Le Super Bowl LVIII a captivé des millions de téléspectateur·trices à travers le monde. On estime que plus de 100 millions de personnes ont regardé la victoire en prolongation des Chiefs de Kansas City contre les 49ers de San Francisco. Parfois plus attendues chez certain·es que la partie elle-même sont les publicités qui interrompent les périodes de jeu. Cette année, mis à part le spectacle de la mi-temps d'Usher, les publicités constituent la partie la plus divertissante de la diffusion.

En 2024, le coût moyen d'une publicité de 30 secondes pendant le match était de 7 millions de dollars américains, soit le même qu'en 2023 et en hausse par rapport aux 5,6 millions de dollars de 2021. L'inflation est réelle puisque le prix était de 4,25 millions de dollars en 2015. Malgré le prix, la plus grande journée publicitaire a ramené des habitués comme Doritos, Taco Bell, Amazon, Tide, Skechers, Turbo Tax, Coors Light et Verizon. Il y a eu plus de 30 nouveaux annonceurs cette année par rapport à l'année dernière.

On a demandé à des publicitaires d’ici de nous dévoiler leurs coups de cœur publicitaires de la grande soirée, voici ce qu'il·elles ont à partager: 

«De ce que j’ai pu voir, ce n’est pas une grande cuvée. C’est une année plutôt consensuelle et sans réelle prise de risque. Le message avec les bébés qui jouent au pickleball fera sûrement sourire, mais ça me rappelait beaucoup la pub d’Evian d’il y a quelques années. Je doute du brand recall... MTN Dew a bien joué la carte de l’humour avec son "Having a blast". C’est bien exécuté. Mais le jeu du match revient pour moi à Booking.com et Tina Fey qui s’engage des doublures pour vivre sa meilleure life. Belle prouesse de casting. Un message clair, simple et divertissant.» - Sébastien Rivest, directeur de création exécutif, Bleublancrouge

«Bien souvent, les publicités du Super Bowl éblouissent davantage par les vedettes qu'elles présentent que par leurs concepts ou les produits qu'elles annoncent. La publicité de la NFL est sortie du lot hier soir, car le lien avec les stars (les joueurs de foot) et le produit que l’on veut me vendre est parfaitement naturel. L’intégration des vedettes est authentique, tout en étant drôle et absurde. C’est donc plus facile d’adhérer au message.» - Frédéric Tremblay, directeur de création chez LG2

«Gros coup de cœur pour la pub "Old School Delivery" de Budweiser. Ils ont mis le paquet: les magnifiques chevaux, la tempête de neige, la bande sonore nostalgie – du gros bonbon all-american! Sinon, excellente initiative promo pour DoorDash qui offre de "Doordash" des prix annoncés par les annonceurs du Super Bowl. Brownie points pour la VO de Laurence Fishburne.» - Éliane Vinet, conceptrice-rédactrice, création chez Bleublancrouge

Etsy
«Très simple et très clair, ce qui devait être un enjeu important pour Etsy puisqu’ils n’ont pas la même notoriété que Toyota ou Budweiser, mettons. Décalé, mémorable ("Oh la la") et parfaitement crafté (autant l’écriture que la réalisation). En plus, Orchard a accompli tout ça en seulement 30 secondes.» - Charles Côté, concepteur-rédacteur chez Rethink

Google
«Ouf. Une pub super touchante, dans laquelle le craft est au service de l’idée et de la démonstration. Je remarque aussi que de plus en plus d’agences choisissent des réalisateurs qui vont servir à faire parler de l’idée au-delà du message lui-même. Dans ce cas-ci, ils ont tourné la pub avec un réalisateur non-voyant, ce qui en faisait le candidat tout indiqué non seulement pour le tournage, mais aussi pour que même le making of de la pub devienne attrayant d’un point de vue RP.» - Charles Côté, concepteur-rédacteur chez Rethink

«Miser sur le pointage final du Super Bowl, c’est pas facile. Miser sur le fait que 80% des pubs allaient mettre en scène une ou douze célébrités, ça, c’est assez facile. Cela dit, il y a certains annonceurs qui n’ont pas pris cette route, et c’était rafraichissant. Pour vrai, ce n’est pas obligatoire d’avoir Pete Davidson pour rendre un 30 secondes drôle. La preuve: un de mes gros coups de cœur de l’année, Reese's Caramel. Très bébé, mais super efficace. Tout tourne autour du produit et on va chercher des gros gags. En plus, on a du plaisir à le revoir grâce aux petits détails de chaque personnage. Comme Etsy - Gift Mode. La prémisse est écoeurante: "Qu’est-ce que les Américains ont offert aux Français après avoir reçu la Statue De La Liberté." Très cave. J’ai adoré ça. Ensuite, j’ai bien aimé Javier in Frame de Google Pixel, belle démo de la technologie avec une twist assez mignonne.» - Alexis Caron-Côté, Directeur de création adjoint chez Sid Lee

Reese’s
«Y’a des moments — comme au Super Bowl — où la pure stupidité est payante. Erich & Kallman n’a pas réinventé la roue avec Reese’s, mais c’est la pub qui m’a fait le plus rire cette année. Points bonus pour ma ligne de fin préférée de la soirée : YESSSSS!!!!» - Charles Côté, concepteur-rédacteur chez Rethink

«Je ne suis pas un fan des pubs qui misent sur la présence d’une vedette, qui trop souvent, le font au détriment du concept ou de l’idée. «Meh, encore un caméo qui coûte trop cher. Next!». Je suis un nostalgique qui recherche le même feeling que m’avait laissé le fameux Wazaaaa de Budweiser quand j’étais petit et que je regardais le match avec mon père (et oui, une pub de bière qui marque un enfant: M’ERICA!). C’est cette même formule qui m’a charmé avec Reese's, un spot étonnamment axé à 100% sur le produit. Humour décalé, simplicité du message, rythme parfait… du divertissement à l’état pur, s’harmonisant très bien avec l’intensité d’un match de football. Ça, c’est ma définition d’une pub de Super Bowl.» - François-Julien Rainville, directeur de création adjoint chez Cossette

«OK, ce n’est pas la première fois qu’on parodie les publicités trop dramatiques de parfum. Et ce n’est probablement pas un de ces messages qu’on réécoutera pendant des années. N’empêche que la publicité de CeraVe, avec Michael Cera en (faux) fondateur visionnaire de l’entreprise, était à la fois futée, amusante et inattendue pour une marque qui, à priori, n’exhale pas l’humour. Mais surtout, j’ai les mains particulièrement sèches présentement. Et quand j’irai à la pharmacie tantôt, c’est déjà décidé que j’essaierai... CeraVe. Ce qui m’a rappelé que la pub, par-delà son caractère divertissant, vise à cogner à la porte de nos besoins (d’hydratation) et à faire grimper la désirabilité de produits fantastiques comme CeraVe. Alors, bien joué, je suis un nouveau client! Mais espérons que la crème tiendra ses promesses, car mes pauvres mains craquelées ne se contenteront pas d’une vidéo réussie.» - Guillaume Denault, concepteur-rédacteur chez Cartier

«Cette année, CeraVe brise les codes établis avec son tout nouveau porte-parole. En voilà une marque de crème hydratante qui ose avec un grand nom et une publicité qui marque les esprits. Quel coup de génie que d'établir une association entre une marque et une célébrité en exploitant les homonymes CeraVe et Michael CERA. On l’avait déjà vu par le passé avec les boissons Bubly et le chanteur Michael Bublé, et j'avais adoré. Honnêtement, ça fonctionne! De plus, c’est un concept tangible qui pourra être exploité sur plusieurs années! À mon avis, l'humour est toujours gagnant en publicité. CeraVe conserve le ton pince-sans-rire naturel de l'artiste, ce qui donne un résultat complètement ludique et absurde. Je crois vraiment que ça se distingue de ce que l'on voit habituellement dans les publicités de cosmétiques. En général, elles optent pour quelque chose de plutôt conservateur, misant sur les clichés de la "beauté" et du "bien-être". Avec CeraVe, le message est simple: elle hydrate et elle le fait bien. Pas de fioritures, juste du plaisir pour les yeux et les oreilles, avec en prime un dauphin cornu. Vous vous souviendrez de cette marque et de cette publicité, j'en mets ma main au feu!»
- Justin Béchard, directeur artistique, Absolu

Jif
«J’ai ri dès que le premier super est apparu. La stratégie est excellente (même si on peut remettre en question à quel point du beurre de peanut sur des céleris c’est bon…) et l’exécution est juste assez niaiseuse à mon goût.» - Charles Côté, concepteur-rédacteur chez Rethink

«Bon, je dois admettre que je suis sans doute (complètement) biaisée dans mon choix. En tant que fan de Beyoncé, mon coeur penche évidemment du côté de la publicité de Verizon, qui a eu la brillante idée de prouver l’infaillibilité de son réseau Internet en le mesurant au pouvoir d’influence tout aussi infaillible de la chanteuse, reine incontestée des annonces inattendues qui "brisent l’Internet". Non seulement le concept était drôle et divertissant, mais il mettait véritablement Verizon à l’épreuve puisqu’il culminait sur une annonce que les membres de la beyhive attendaient impatiemment - l’arrivée de nouvelles chansons de Beyoncé. De quoi chambouler le World Wide Web et les gens qui, comme moi, ne sont a priori pas de grands adeptes de musique country.» - Amélie Martin, stratège chez Cartier

«Pour moi, les publicités du Super Bowl me rappellent toujours pourquoi j’ai choisi ce métier. C’est rassurant de voir que l’on fait encore de la publicité divertissante qui fait jaser. C'est un moment où les annonceurs déploient les grands moyens pour faire rire, impressionner ou juste provoquer une petite controverse. Pour analyser les pubs du Super Bowl, il faut faire abstraction des vedettes et des gros budgets et déterminer quels messages étaient les plus brillants et pertinents pour leur marque. De mon côté, j'ai particulièrement apprécié le fait qu'une chose puisse devenir réelle avec la publicité de Squarespace: "A website makes it real". J’ai aussi apprécié le contraste entre les moments agaçants du quotidien et la signature "Having a blast" de Mountain Dew. La proposition de United et son "But just in case... No fees to change your flight" m’a aussi plu. Casser la prémisse de dévotion irrationnelle à son équipe était juste et efficace. Ma sélection est certainement aussi influencée par mon bagage de directrice artistique. Je ne peux m'empêcher de voir les publicités du Super Bowl comme de petits bijoux de craft; les petits détails qui en font de grandes pubs.» - Annik Tremblay-Meunier, directrice de création adjointe chez Cossette