Comme des milliers de personnes, j’ai été pris à l’étranger durant le conflit de travail chez Air Canada. Je porte ici à la fois le chapeau de client et de spécialiste en relations publiques.
Ce qui m’a le plus marqué dans cette crise, ce n’est pas seulement l’imprévisibilité ou les délais, mais surtout l’absence totale d’une communication directe, humaine et empathique de la part du président de l’entreprise. Aucune volonté apparente de rassurer les clients bloqués un peu partout dans le monde, qui cherchaient simplement à rentrer chez eux.
Nous sommes en 2025. Les outils de communication sont puissants, instantanés et accessibles. Un simple message vidéo du président, relayé par courriel et sur les réseaux sociaux, aurait permis de faire preuve d’un minimum d’humanisme. Au lieu de cela, nous avons reçu des courriels impersonnels, vagues, rédigés dans un ton administratif déconnecté. Cela ressemblait plus à une directive pour réfugiés politiques qu’à une aide concrète à des citoyens vacanciers pris à l’étranger.
On nous a conseillé d’attendre jusqu’à quatre heures au téléphone pour parler à un·e employé·e déjà débordé·e par des centaines d’appels. Et surtout, on nous a expressément demandé de ne pas nous présenter aux comptoirs d’Air Canada dans les aéroports. Dans notre jargon, cela s’apparente à une tentative de gestion de crise qui évite la réalité : celle d’avoir à faire face à des êtres humains inquiets, épuisés et frustrés.
Ma conjointe et moi avons choisi d’ignorer cette directive. Nous nous sommes présenté·es au comptoir d’Air Canada à l’aéroport de San Diego. Et là, nous avons été accueilli·es avec un service à la clientèle irréprochable. Trois employé·es attentionné·es ont pris le temps de replanifier nos vols avec professionnalisme et bienveillance. Grâce à eux, nous avons pu rentrer chez nous. Pour cette démonstration d’humanité : A+ à vous.
Monsieur Rousseau, où étiez-vous ?
Comme le disait un ancien patron et confrère, feu Yves St-Amand : « Ce n’est pas une crisette, mais une crise. » Dans notre profession en relations publiques, ramasser les pots cassés fait partie du travail. Mais, quand c’est toute l’étagère qui s’effondre, il faut que le ou la chef·fe prenne la parole. On attend de la direction qu’elle montre l’exemple. Qu’elle s’excuse. Qu’elle explique.
Je salue sincèrement les professionnel·les au service des communications d’Air Canada, qui ont affronté les médias en pleine tempête (et à juste titre). Mais, monsieur Rousseau, encore une fois : où étiez-vous ?
Votre absence contraste fortement avec celle d’André Caillé, alors PDG d’Hydro-Québec, durant la crise du verglas en 1998. On se souvient tous de son col roulé. Un simple vêtement, certes, mais un geste symbolique puissant. Il était là. Présent. Solidaire. Ce col roulé a transmis un message non verbal d’unité : « Je suis avec vous, quoi qu’il arrive. » Les retombées positives sur l’image d’Hydro-Québec ont été immenses et durables. Monsieur Rousseau, où est votre col roulé à vous ou vos bermudas sales ? Mais surtout : votre présence.
Certains diront que la crise est terminée, maintenant que les agents de bord sont de retour au travail. Mais détrompez-vous : la véritable épreuve commence maintenant. La phase de reconstruction de la crédibilité est essentielle, et Air Canada devra faire bien plus que rembourser les dépenses engagées.
À titre d’exemple, une réelle campagne de responsabilité sociale devrait être mise en place. Pas pour l’image. Pour la confiance.
Je demeure convaincu, comme beaucoup d’autres voyageur·euses, qu’il est possible de tourner la page à condition d’y mettre les efforts nécessaires. Je souhaite sincèrement que les employé·es, la direction et les actionnaires retrouvent fierté et honneur dans cette entreprise emblématique.
Il y a beaucoup de travail à faire. Je vous souhaite la meilleure des chances.