Françoise Lavoie-Pilote est une passionnée de littérature et d’humanité. C’est avec la réalisation qu’elle a trouvé le moyen de dire les choses d’une nouvelle façon. Elle a touché à la publicité, au documentaire, à la fiction et aux médias interactifs. Elle nous partage son parcours, ses expériences et son processus créatif.

Qui t’a fait découvrir cette profession?
Françoise Lavoie-Pilote : En fait, j’étais en révolte contre mes parents! J’ai donc choisi le baccalauréat en cinéma, parce que j’étais certaine que c’est ce que mes parents aimeraient le moins. Finalement, j’ai aimé ça. Je te dirais que c’est un heureux hasard. C’est un peu comme la réalisation.

Pourquoi avoir fait une spécialisation en médias interactifs?
F. L-P. : J’aime la poésie, mais je trouvais ça moins intéressant à exploiter de manière linéaire. J’aime faire vivre une expérience au spectateur et raconter une histoire de façon différente. J’avais donc plus de latitude de cette façon.

Tu as commencé en publicité. Qu’est-ce que tu aimes de la réalisation publicitaire?
F. L-P. : La seule chose que j’aime de la pub, c’est l’approche esthétique. Je n’aime vraiment pas vendre des choses. Ça va à l’encontre de qui je suis. C’est pourquoi je choisis des projets à caractère humain, même si c’est moins payant. J’aime faire de la pub pour faire de belles choses rapidement, mais je ne peux pas dire que je m’accomplis vraiment avec ça. Je m’accomplis beaucoup plus avec des projets de documentaire.

Comment choisis-tu tes sujets ? D’où te viennent tes inspirations?
F. L-P. : En général, je m’inspire de mon vécu. Sinon, de quelqu’un qui me fascine ou d’un sujet qui m’intrigue. J’aime aborder des sujets communs, mais intenses comme la mort, l’amour et la violence, parce qu’il y a toujours une nouvelle manière d’en parler. L’amour, par exemple, est le fondement de l’humanité. C’est un terrain intéressant à explorer, même si on l’a fait plus de deux millions de fois! En fait, ce qui est important pour moi, ce n’est pas le montant d’argent que je vais faire par année, mais plutôt ce que je vais laisser aux autres. C’est avec cela en tête que je choisis mes projets.

Françoise Lavoie-Pilote

Quel type de caractère doit-on avoir pour être une bonne réalisatrice?
F. L-P. : Il faut être sensible et avoir une certaine force de caractère. Il faut aussi être persévérante et perfectionniste. Sans oublier le fait d’être capable de faire les bonnes concessions et de choisir ses batailles, surtout en pub.

Quelle est ta plus grande réalisation à ce jour?
F. L-P. : C’est Rouge Mékong. Une œuvre interactive qui n’a pas été financée du tout. L’idée était de reproduire la chambre d’une fille et de faire découvrir cette pièce par le public. Je voulais permettre aux spectateurs d’entrer dans l’univers du personnage. Vu l’ampleur du projet, j’ai créé un collectif d’artistes passionnés et impliqués, tout comme moi. Nous nous sommes installés dans le dôme de la Société des arts technologiques (SAT) et avons recréé une chambre. Le tout était ponctué par des apparitions de comédiens, de danseurs et de vidéos, tournées en stop motion. Le public était laissé à lui-même et pouvait toucher à tout. C’était une expérience très intuitive. La plus grande réussite de ce projet est d’avoir produit une œuvre où on utilise plusieurs technologies qu’on ne peut percevoir et où on garde l’humain au centre de l’expérience.

Quel a été le principal défi de ce projet?
F. L-P. : Puisque c’est un projet de longue envergure, j’ai été longtemps dans l’incertitude. Ce n’est pas toujours évident, je te dirais. Mais quand tu fais ta première représentation, c’est ta récompense!

Extrait de Rouge Mékong

Avec le recul, qu’est-ce que ce projet t’a 
apporté ? Qu’est-ce qu’il laisse à l’humanité?
F. L-P. : Je crois que nous avons inventé une nouvelle manière de dire les choses. J’irais même jusqu’à dire que ça révolutionne l’art. Le spectateur ne se retrouve plus seulement à écouter un film, mais à faire partie d’une œuvre.

Est-ce que tu as un projet en cours ou à venir?
F. L-P. : J’aimerais faire un projet qui traite de la violence faite aux femmes. Il y aurait une partie documentaire et une partie fiction. J’ai aussi le projet d’une série de cinq documentaires, présentement en développement. Et, finalement, avec notre collectif, nous voulons rendre l’œuvre Rouge Mékong exportable. On aimerait partager cette expérience avec le monde entier.

C’est effectivement un bien heureux hasard qui a fait que Françoise s’intéresse aujourd’hui à la réalisation. Sa profession lui permet de changer tranquillement les façons de penser et d’explorer différents sujets, et ce, d’une façon unique. La réalisation lui permet donc de faire ce qu’elle aime le plus: laisser à l’humanité une œuvre porteuse d’un message qui lui tient à coeur.


Article paru dans le Grenier magazine du 31 octobre 2015. Pour vous abonner, cliquez ici.