Alors que les algorithmes filtrent, fragmentent et parfois frustrent, stratèges médias et marques cherchent le saint graal pour susciter l’engagement. Nos pouces scrollent à une vitesse folle et nos cerveaux papillonnent d’un contenu à l’autre : capter l’attention est devenu un véritable défi. Entre statistiques parfois inexplicables et comportements numériques en constante évolution, naviguer dans ce contexte est tout sauf paisible ! J’ai eu la chance d’échanger avec Valérie Labonté-Côté, directrice stratégies chez Publicis, pour mieux comprendre le phénomène et explorer quelques pistes pour s’y adapter.

Valérie Labonté-Côté

Scroll, engagement et shadow banning
Sur les réseaux sociaux, la portée organique des contenus est en chute libre et le fameux shadow banning rend la visibilité incertaine : ton contenu peut disparaître des fils d’actualité sans avertissement, même si tu n’as rien enfreint. L’algorithme se nourrit d’engagement et pousse ce qui suscite déjà de l’interaction, créant un cycle où il devient crucial de trouver la balance entre contenu pertinent, promotionnel et aligné avec les valeurs des audiences.

Les stats qui frappent :

  • 8 secondes : durée moyenne d’attention en ligne (Microsoft, 2023), ce qui est moins que celle d’un poisson rouge !
  • 1,7 à 3 secondes : temps dont dispose une vidéo TikTok pour convaincre avant d’être balayée.
  • 6 à 8 secondes : durée moyenne du temps alloué à une publication, toutes plateformes confondues (Statista).

Curieusement, cette époque ultra-numérique renforce un désir de retour à la simplicité. Que ce soit dans la mode – les t-shirts de band vintage que les jeunes n’ont jamais connus – ou dans les moyens de communication, le retour des dumbphones en Angleterre, équivalents des flip phones d’autrefois, traduit une nostalgie tangible et un désir de retrouver une époque plus « simple ». Les médias comme Substack, avec leurs newsletters longues rappelant la popularité des blogues d’autrefois, surfent sur cette tendance et encouragent une consommation plus réfléchie du contenu. Comme le souligne Valérie Labonté-Côté, « de plus en plus, on observe un retour au format analogue pour reprendre le contrôle sur notre attention. Même chez les jeunes, le balancier revient : les dumbphones, les Polaroids… ce sont des façons plus intentionnelles de consommer du contenu. »

Malgré ce zapping constant, les analyses récentes révèlent que notre capacité d’attention n’a pas diminué — surprise !

Un vrai vent d’espoir! Une publication LinkedIn de James Hurman, relayée par Mark Ritson le 26 juillet dernier, montre dans le graphique Sustained attention scores adult vs youth 1990-2025 que la consommation de contenus plus longs et choisis reprend du terrain. Comme le souligne Valérie : « Notre plus grand compétiteur, c’est le contenu. »

De l’attention à l’action
Capter l’attention, c’est bien. La transformer en action, c’est un tout autre défi. Selon Valérie, les stratégies les plus efficaces combinent micro-contenus narratifs, formats interactifs et appels à l’action intelligents. Elle souligne également l’importance de l’innovation, citant l’exemple de la marque CeraVe : en repensant ses contenants avec des matériaux durables et en optimisant leur référencement grâce à l’IA, la marque a réussi à accroître à la fois son engagement et sa visibilité.

Dans le domaine des campagnes, certains succès se distinguent par leur pertinence : rester à l’affût de l’actualité et générer du contenu qui rejoint les intérêts et valeurs du public, au point de susciter la participation. Valérie cite spontanément le lancement du compte Tim Hortons Québec comme un exemple parfait, qui a su créer une base d’audience engagée autour de réalités auxquelles le public peut se connecter.

Diversifier les formats aide, mais n’est pas une garantie. Parfois, la répétition crée un rituel : la série Love Island, par exemple, produit des semaines de contenu similaire et conserve un engagement impressionnant.

Vers un engagement plus humain
Au-delà des clics et des interactions superficielles, le véritable défi est de bâtir une relation avec l’audience. Ce qui compte, ce n’est pas tant le format que la pertinence et la valeur ajoutée : offrir une expérience plutôt qu’un simple message. Les marques et créateurs qui se démarquent sont ceux qui approchent leur public avec générosité et authenticité, en apportant aide, inspiration ou même un sourire dans la journée.

Comme le rappelle Valérie : « Il ne faut pas oublier qu’on parle à des humains, ne jamais sous-estimer la connexion, parce que c’est facile de s’égarer avec l’arrivée de l’intelligence artificielle dans nos outils ! »

Capter l’attention en 2025 n’est pas mission impossible : il s’agit de mobiliser créativité et intelligence, sans jamais perdre de vue qu’au bout de chaque post se trouve un humain en quête d’émotions et de contenu qui punch.