrome FOMO (Fear Of Missing Out).

Le web c’est aujourd’hui une façon de communiquer avec les autres et les attentes ont aussi évolué avec les systèmes d’instantanéité de nos outils numériques. Il y a une certaine pression en termes de rapidité de traitement qui peut aussi perturber l’accès à la déconnexion.

Dans un cadre professionnel, comment se protège-t-on de distractions numériques?
Laurie:
La technologie nous invite à savoir tout en temps réel, c’est l’une de ses promesses et l’un de nos plus grands défis en tant qu’humain parce que nous sommes curieux. Et si c’était important? Et si c’était une chose à laquelle je ne m’attends pas?

C’est essentiel de s’éduquer, de se former pour mieux gérer les outils numériques d’un point de vue bien-être et non seulement technique comme nous sommes souvent habitués à le faire.

En termes d’action immédiate à faire, si ce n’est pas déjà le cas, faites le réglage des outils de communication. Réglez vos notifications pour éviter qu’elles ne volent pas votre attention trop souvent.

Si vous êtes à l’aise avec le doux bruit du silence, entrainez-vous à retirer la sonnerie de votre téléphone cellulaire pour créer une bulle de concentration quand vous avez des tâches importantes à avancer, sans oublier de prévenir vos collègues de votre indisponibilité provisoire!

Dans tes mots, quelle est ta définition du bien-être?
Laurie:
Le bien-être est pour moi une combinaison d’actions qui mènent à un sentiment de satisfaction et de paix intérieure. Celui-ci demande du travail personnel, n’est jamais acquis et peut évoluer au fur et à mesure du cheminement de la vie et des envies. Cependant il y a pour moi une combinaison indispensable, au bien-être de chacun qui est:

  1. De prendre soin de sa santé mentale et physique, notre corps est le moteur de notre vie
  2. S’accomplir, qu’importe que ce soit dans un projet familial ou professionnel, c’est une clé de notre épanouissement personnel
  3. Entretenir sa vie sociale en planifiant des moments de qualité avec les gens qu’on aime
  4. Travailler dans un environnement professionnel sain et qui permet de vivre sa vie d’humain pleinement

On vous encourage donc à prendre votre pause sans connexion aujourd’hui. Rendez-vous chez Luke’s? Serez-vous victime de FOMO? À vous de nous le dire!

Pour en savoir plus sur le sujet, on vous invite à consulter vivalaoffline.com

Le bec a plusieurs plateformes de référence ou de soutien en ligne dont LifeSpeak, ALAViDA, LIFT et Togetherall. Autrement, la ligne d’assistance reste dispo 24/7 au 1-888-355-5548.

luke