Ne nous cachons rien: ce qui comptait aux yeux des consommateur·rices il y a 5 ans a probablement changé aujourd’hui et c’est la même chose pour tout ce qui concerne sa manière de s’informer. Et l’ère numérique et le flux d’informations qui s’y déverse à une vitesse vertigineuse y sont pour quelque chose. Les façons de communiquer se sont elles aussi multipliées, diffusant l’information sur diverses plateformes. Sachant que la présence en ligne des marques, organisations et entreprises revêt aujourd’hui une importance capitale pour leur rayonnement et leur notoriété, nous sommes en droit de nous demander: est-ce que les RP, ça se passe sur le web, maintenant? En effet, qu’en est-il de la télé, de la radio ou de l’imprimé? Ces médias qui régnaient autrefois en maître dans l’espace médiatique sont-ils encore pertinents pour les RP à l’ère actuelle? C’est ce à quoi nous tentons de répondre.

Les médias traditionnels toujours populaire auprès de certains publics
Ce que nous indique d’emblée Isabelle Verreault, vice-présidente principale et directrice générale du Québec pour Hill & Knowlton, c’est que la façon dont nous nous informons a subi une transformation radicale au fil des années et que les sources d’information sont devenues plus diversifiées, créant ainsi la chance à chacun et à chacune d’avoir ses préférences. Mais cela ne veut pas dire que les médias traditionnels n’ont plus leur place. «Je pense qu’on ne peut pas ignorer le fait que la télévision, la radio et les journaux demeurent des plateformes importantes dans l’écosystème médiatique, mais il faut avouer que leur rôle a évolué et que leur audience s’est divisée. La télé, autrefois associée à des rendez-vous incontournables, telles que les nouvelles du soir, fait désormais partie d’un ensemble de canaux de communication, tous très compétitifs. Cependant, malgré le recul des médias traditionnels et leur consolidation sur le marché, ceux-ci continuent d’être les premières sources d’information pour certains segments de la population, mais pas tous, j’en suis consciente.» Plus encore, Isabelle Verreault fait remarquer la circulation d’informations entre les médias traditionnels et numériques qui forme désormais une réalité incontournable pour les professionnel·les en relation de presse. «En effet, la télévision, la radio et l’imprimé, en tant que formats prédécesseurs à la vidéo, aux podcasts et aux blogues, restent des piliers sur lesquels s’inspirent une grande partie du contenu numérique actuel. Cette proximité des formats permet d’adapter le contenu d’une plateforme à l’autre, facilitant ainsi la circulation des messages.»

isabelleIsabelle Verreault, vice-présidente principale et directrice générale du Québec pour Hill & Knowlton

Les médias traditionnels alimentent le numérique et vice versa
Pourrions-nous aller jusqu’à dire que les médias traditionnels alimentent par moments les médias sociaux et vice versa ? «Oui, répond la vice-présidente principale et directrice générale chez Hill & Knowlton. La circulation entre ces différentes plateformes est devenue une réalité incontournable dans notre paysage médiatique. Prenons par exemple la soirée de cérémonie des Oscars, qui s’est déroulée en direct à la télévision, et qui, pourtant, a alimenté les réseaux sociaux pendant plusieurs jours. C’est la même chose pour le Superbowl: ces événements télévisuels restent hyper importants dans l’espace médiatique et attirent leur lot d’attention et de discussions sur les plateformes numériques. Ce serait, à mon avis, une erreur de croire en la fin des médias traditionnels pour cette raison, entre autres.» Clairement, les médias traditionnels s’inspirent eux aussi du numérique: nombre de journalistes gardent un œil sur ce qui se passe sur les médias sociaux pour alimenter leur couverture de l’actualité dans les médias traditionnels. Et c’est plus vrai que jamais, si on se fie au Rapport mondial sur l’état des médias 2023 de Cision, qui observe que «lorsqu’on leur demande comment ils·elles utilisent les médias sociaux dans le cadre de leur travail, 44% des journalistes déclarent s’en servir pour repérer les sujets d’actualité, et plus de la moitié (52%) pour surveiller des éléments tels que les nouvelles, les mots-clés et les médias concurrents. Ainsi, les professionnel·les de la communication doivent aussi considérer les médias sociaux comme un moyen d’entrer en contact avec les journalistes alors que cette plateforme leur permet de recueillir des données et des informations précieuses pour leurs articles.»

La valeur symbolique des médias traditionnels ne dément pas
En dehors de cette circulation organique d’information entre les médias traditionnels et numériques, les relations de presse ne doivent pas ignorer que pour certains publics, une présence à la télévision, à la radio ou dans le journal confère encore un grand prestige, nous rappelle Isabelle Verreault. «C’est un symbole de reconnaissance, tant pour les organisations que pour les personnalités. Ce qu’on remarque, c’est qu’être couvert par les médias traditionnels, que ce soit à la télévision, à la radio ou dans la presse écrite, est toujours recherché, car cela apporte une crédibilité et un prestige particuliers. Ce qu’on appelle le «earned media» est très prisé par les client·es, et les attentes à cet égard restent élevées encore aujourd’hui.» Mais alors, si les journalistes se tournent beaucoup vers les médias sociaux pour apporter du contenu, et que la télévision attire encore l’attention sur les médias sociaux, et que la clientèle recherche la notoriété de la couverture des médias traditionnels… Est-ce que ça veut dire qu’on doit tout prendre en compte? «Force est d’admettre que.. oui. Une chose est vraie: il est essentiel d’utiliser tous les leviers qui sont à disposition quand on déploie une stratégie de communication. Il faut évaluer les options et surtout être à l’écoute de sa clientèle, qui est ouverte aux options. Car, elle a souvent un appétit pour l’innovation et donc, le numérique, mais demeure très intéressée par le prestige et la crédibilité des médias traditionnels.» Sachant que tout doit être pris en compte et que le bruit ambiant est plus fort que jamais, comment peut-on espérer communiquer clairement ses messages?

Communiquer, une notion plus importante que jamais
La communication, c’est l’action de communiquer, de transmettre, d’informer, mais pas que, nous indique Isabelle Verreault. «La communication, c’est aussi l’établissement d’une connexion avec une autre personne. Avec la multiplication des canaux de communication, la grande question aujourd’hui est comment s’assurer que les gens vont comprendre notre message. C’est pourquoi, selon nous, la communication est plus importante et plus stratégique que jamais.» Car on ne communique plus de manière unidirectionnelle comme on le faisait autrefois durant «l’âge d’or des médias traditionnels». Dans le numérique, tout change et très rapidement: la popularité des canaux varie d’une cible à l’autre; les médias sociaux aussi s’alternent l’achalandage; et l’information se vaporise pour ainsi dire à travers le web. Soulignant l’évolution des possibilités de communication dans une société aux opinions qui, elles aussi, se polarisent, la vice-présidente principale observe une bataille pour l’attention plus féroce que jamais, d’où l’importance de comprendre et d’analyser le paysage actuel, de bien cerner les publics, de comprendre où et comment ils s’informent, avant d’entreprendre des stratégies de relation de presse. «Le défi actuel, à mes yeux, c’est de trouver des stratégies de communication qui font leur chemin à travers un océan de bruits médiatiques et d’opinions. Alors qu’on communique pour être bien entendu et compris, le défi est grand devant la marée de bruits. Ainsi, la clé pour être entendu et compris, repose beaucoup sur le leadership dans la communication. Parler de leadership revient à parler de prise en charge de son narratif: c’est choisir de ne pas laisser les autres nous définir. Une posture également importante dans une perspective de gestion de la réputation.»

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