Pour la génération d’avant-guerre et celle des baby-boomers, les choix de carrière s’effectuaient très tôt et le nombre d’avenues à considérer était assez limité. La sélection d’un métier ou d’une profession était perçue comme une décision définitive qui engageait un individu dans un cheminement précis et rectiligne, pour l’ensemble de son parcours professionnel. Pour plusieurs, la transition professionnelle s’avérait un processus linéaire qu’ils ne vivraient qu’une seule fois, à partir de l’école, jusqu’à un emploi dans une organisation au sein de laquelle ils évolueraient, pour aboutir en une retraite bien méritée. Il était tout à fait naturel d’espérer un emploi à vie, lorsqu’on avait la chance de se joindre à une bonne organisation.

Pour faciliter l’établissement de leur carrière, de la fin de la guerre jusqu’aux années 1970, les nouveaux travailleurs ont bénéficié d’un bas taux de chômage : pendant les années 1960 le taux de chômage moyen était de 5,0 %, la moyenne est passée à 6,7 % dans les années 1970. 

Ceux qui se sont joints à la population active sur le marché du travail au début des années 1980 voyaient probablement les choses de façon similaire à leurs prédécesseurs, lorsqu’ils ont amorcé leur carrière. À leur arrivée, ils ont par contre connu des conditions plutôt défavorables : le taux de chômage annuel moyen qui se situait à 7,6 % en 1981 est passé à 12 % en 1983, oscillant autour d’une moyenne annuelle de 9,4 % pour la décennie de 1980. C’est le début des changements structurels du marché de l’emploi : on observe la croissance des emplois dits « atypiques ». Plusieurs ont dû cumuler des emplois à temps partiel ou temporaire avant de pouvoir accéder à un poste permanent.

Les années 1990 ont aussi présenté leur lot de défis pour les travailleurs. La récession de 1990-91 s’est fait lourdement sentir : moins de gens ont perdu leur emploi qu’au cours de la récession de 1981-82, mais les chômeurs mettaient alors davantage de temps à se trouver un emploi. Ce n’est que vers la fin de la décennie qu’il y aura reprise de l’embauche, pour qu’enfin en 2000 le taux de chômage annuel moyen canadien chute à son plus bas en 20 ans, à 6,2 %.

Après un bref sursaut à la hausse en 2001, le taux de chômage a poursuivi sa chute jusqu’en 2007 où il s’établissait à 5,2 %, puis ce fut la crise. Après avoir atteint un pic de 9,2 %, le taux de chômage est à la baisse depuis 2010 et il s’établissait à 5,8 % en mars 2018.

Il y a donc beaucoup d’emplois disponibles, mais les facteurs économiques et politiques qui ont eu pour effet de restructurer le marché du travail ont également eu pour conséquence d’amener les travailleurs à revoir leur relation à l’emploi.    Et c’est bien ainsi. Le biologiste et naturaliste Charles Darwin disait : « Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements. » 

Considérant l’évolution rapide du marché du travail d’aujourd’hui et celle qu’on anticipe dans un futur prochain, l’ensemble des travailleurs sont confrontés à la nécessité de s’adapter aux besoins et exigences changeantes des organisations. Le processus de transition professionnelle n’adopte plus une forme linéaire. Il prend plutôt la forme d’un processus en boucle dans lequel on s’embarque en début de carrière et que l’on parcoure et reproduit au rythme des évènements qui le ponctue.  

Cette constante mouvance des milieux et des fonctions professionnelles, fait en sorte qu’il n’est guère possible de considérer l’évolution professionnelle recherchée comme une destination spécifique à atteindre. Il est plutôt question de choisir une direction générale, un chemin que l’on souhaite parcourir. Tout au plus, on pourra anticiper la présence de certains jalons à proximité, mais il est ambitieux de croire que l’on puisse projeter l’ensemble de sa route à l’avance.

Certains y verront un désavantage d’autres une opportunité. Autrefois ceux qui combinaient des emplois à temps partiel et temporaire le faisaient par obligation. De nos jours plusieurs font le choix enthousiaste du travail autonome multifacettes. On donne aux gens qui adoptent un tel « mode de vie professionnel » le joli nom de « slasher » en référence à la barre oblique en anglais. Cet article de Café Babel présente quelques adeptes convaincus.

D’autres rechercheront la stabilité qu’apporte l’appartenance à une organisation établie. Dans un cas comme dans l’autre, le travailleur est seul responsable de la gestion de sa carrière. Non seulement doit-il maintenir ses compétences à niveau, mais aussi demeurer attentif à l’évolution de sa profession et de son secteur d’activité pour pouvoir planifier son développement professionnel.  Nous sommes donc passés d’un choix ponctuel de début de carrière à un processus de révision continu des objectifs et du perfectionnement professionnel.

Et vous, où en êtes-vous actuellement dans votre processus de transition professionnel ?

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