Chaque semaine, la série fictive « Créative » explore la tension entre transformation culturelle et réalités d’agence.

Après avoir écouté Anaïs, Marc commençait à ressentir ce qu’il fallait changer — en lui, autour de lui.

Mais cette semaine, c’est la réalité qui décide pour lui : l’agence perd son plus gros client. Et cette perte, loin d’être un effondrement, devient une ouverture inattendue.

C’est Sophie qui entre dans le bureau, cette fois.
Elle ne cogne pas. Elle a le visage fermé.

— Il faut qu’on parle.

Marc referme son ordi. Il voit tout de suite que ce n’est pas une mauvaise journée ordinaire.

— C’est Brand. Ils se retirent. Projet annulé. Fin du contrat. Pas de renégociation. Ils partent en appel d’offres. On peut soumettre si on veut.

Silence.

Brand.
Le client historique.
25 % du revenu annuel.
Un brief toutes les trois semaines. Une pression constante. Une équipe en roulement constant. Des révisions infinies.
Une culture modelée à leur image.

Marc respire.

— Ils ont dit pourquoi ?

— Ils ont dit qu’ils avaient besoin d’une « équipe plus alignée avec leur rythme d’affaires ». Traduction : ils veulent une agence qui ne dit pas non.

Marc regarde par la fenêtre. Il ne dit rien tout de suite.

Sophie s’assoit. Elle sait ce que ça signifie.

— On peut survivre sans eux. Mais pas sans adaptation. On va devoir réajuster. Et en même temps… j’dois avouer que j’suis soulagée.

Marc la regarde, surpris.

— Ils nous épuisaient. On s’était adaptés à eux au point de se perdre. Je sais que c’est un coup dur. Mais c’est peut-être la fissure qu’il nous fallait.

Dans les jours qui suivent, les réactions sont mixtes.

Certains paniquent.
D’autres murmurent : « Enfin. »

Luc, en passant devant Marc, dit simplement :

— C’est la première fois que je me dis que j’vais peut-être pouvoir retravailler sur des vraies idées.

Anaïs, dans le studio, chuchote à Élodie :

— C’était eux, le client des 1001 trophées dans l’entrée, non ?

Élodie répond :

— Oui. Pis aussi des cernes à tout le monde.

C’est un deuil. Oui.
Mais aussi une opportunité rare : celle de remettre à plat une dynamique invisible.

Il se rend compte que cette perte n’est pas une conséquence de son virage.
C’est peut-être le premier vrai test de sa vision.

Le carnet de Marc accueille sa réflexion.

Et si la vraie rupture était économique avant d’être culturelle ?
Suis-je prêt à bâtir un modèle qui respecte autant ses gens que ses marges ?