Il y a 5 ans, j’écrivais ceci :«Je n’ai qu’une chose à dire aux dirigeants d’agence : croyez en la relève, redonnez au suivant, la relève est votre avenir, investissez-vous en elle. Encadrez-les jeunes, motivez-les et, surtout, soyez bienveillants et accueillants, car le talent, c'est comme le reste, ça se cultive.» Source : ici

5 ans plus tard, mon industrie me fait mal.

Deux situations me démontrent que mon industrie n’en a parfois rien à cirer de sa relève, elle ne s’engage pas et elle n’a qu’elle-même à blâmer sur le fait que dans toutes les agences, il y a de nombreux postes à pourvoir.

Des étudiants de ma cohorte à la maîtrise en comm-marketing sont venus me raconter ce qu’ils ont entendu des conditions de travail de leurs confrères et consoeurs qui œuvrent en agence de communication depuis 1 ou 2 ans. Ils voulaient savoir «si c’était comme ça dans toutes les agences…» Je leur pose la question : «mais qu’est-ce que vous voulez dire?»

Leurs amis travaillent dans 5 agences différentes et ils ont tous le même discours : «On travaille super tard, on fait facilement des 50-60 heures par semaine. Aucune heure supplémentaire n’est payée. Nos supérieurs ont peu d’expérience et ne peuvent ou ils n’ont tout simplement pas le temps de nous aider et guider. On est plus souvent qu'autrement laissé à nous-mêmes». Un de mes étudiants était sidéré que ses amis qui avaient 2 ans d’expérience en agence et une maîtrise, gagnaient un salaire de 34K… Lui qui effectue un retour aux études, qui est passionné et extrêmement curieux du monde des communications, était plus que découragé alors qu’il gagnait un salaire beaucoup plus élevé dans une autre industrie avant son retour aux études. Il se posait de sérieuses questions s’il avait fait le bon choix.

Le 2e cas m’a sidéré, une agence m’a contactée pour avoir des références pour un poste de coordonnatrice au service-conseil. J’ai donné plusieurs noms et une de mes protégées s'est rendue très loin dans le processus de recrutement. Elle possède un BAC en arts et d'autres formations connexes, elle a 2 ans d'expérience en agence pour exactement le même poste et on lui a dit : «Tu as un excellent profil mais tu n’as pas de BAC en Comm ou en marketing»; elle n’a donc pas été engagée. Elle était découragée et avait le goût de tout lâcher alors qu’elle se donne dans ce milieu depuis 2 ans et elle voulait tellement travailler dans cette agence soit disant hot même en baissant son salaire actuel. Le poste en question a été pourvu auprès d’une finissante au DESS que je connaissais et qui m’écrivait à quel point elle se sentait démunie dans cette agence avec zéro support et qu’elle songeait déjà à quitter ce milieu après 1 mois en agence.

Sérieux, j’ai bien beau être passionnée par les communications, par le développement des idées mais j’ai honte, honte de voir le si peu de places et de considérations qu’on laisse aux jeunes. Sérieux, qu’est-ce qui se passe? Vous n’arrêtez pas de dire que vous manquez de ressources et de talents mais vous n'êtes même pas capable de prendre soin de ceux qui sont déjà là et vous n'êtes même plus capable de reconnaître ceux qui ont la fibre - diplôme du métier ou pas.

J’ai un message aux jeunes, ce n’est pas toutes les agences qui sont ainsi. Cherchez, creusez, vous allez en trouver plusieurs qui correspondent à vos valeurs. Oui le salaire d’entrée est parfois peu élevé mais il augmente rapidement et on s’assure, pour certaines agences, de respecter les barèmes qui existent dans le milieu.

Quant à mes collègues, dirigeants d’agence, je vous dirais : embauchez les curieux, les fougueux diplômés ou pas. Déjà d’avoir la fibre dans ce milieu c’est une profession de foi. Pour le reste, encadrez-les, faites leur croire en notre métier, il a tant d’impact et de pertinence. Le talent, ça se cultive si on en prend soin et si on sait le reconnaître. 

Ah et puis une dernière chose chers collègues, je ne sais pas si j’ai encore le goût de vous proposer des candidatures. Je vais les garder pour moi.

Sonya Bacon