Affaires de l'industrie

G3 Média: naissance d’une entreprise menée par un passionné du terrain

par Geneviève Morin 24 juillet 2025

header-image

Un PDG qui saute à pieds joints dans un appel d’offre sans un sou, une alliance improbable entre un investisseur et un passionné d’affichage, une entreprise montée en pleine course contre la montre, et un rêve qui se concrétise… Ce qu’on vous dit là ne s’invente pas : on parle bien de G3 Média, qui est née à la croisée de l’audace et de la détermination. Son fondateur, Sébastien McQuade, n’est pas étranger au monde de l’affichage et encore moins au goût des défis. Car pour parler de défis, ça, il en a devant lui : c’est à la tête de sa propre boîte (et ses 665 panneaux acquis d’un coup), qu’il entend faire sa marque parmi les grands joueurs de l’affichage au Canada.

Sébastien McQuade

De pigiste à PDG : un parcours forgé dans les coulisses de l’affichage
Avant de devenir le PDG derrière la montée fulgurante de G3 Média, Sébastien McQuade a suivi un parcours professionnel qui ne devait rien au hasard… mais beaucoup à la curiosité. Formé en communication stratégique, il commence sa carrière comme pigiste dans le milieu gouvernemental, multipliant les mandats auprès de divers client·es. Rapidement, il découvre un attrait pour les grands projets structurants. Mais c’est chez une entreprise torontoise spécialisée en affichage qu’il trouve véritablement sa voie.

« C’est vraiment là-bas que j’ai eu la piqûre pour l’affichage », confie-t-il. Son mandat : développer des sites à travers le Québec et les Maritimes. En deux ans et demi, il contribue à l’ouverture de 13 nouveaux emplacements. Un territoire vaste, une industrie complexe et un terrain de jeu qu’il adopte sans réserve. « J’avais déjà acheté de l’affichage au cours de ma carrière, et je ne connaissais pas bien l’envers du décor. Cette expérience a été un véritable déclencheur. »

Lorsque l’entreprise pour laquelle il travaille est acquise par Bell Média sous le couvert d’Astral, McQuade choisit de ne pas suivre le mouvement. Une décision qui en dit long sur sa volonté d’indépendance. Il bifurque plutôt vers Outfront (aujourd’hui Outedge), où il prend la tête des relations gouvernementales au Québec. Là encore, c’est le terrain qui le stimule : rencontrer les villes, négocier des ententes, comprendre les cadres réglementaires entourant l’installation de panneaux. « L’immobilier, dans l’affichage, c’est un monde en soi. Trouver un bon site, négocier des permissions… chaque projet est un défi et c’est vraiment dans ce carré de sable que je trouve mon fun. »

La pandémie viendra bousculer ses repères. S’ensuit une période de réflexion, qu’il appelle lui-même sa « déambulation professionnelle ». Ce moment d’arrêt devient un tremplin. Il redéploie son réseau, s’implique dans un premier projet entrepreneurial — POTTO Affichage — où il développe deux structures numériques. Un pas important, mais pas encore à son image.

C’est en juin 2024 que tout bascule. Bell Média lance un appel d’offres massif pour se départir de plusieurs centaines de panneaux, sous la supervision du Bureau de la concurrence du Canada. Un projet colossal, qui vise à rééquilibrer le marché dominé par les deux géants, Bell/Astral et Pattison. McQuade sent l’appel du vide, et, sans surprise, décide de plonger. « Je suis parti avec un rêve, littéralement. Le 2 juin, j’avais pas un sou en poche, mais j’avais une idée claire : ces panneaux-là, j’allais mettre la main dessus. »

Le rêve, il va le concrétiser en quelques mois. La suite ? Une course contre la montre que seule une passion sincère pour l’industrie pouvait rendre possible.

Le rêve d’une entreprise à son image : la genèse de G3 Média
« C’était une belle opportunité, mais au départ, je n’avais ni partenaire, ni structure, ni financement. Juste une conviction », raconte-t-il. Car l’occasion de mettre la main sur plus de 600 panneaux de Bell Média était aussi rare que ambitieuse. Dès les premiers jours de juin 2024, il active son réseau, cogne à des portes, enchaîne les appels. Plusieurs investisseurs potentiels se désistent à la dernière minute. Le temps file, et la pression monte. Jusqu’à ce qu’un contact clé change la donne : son avocat lui parle de Luc Poirier, un investisseur aguerri qui serait « game d’embarquer dans ce genre de projets-là ». Le reste se déroule à une vitesse fulgurante.

Trente minutes plus tard, McQuade est en contact avec l’investisseur connu pour son flair et son audace. En moins de 24 heures, le feu vert est donné. « Y’a juste les fous qui n’essaient pas », commente-t-il en riant. La machine se met alors en marche. En quelques jours, les documents sont rédigés, les chiffres analysés. Le duo McQuade-Poirier franchit la première étape du processus d’appel d’offres. Puis la deuxième, plus technique : la vérification diligente (due diligence). « On s’est rendu compte que c’était vraiment un bon deal. Alors on a foncé. »

L’offre est acceptée. Mais le plus difficile reste à venir : convaincre le Bureau de la concurrence que ce duo improbable, constitué d’un entrepreneur sans inventaire et d’un investisseur audacieux, peut mener à bien l’intégration de centaines de panneaux et bâtir une entreprise capable de rivaliser avec les poids lourds du marché. « On construisait littéralement l’avion en vol. Pendant qu’on montait l’équipe, on courait aussi les banques, les investisseurs, et on répondant aux demandes constantes du Bureau de la concurrence… Il y avait des documents par-dessus des documents. Ça ne finissait plus. »

Ce long marathon s’est étiré jusqu’en février 2025, moment où le Bureau de la concurrence a enfin admis la transaction et, par le fait même, la capacité à G3 Média à mener le bateau à bon port.

665 panneaux, une équipe senior et des espadrilles de vitesse
Avec l’approbation officielle en poche, G3 Média passe en quelques semaines de projet sur papier à entreprise pleinement opérationnelle. Et pas à petite échelle : 665 panneaux à intégrer dans les marchés du Grand Montréal, du Grand Toronto, de Québec, de Sherbrooke et de Trois-Rivières. Une acquisition d’envergure qui propulse instantanément G3 au rang de troisième joueur en importance dans l’affichage extérieur au Canada. Mais comment absorber un aussi grand volume aussi rapidement ? La réponse de Sébastien McQuade est simple : s’entourer des meilleur·es. « J’aime ça m’entourer de gens plus intelligents que moi. C’est ma philosophie. » Il recrute rapidement des ancien·nes de Bell, des représentant·es chevronné·es, un VP aux ventes, une équipe d’opérations pilotée par un vétéran cumulant 30 ans d’expérience, sans oublier le marketing, chargé de bâtir une image de marque forte. L’idée est claire : aller vite, mais avec des bases solides.

L’entreprise se structure donc à un rythme effréné. « Une transaction de cette taille-là, normalement, ça prend plusieurs mois à intégrer. Nous, on a fait ça en quelques semaines. » Résultat : un sprint collectif où tout le monde met l’épaule à la roue pour que les opérations roulent et que les client·es sentent qu’un vent de fraîcheur souffle sur le marché.

Le pari est risqué, mais les résultats sont là. G3 Média commence déjà à gagner la confiance de deux types de clientèles : les agences média, bien sûr, mais aussi les propriétaires de panneaux, qui voient en l’entreprise un allié agile, prêt à collaborer. « On court un marathon à fond la caisse depuis juin. Mais j’adore ça. J’aime le monde de l’affichage, et j’aime la business derrière. Déjà, nos chiffres démontrent bien que nos efforts portent fruits. »

Au cœur du projet, McQuade insuffle aussi ses valeurs humaines. Il insiste sur la loyauté, mise sur un modèle hybride, des conditions compétitives, et développe déjà un plan d’intéressement qui permettra aux employé·es de devenir actionnaires. Un geste fort, qui reflète sa volonté de bâtir une entreprise durable, en lien étroit avec son équipe.

Un troisième joueur… qui veut laisser sa marque
Devenir le troisième joueur en importance dans l’affichage extérieur, c’est déjà une réussite. Mais pour Sébastien McQuade, l’enjeu est ailleurs. Il ne s’agit pas de rivaliser avec les géants Bell et Pattison sur leur propre terrain, mais de proposer autre chose. Une approche plus humaine, plus créative, et résolument plus ancrée. « Je crois que les gens étaient contents d’avoir un troisième choix. J’ose penser qu’on amène une façon différente de travailler, plus participative. »

Avec l’appui de Vendo Media pour la représentation nationale, G3 Média mise sur l’écoute, l’agilité et un service client renouvelé. Plutôt que de simplement vendre des espaces, l’entreprise veut collaborer à la stratégie, construire des campagnes réfléchies, et pourquoi pas, narratives. « Il y a moyen de raconter des histoires d’un quartier à l’autre, selon la géographie des panneaux, d’être vraiment originaux quant à la création d’affichage », suggère McQuade.

Et puis, il y a cette ambition régionale, chère à McQuade : sortir des grands centres, développer Baie-Comeau, Rivière-du-Loup, l’Abitibi. Faire rayonner l’affichage au-delà du 514 ou du 418. « J’aime le Québec. Je veux que notre empreinte reflète ça. »

Une vision qui prend racine ici
Si G3 Média avance à vitesse grand V, c’est pour mieux s’ancrer dans la durée. Pour Sébastien McQuade, l’enjeu n’est pas de grossir à tout prix, mais de bâtir une entreprise solide, à l’image du talent d’ici. Il s’inquiète d’ailleurs de la tendance à délocaliser les productions, et déplore que tant de décisions se prennent à Toronto alors que le Québec regorge de talents incroyables. « On devrait leur faire plus de place », insiste-t-il.

G3 veut offrir cette place. En cultivant la loyauté, en misant sur l’expertise locale et en investissant dans une culture d’entreprise saine, McQuade espère redéfinir ce que peut être un acteur de l’affichage au Québec. Et si la route a été cahoteuse jusqu’ici, le résultat, lui, est porteur : « Ce projet, c’est beau, c’est nouveau, et on est là pour rester. »

Dernières nouvelles