La série “Créative” entre dans sa phase de reconstruction.

La semaine dernière, Brand quittait l’agence. L’espace était enfin là pour penser autrement.

Cette semaine, Sophie propose une nouvelle approche au développement d’affaires. Marc ne tient plus le volant. Il regarde ses équipes tracer le nouveau chemin.

La perte de Brand avait laissé un vide.
Un silence. Un espace. Un vertige.

Marc croyait qu’un poids tomberait.
Mais dans les jours qui suivent, il sent une inertie étrange.

Plus personne ne court.
Mais plus personne n’avance vraiment non plus.

Alors, il convoque le comité exécutif.

— On a perdu 25 % de notre revenu. On doit le récupérer. Rapidement. Mais pas à n’importe quel prix.

Marc regarde chaque personne autour de la table.

— On reconstruit, oui. Mais on ne recommence pas à s’épuiser. Alors : qui cible-t-on ? Comment ? Et pourquoi ?

Silence.

Antoine parle de marques ambitieuses.
Luc veut éviter les pièges d’un nouveau « Brand ».
Personne ne veut refaire les mêmes erreurs.
Mais personne ne semble prêt à proposer autre chose.

C’est alors que Sophie lève les yeux.

— J’peux me lancer ?

Marc hoche la tête.

— Et si on arrêtait de chasser les clients… et qu’on commençait à leur montrer qui on est ? Pas avec un pitch. Avec une prise de position. Une raison distincte de nous choisir. Se rendre le plus accessible possible. Marketing 101.

Elle parle avec calme, sans chercher l’impact. Juste la clarté.

— Des contenus, des rencontres, des conversations. Pas pour vendre. Pour connecter. Pour montrer comment on pense, pas juste ce qu’on livre. Leur dire pourquoi nous on les choisirait. Et surtout, en incluant les bonnes personnes dès le départ. Pas juste le service-conseil.

Marc écoute. Elle continue :

— On a passé des années à répondre aux appels d’offres. Et si on initiait, maintenant ?

Il pose son stylo.

— Intéressant. Qu’est-ce que vous en pensez?

Luc croise les bras.

— Encore un autre truc pour remplir le calendrier. Mais j’haïs pas ça.

Tout le monde sourit.

— Si on nous invite dès le départ, peut-être qu’on peut nourrir les idées avant qu’elles soient trop figées. Peut-être qu’on peut montrer aux clients qu’on est pas juste des exécutants. Qu’on pense. Fort. Différemment. Et si on transformait nos conversations internes en matière première ? Pas des insights client. Des insights humains. Créatifs. Culturels.

Sophie hoche la tête.

— Oui. Des conversations exploratoires. Qui existent avant le brief.

— On pourrait même choisir des marques ou des causes qu’on admire, ajoute Anaïs timidement, pis brainstormer des idées… juste pour le plaisir. Pis en tirer du contenu. Des morceaux de nous.

— Exactement. Une sorte de labo d’agence. Chaque mois, quelqu’un propose une marque, une industrie, une cause. On pense ensemble, sans pression. Sans client. Juste pour se reconnecter à pourquoi on fait ce métier-là.

— Pis on pourra enfin arrêter de dire que la création commence à la page 6 d’un brief Google Docs.

Marc comprend enfin ce qui arrive.
Il n’a rien dirigé.
Il a tenu le cadre.
Et c’est là que la culture a recommencé à se construire — doucement, collectivement.

Pas dans les initiatives.

Dans les élans.
Suffisait de laisser la place.

Il écrit dans son carnet :
Et si le plus grand chantier n’était pas visible, mais vivant ?
Peut-on regagner notre pertinence sans perdre notre équilibre ?