Le Grenier aux nouvelles s’est de nouveau entretenu avec Sébastien Fauré, cofondateur du collectif Humanise, et chef de la direction chez Bleublancrouge, pour prendre le pouls des deux dernières semaines, et surtout, savoir comment les gestionnaires, eux, vivent avec cette situation pour le moins surréelle. Entre nos réunions virtuelles respectives, nous avions pu nous joindre au téléphone par un vendredi après-midi ensoleillé. Le beau temps à l’extérieur contrastait avec la gravité du contexte actuel.
Quel a été le plus grand défi du collectif ces jours-ci ?
Sébastien nous dévoile que le premier défi a été de transformer les bureaux physiques en bureaux virtuels, et que le tout s’est « surprenamment bien passé ». Reste que le plus gros challenge était « d’avoir le bon état d’esprit ». « Le plus difficile est de planifier le pire tout en restant positif. Comment réussit-on à transformer, à ralentir, à protéger, à continuer à y croire et à encourager sans avoir de visibilité ? C’est comme courir les yeux bandés en pleine rue, nous confie-t-il. Plus ça va aller, plus l’incertitude sera grande et plus les besoins de prendre les bonnes décisions seront importants ».
Sébastien Fauré, cofondateur du Collectif Humanise et chef de la direction chez Bleublancrouge
Puisque la majorité des gens est foudroyée par l’incertitude, a-t-il l’impression que les gestionnaires doivent montrer qu’ils sont en contrôle, ou, au contraire, manifester leur côté humain, plus que jamais ?
« Ce à quoi le monde s’attend d’un leader, c’est qu’il lead ». Selon le co-fondateur d’Humanise, le leadership dans les moments de crise n’est pas exactement le même. « Ce n’est pas très différent, mais les compétences sont amplifiées. C’est-à-dire qu’il faut redoubler d’honnêteté, redoubler de transparence, redoubler de bienveillance, et ce, tout en restant humble ». Il cite notamment Marc Dutil, du Groupe Canam, dont il voue une admiration. « Dans l’une de ses dernières conférences, il avait dit “qu’à la fin d’une crise, ce qui vous reste, c’est votre réputation”, poursuit Sébastien. Je dirais que le plus difficile dans une position de leader, c’est l’amplification des qualités nécessaires pour mobiliser les gens et leur donner la zone de confiance dont ils ont besoin pour faire leur travail ».
Dans toute industrie confondue, les entreprises font un excellent boulot pour rassurer leurs troupes. Mais qui rassure et appuie les gestionnaires ?
Sébastien affirme qu’il a la chance d’être bien entouré — notamment des 15 partenaires du collectif. « Ce qui me rassure, c’est que les occasions de crises sont des occasions de renaissance, de réinvention : il faut les voir comme des opportunités ». Son énergie ? Il la puise auprès de son épouse, de ses enfants, de ses copains, et bien sûr de ses « partners, qui sont une grande source de confiance et d’encouragement ».
Si le collectif était en mesure de retourner dans le temps, en sachant qu’une crise majeure du genre allait se manifester, quels conseils se donnerait-il ?
« Si on l’avait vu venir, on aurait développé toute une gamme de produits et de communications virtuelles. Encore plus de plateformes digitales, plus de plateformes d’échanges, plus de gamifications appliqués dans le domaine virtuel, plus de capacité de création de contenu rapide et de qualité : ces temps-ci, ce sont ce que nous demandent les clients », explique Sébastien. « Quelqu’un m’a déjà dit que l’innovation se situait dans les zones grises, de croisement entre des professions et des disciplines. Et c’est justement ce qu’on constate présentement. On a toute une évolution de portefeuilles de services qui est en train d’éclore et de faire surface. À mon avis, c’est ce qui va thématiser la renaissance du collectif Humanise ».
Dernière question, et non la moindre, Sébastien figure-t-il que l’implantation du télétravail puisse être maintenue après la crise ?
« Plus les gens sont high-tech, plus ils demandent à être high-touch. Autrement dit, plus tu as de la technologie, plus tes besoins de connexions émotionnelles sont importants. Je ne peux pas te confirmer qu’on va transformer notre organisation pour qu’elle soit 100 % en télétravail. Jaser à la machine à café, avoir une conversation à l’heure du lunch, prendre l’ascenseur avec quelqu’un qu’on n’a pas vu depuis longtemps, ça manque aux gens ». Au moment de se parler, Sébastien et son équipe venaient de faire une vidéoconférence avec près de 200 (!) personnes. « Je voyais chez les gens qu’ils étaient contents de se voir, de savoir que les autres sont encore là. On se surprend à découvrir des choses qu’on ne reconnaissait même pas avant, et qu’on appréciait sans le savoir. Une occasion d’apprécier la base, quoi (RIRES) ». Ceci étant dit, il serait prêt à parier qu’il y aura davantage de meetings en vidéoconférence.
« On voit un élan d’entraide hors norme, note Sébastien. On voit des croisements d’offres de services et l’utilisation des super powers des différents individus. On s’aperçoit que les gens reconnaissent ce que les autres amènent, l’apprécient, et en demandent ». À travers ce processus de découvertes des autres, Sébastien rappelle que le collectif se nomme Humanise. « On se rend compte qu’être au service des humains, ça prend toute sa valeur. Je pense qu’il y a beaucoup d’entreprises qui seront attirées par notre intention au départ, qui sera devenu une spécialité. Malgré toute la douleur, la tristesse, et toute la difficulté qu’on va vivre, il y aura du bon », espère-t-il.
Pour en connaître davantage sur le collectif Humanise, qui chapeaute
Bleublancouge, U92, Glassroom, Youville Haussmann Park, L’Institut Idée, FieldTrip, Alice & Smith et Tulipe, cliquez ici.
Bleublancrouge. Crédit photo : Francois Descoteaux