On ne peut demeurer indifférent à ce qui se passe entre l'industrie du taxi et UberX. Que ce soit au Québec ou ailleurs dans le monde.

D'un côté, il y a une industrie qui vivait d'un monopole officieux qui fait la pluie et le beau temps sur le transport de passagers. De l'autre, un nouveau joueur à la formule très actuelle, basée sur une économie de partage, sur les besoins non exprimés d'une clientèle qui se sentait prise en otage par un statu quo vétuste et sans issue.

Qui de nous n'a pas pris au moins dix fois un taxi dont les amortisseurs étaient inexistants (bonjour le sciatique), les voyants lumineux de Check engine et autres fonctions tous allumés, les sièges enfoncés à ronger ses genoux, les banquettes tachées d’on ne sait trop quoi avec un chauffeur plus souvent intéressé à parler avec ses amis au téléphone que par ses clients. Et je ne parle pas des tenues vestimentaires qui frisent parfois l'indécence tellement elles sont souillées et fripées. Ni des chauffeurs sans monnaie, avec un lecteur de cartes inopérant et à l'habitacle qui émane les odeurs de son lunch étalé sur la banquette de devant.

Mais que voulez-vous, c’était ça ou rien. On faisait avec. Du moins jusqu'à maintenant.

Arrive un nouveau joueur qui a bien examiné ces facteurs et qui s’est dit « Eureka! il y a ici une opportunité d’affaires ».

Nait une compagnie de transport virtuelle, où tout se fait via une app, qui offre la chance aux gens avec une voiture de qualité de mener les clients là où ils le veulent souvent pour moins cher, sans avoir à effectuer de transactions monétaires et en se faisant quelques sous pour arrondir leurs fins de mois. Simple, brillant, dans le mille. Que l'on soit chauffeur ou passager, la formule est jeune, novatrice, sexy et tout à fait en ligne avec le courant de la nouvelle économie qui se veut sociale, de partage et communautaire. Comme en attestent la popularité et la valeur financière de UberX.

Il était donc plus que prévisible que l'industrie du taxi se réveille soudainement et crie à l'injustice, au meurtre, à l'illégalité et à toute autre calomnie possible. Comment osent-ils après tout...

Cibler son message pour mobiliser son auditoire

Ce qui est le plus désolant, c'est de voir la façon dont l'industrie réagit. Au lieu de mettre l'ensemble de ses efforts à étudier la concurrence et de voir comment ils pourraient reprendre leur part de marché de façon novatrice, on les voit pleurer aux instances gouvernementales, manifester en bloquant telle ou telle artère ou point névralgique pour gagner de la sympathie du public.

Un public qui à la base ne les aime pas, qui a maintenant la chance de se venger pour les affronts subis au fil des années dans leur « industrie » d'une autre ère, un public qui a désormais un choix.

Je sais bien que la réalité est que les chauffeurs se sont endettés au cou pour des salaires souvent de misère. Qu'ils n'ont souvent autre débouché que ceci pour se faire une vie décente et nourrir leurs familles. Et que ce sont à la base majoritairement des gens bien. Et je suis le premier à trouver ça triste et injuste.

Et pendant qu'ils crient, manifestent et gueulent leur désarroi et impliquent les gouvernements (!), il y en a d'autres qui voient une ouverture à une solution de rechange. Naissent les Téo chez-nous et Éco-taxi un peu partout à travers le monde. Des entreprises qui se basent sur l'innovation. Téo vient me chercher et me mener en Tesla. Wow! La voiture sexy et convoitée de l'heure. Conçue par une entreprise californienne qui veut se dissocier des énergies fossiles. Génial. J'endosse, j'en parle, je partage sur mes réseaux sociaux... Tandis que vous bloquez telle ou telle artère.

Je sais que l'industrie du taxi fait un virage vers ça aussi, qu'elle modernise sa flotte, que les chauffeurs doivent désormais être bien vêtus... mais tout ce qu'on voit, ce sont des gens frustrés qui manifestent leur désarroi et bloquent le trafic pour nous attirer à leur cause. Sérieusement, vous croyez que ça va fonctionner? Vous croyez sincèrement qu'on se sent touchés et émus?

Si j'osais suggérer quelque chose, ce serait de mettre l'emphase sur le bon message. Vous avez le potentiel d'attirer notre soutien et notre empathie. Vous êtes la victime, même si vous l'avez cherché quelque part. Et on aime encourager et protéger les victimes.

Alors passez les bons messages et mettez vos efforts à nous faire voir ce que vous faites concrètement pour assurer les prochaines vingt ou cinquante années.

Qui d'entre vous s'en va vert? Quels éléments novateurs êtes-vous en train de développer, comment voyez-vous l'industrie dans 5, 10 ou 15 ans, etc. Mais pas votre pleurnichage et menace de recours judiciaires. Ça fait des décennies que le citoyen moyen déteste votre service et votre produit. Mais l'humain pardonne vite à qui veut bien changer et se présenter sous un nouveau jour.

Pourquoi ne pas approcher cette situation avec humilité et sincérité et démontrer votre volonté de trouver des solutions créatives et originales. Des solutions qui pourraient allumer notre imaginaire collectif, notre soif de défendre la victime que vous êtes en train de devenir. Des solutions qui feraient du mot Taxi un mot noble, que l'on associe à des valeurs, à une approche sociale... un mot qui deviendrait une marque de commerce, un brand si vous voulez.

À titre de professionnel en communication et publicité, je suis convaincu que l'industrie du taxi peut réussir ce défi. Haut la main. À condition qu'elle veuille se départir des amarres qui la retiennent ancrée sur le quai du passé révolu. Et qu'elle prenne un virage créatif et qu'elle ose.

JustSaying