Les enfants ont à peine mis un pied à l’école que l’excitation de la rentrée télévisuelle se fait sentir. Après tout, il faut bien s’accrocher à un peu de divertissement pour alléger le retour automnal à la routine. Malgré l’importance de la diffusion en continu (Streaming), les Québécois·es restent fidèles à leurs rituels télévisuels, attirés par des visages familiers, des rendez-vous rassembleurs et un ancrage bien francophone.

Pour Isabelle Fournier, directrice de groupe, activation & investissement chez Cossette , la rentrée télévisuelle est un moment qu’elle qualifie d’excitant — et son employeur partage cet enthousiasme. Chaque année, Cossette Média publie le Comparagraphe, un rapport sur les habitudes de consommation télé et vidéo au Québec.

« On voit une diminution d’année en année, mais l’écoute au Québec reste quand même encore assez importante », explique Isabelle Fournier. En moyenne, les adultes de 25 à 54 ans consacrent 12,1 heures par semaine à la télévision, contre 8,2 heures dans le Canada anglais. Comment expliquer cette fidélité ? Pour Isabelle, la réponse est claire : « On est porté à regarder du contenu francophone. Il y en a moins sur les plateformes numériques qu’à la télé. Et il y a les têtes d’affiche québécoises, qui attirent vraiment les gens. » En d’autres mots, le public veut des histoires qui lui ressemblent, portées par des personnalités locales et proches de sa réalité. Contrairement au Canada anglais, où les grilles sont saturées d’importations américaines, les palmarès québécois sont dominés par des productions locales. L’an dernier, les vingt émissions les plus regardées au Québec étaient toutes des créations d’ici.

L’information et le sport en force
Si le divertissement demeure roi, l’information et le sport ne sont pas en reste. Les chaînes de nouvelles comme LCN et RDI ont connu des croissances amenées par une actualité internationale et locale particulièrement chargée dans la dernière année. Même constat du côté du sport, la présence des Canadiens en séries éliminatoires a propulsé TVA Sports, dont l’auditoire a bondi de 21 %. « Les gens veulent de l’information proche de leur réalité, dans leur langue, et ils ont confiance quand ça vient de nos plateformes », souligne Isabelle Fournier.

Des stratégies hybrides
Le rapport révèle que la majorité des nouveautés passent désormais d’abord par les plateformes numériques avant d’arriver à l’antenne. « On voit que les télédiffuseurs veulent utiliser toutes leurs plateformes et rentabiliser leurs productions au maximum. C’est de plus en plus comme ça que les fictions sont lancées : une première fois en numérique, puis à la télé. Antigang est l’exception cette année », observe Isabelle Fournier.

Antigang et les autres coups de cœur
Justement, parlons d’Antigang. Cette quotidienne policière sur les ondes de Radio-Canada, signée Fabienne Larouche et Luc Dionne, est déjà pressentie comme l’un des plus gros succès de la saison. « Le duo Larouche-Dionne est garant de succès. La thématique du crime organisé a toujours eu un grand intérêt au Québec. Et la distribution est de grande qualité », souligne Isabelle. D’ailleur, Cossette Média prévoit déjà que la série occupera la deuxième place des cotes d’écoute de l’automne, juste derrière Chanteurs masqués.

Les autres nouveautés prometteuses ? Dérive (Crave), un thriller psychologique poignant, tout en suspense ; Société distincte (TVA), un suspense psychologique teinté de science-fiction ; Bellefleur (Noovo), un drame lumineux sur l’amitié et la paternité ; et Piano public (Télé-Québec), la toute première compétition musicale de ce genre au Québec. Sans oublier les retours attendus de STAT, Indéfendable, Infoman, Tout le monde en parle et En direct de l’univers, qui continuent de rallier de larges publics.

Publicité et innovation
La rentrée télé, c’est aussi de l’innovation côté annonceurs. Bell Média a déjà testé au Canada anglais le téléachat interactif avec la technologie Shopsense AI et souhaite désormais l’implanter au Québec. Selon Isabelle, « certains annonceurs pourraient être intéressés par cette façon d’inciter les téléspectateurs à interagir directement avec les produits vus à l’écran ». Radio-Canada, pour sa part, prépare un outil inédit : un calculateur d’empreinte carbone pour les campagnes publicitaires, afin de répondre à la demande croissante des marques soucieuses de leur impact environnemental.

Si les Québécois·es naviguent entre la télé linéaire et la diffusion en continu (streaming), ce n’est pas par défaut, mais bien par choix. « Pour un certain temps encore, il va y avoir un bon mélange des deux. On ne veut pas manquer les productions de Netflix ou Crave, mais on tient aussi à nos rendez-vous quotidiens et à nos vedettes d’ici », résume Isabelle. La télévision québécoise réussit encore à rassembler, à surprendre et à vibrer au rythme de la culture locale. Cette rentrée témoigne une fois de plus que le petit écran est encore bien grand dans le cœur des Québécois·es.