Allons à la rencontre du duo Ashley (Ash) Phillips et Miro LaFlaga, 3 ans après nos premiers échanges. Où en est Six Cinquième maintenant? D’abord agence créative au cœur de Montréal, elle se positionne aujourd’hui comme un cabinet de consultation de marque qui valorise passion, créativité et inclusion.

six aMiro LaFlaga et Ashley (Ash) Phillips / @Bianca Boswell

Un mode de vie
Depuis sa création, Six Cinquième a tracé son parcours à travers le paysage créatif avec une évolution constante; non sans défis et remises en question. Rejetant le «hustling culture», Ash nous dit d’emblée que c’est une réflexion de ce qu’est Six Cinquième, de sa personnalité, et de ses désirs. «On avait initialement le titre d’agence créative, mais récemment, on l’a fait évoluer en cabinet de consultation de marque. Cette décision visait à atténuer la pression associée aux agences créatives, mais aussi à mettre l’emphase sur le “thinking behind what we do”. Oui, on cherche un résultat final au design impressionnant et une esthétique de haute qualité, mais ce n’est pas notre accent», dit-elle. Là où les deux créatif·ves veulent mettre l’accent, ce sont les idées, l’intentionnalité et la créativité derrière, car ce sont elles qui confèrent une valeur authentique à leur travail. «Ash et moi avons eu une révélation, poursuit Miro. On rêvait d’avoir une agence de 1000 personnes (RIRES), mais on a progressivement réalisé que ce n’est pas ce qu’on souhaitait réellement. On veut travailler avec de plus petites équipes. Notre modèle d’affaires se distingue des autres agences, puisqu’il est axé sur le style de vie». Son mentor a par ailleurs qualifié Six Cinquième de «lifestyle business». «On aime bien être en mesure de décider de notre mode de vie et d’organiser notre temps en tant qu’entrepreneurs·euses». Mais aussi, et surtout, de maintenir la passion qui les allume d’un projet à l’autre, sans ressentir de pression.

Engagé
Ne se restreignant pas à l’excellence créative, Ash et Miro s’engagent activement à promouvoir l’inclusivité et la diversité au sein de l’industrie. À travers des ateliers et des collaborations avec des studios locaux black-owned ou impliqués dans la communauté, le cabinet démontre son engagement à favoriser un changement positif. «On s’implique de diverses manières, dit Ash. Dernièrement, on a animé un atelier en collaboration avec Never Was Average, un studio créatif montréalais fondé par Harry Julmice et Joanna Chevalier, ainsi qu’avec Stanley Vaganov (BiCurious Studio). L’objectif était d’éduquer et de partager nos connaissances sur le branding pour outiller les entrepreneur·euses et entreprises BIPOC à optimiser l’utilisation du branding à leur avantage.» Miro ajoute que l’approche de Six Cinquième va au-delà de sa réussite, et souhaite mettre en lumière d’autres acteurs exceptionnels de la scène montréalaise. «On s’efforce de collaborer avec les talents de notre communauté et de partager les opportunités.» Par exemple, invité à participer à une conférence à Copenhague avec TechBBQ l’automne dernier, le duo a mis en contact l’une de ses clientes, Julie Savaria (Masla Empathy Lab), consultante en justice, équité, diversité et inclusion, avec l’organisme. L’alchimie a fonctionné — Julie participera elle aussi à une conférence lors d’une prochaine édition. «It’s not all about us», réaffirme le créatif, soulignant également d’autres agences de Montréal qui réalisent des projets formidables, comme NA & CO. fondée par Nicole Antoine, Cachet Communications, co-fondée par Jessica Frederique, ou encore The Study, fondée par Rama Sow. Mais il s’agit aussi de s’épauler, de se soutenir en tant qu’enterepreneur·euses, partager les mêmes réalités, les mêmes défis. Parce que plonger tête première dans l’aventure entrepreneuriale, ça a évidemment son lot de défis. Six Cinquième a aussi la chance d’avoir de bons partenaires d’autres industries, comme Afro-Entrepreneurs, BMO et Evol, ou encore des agences publicitaires américaines, évoque le duo.

Des idées à impact
L’agence/cabinet livre des projets qui transcendent le simple acte créatif. Ils ne sont pas simplement esthétiques : ils inspirent et racontent des histoires. La façon dont Six Cinquième travaille pour livrer des projets significatifs est «from the bottom up, inside out». Ash explique: «On privilégie la collaboration et la créativité entre les employé·es, le leadership et selon le client, des communautés qui sont impactées. On effectue des recherches approfondies et des “workshops” visant à créer des liens solides entre ces différents groupes. Notre objectif est de bâtir une marque qui représente fidèlement l’ensemble de l’entreprise ou de l’organisation, tant en interne qu’en externe. Notre accent ne se limite pas uniquement sur la perception externe de la marque et à la relation avec le client, mais englobe aussi l’authenticité et la représentativité interne de la marque au sein de l’organisme.»

Des collaborations prestigieuses ici et ailleurs, Six Cinquième en a fait à la pelle. Dans le passé comme dans le futur : Westbrook, compagnie de ciné et multimédia fondée par Will Smith et Jada Pinkett Smith (rien de moins !), le Bureau du design de la Ville de Montréal (Design Montréal) (on devra s’armer d’un peu de patience pour en connaître la nature, mais c’est big), l’OBNL ArtWorks, basé à Cincinnati (le duo revenait tout juste d’un voyage d’affaires pour sceller l’entente lors de l’entrevue). «J’admire profondément son travail, très en ligne avec nos valeurs de soutien à la communauté créative et à la création d’opportunités pour les jeunes talents», mentionne Ash à propos de l’OBNL, dont la mission, le positionnement et le nom seront redéfinis par Six Cinquième. Autre inspirant projet à impact dont le duo a à cœur, a été de donner un second souffle à l’ancien Negro Community Centre (NCC), le Centre pour les Canadien·nes Afro-Descendant·es (CCAD). Ayant accueilli des personnalités comme Nelson Mandela et Oscar Peterson, la prestigieuse bâtisse a cessé ses activités dans les années 90 puis a été démolie en 2014. Triste sort pour un lieu cher à la communauté noire. «Ce lieu historique était sur le point d’être transformé en condominiums, explique Miro. On nous a sollicités pour effectuer un rebranding afin de le présenter à la Ville et ainsi éviter sa transformation. On a effectué le rebranding en mettant en avant l’héritage et la diversité. La Ville a approuvé la proposition, renonçant ainsi à la construction de condos sur le site. On est extrêmement fiers de ce projet axé sur la préservation du patrimoine.» Ce projet s’est d’ailleurs valu un prix de l’Association of Registered Graphic Designers (RGD).

Que réserve le futur?
Quand on pense à l’avenir de Six Cinquième, la vision s’étend au-delà des frontières de Montréal. Les co-fondateur·rices expriment leur désir de travailler sur davantage de projets internationaux, notamment au Japon ou au Niger. «Je suis convaincu de l’importance de tisser des liens significatifs au-delà des frontières canadiennes. Vivant à Montréal, je considère cette ville comme une véritable valeur ajoutée. Nos récents projets ont été influencés par notre identité montréalaise, partage Miro. Dès que nos clients découvrent nos racines montréalaises, ils sont non seulement intrigués, mais ils désirent également cette particularité.» Cela inclut la capacité de s’exprimer en français et en anglais: cette dualité linguistique est une force propre du Québec, que le duo compte pleinement exploiter et mettre en avant. Éventuellement, le cabinet aimerait croître encore un peu, explorer d’autres avenues créatives et pourquoi pas s’aventurer dans le domaine du cinéma, rêvasse Ash. «L’idée d’avoir une équipe interne de petite à moyenne taille serait bénéfique. Présentement, on a beaucoup de partenaires avec qui on travaille souvent. La perspective de transformer ces collaborations en relations plus permanentes est intéressante, mais notre formule actuelle fonctionne bien. Et on apprécie aussi la flexibilité de travailler avec divers talents de la communauté créative de Montréal.»

À travers ses projets, Six Cinquième ne crée pas seulement des marques. Elle sculpte des expériences, donne vie à des visions, et laisse une empreinte durable — entre Montréal et au-delà.

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