On serait portés à croire que les sociétés d’État sont les commanditaires les plus importants, vu leur présence massive, mais ce n’est pas le cas. Comme le souligne Jay Hébert, cofondateur et associé chez Elevent, « à la lumière du rapport annuel de 2014, le budget de Desjardins est de 82,3 millions, alors que celui de Loto-Québec est de 13,6 millions pour l’année en cours. »

Bien que les sociétés d’État ne soient pas les plus grands commanditaires en termes monétaires, elles jouent un rôle important au niveau des retombées socio-économiques. Jay Hébert et Lucie Lamoureux, directrice de l’engagement sociétal chez Loto-Québec, nous dressent un portrait de la situation.

Le mandat d’une société d’État


« Les sociétés d’État jouent le rôle du bon citoyen et veillent à la pérennité des événements qui auraient de la difficulté sans leur aide. Elles s’assurent d’être présentes dans des sphères qui sont plus difficiles à vendre à des commanditaires commerciaux. On peut dire que sans leurs investissements, plusieurs organismes auraient disparu de la carte », explique Jay Hébert. Loto-Québec investit dans la commandite afin de bien remplir son rôle de société d’État, mais également pour rejoindre sa clientèle. Comme le souligne Lucie Lamoureux : « nous sommes une société d’État à valeur commerciale, il est donc important de rester en contact avec nos clients ».

Les critères de sélection


Comme le précise Lucie, Loto-Québec s’assure d’avoir une politique de commandite bien établie. « Tout le monde a la même chance et est évalué sur les mêmes principes et critères. Nous investissons dans des événements rassembleurs et dans des activités gratuites ou accessibles à l’ensemble de la population (N.D.L.R. : moins de 10 $ par jour), ayant une retombée économique ou sociale importante. »

Faire la différence pour les plus petits joueurs


« Avec 2 000 événements au Québec et 1 900 festivals, les commanditaires doivent faire les bons choix. Il est plus facile d’être présent à un seul événement qui touche un grand nombre de personnes, plutôt que d’être un peu partout. Pour cette raison, les plus petits joueurs ont plus de difficulté à trouver des commanditaires. C’est à ce moment que les sociétés d’État peuvent intervenir et les supporter », soulève Jay.

Jay Hébert

Mesure des retombées


Vu leur mandat, les sociétés d’État doivent mesurer leur image de bon citoyen et leur visibilité. Comme l’explique Jay Hébert, « elles doivent calculer l’effet de leurs actions et voir s’il est positif ou négatif d’année en année ».

« Nous sommes très près des dirigeants des villes ainsi que des acteurs du développement économique pour voir si nous faisons vraiment la différence », confirme Lucie Lamoureux. Cela permet aux municipalités de tenir des événements rassembleurs et ça permet à Loto-Québec de bien remplir son mandat.

Investir dans les causes sociétales et humanitaires : une bonne idée?


Puisqu’on attribue ce rôle d’importance aux sociétés d’État, est-ce qu’elles devraient investir dans des causes à caractère sociétal et humanitaire? Lucie Lamoureux nous explique que Loto-Québec est en train d’y réfléchir. « Le Casino de Montréal est très actif avec Moisson Montréal, vu le volet gastronomie. C’est un partenariat naturel. Il est important de comprendre que nous ne voulons pas nous substituer au Ministère de la Santé, donc le but n’est pas d’investir dans une cause qui n’est pas en lien avec notre organisation. Étant les experts du jeu et de l’argent, nous pourrions, par exemple, développer un jeu qui aiderait les personnes atteintes d’Alzheimer. Ceci serait en lien direct avec la cause et notre organisation, et ce serait un bon investissement. »

Lucie Lamoureux

Dans l’œil des médias


Jay Hébert souligne que les sociétés d’État doivent toujours faire attention à leurs actions, car elles peuvent être questionnées à tout moment par le public et par les médias. « Les données sont publiques, mais avant que les médias ne mettent en relief certains chiffres, presque personne ne les consulte. » Elles doivent donc être vigilantes et stratégiques dans leurs investissements.

De son côté, Lucie Lamoureux mentionne que « Loto-Québec ne reçoit pas vraiment de critiques, car les médias et les festivaliers comprennent l’importance de la commandite et ils savent qu’il n’y aurait pas de spectacles gratuits s’il n’y avait pas de commanditaires. Cela dit, vu les baisses de revenus chez Loto-Québec, 25 événements disparaîtront du calendrier l’année prochaine. C’est plutôt cette situation qui risque d’attirer les critiques ».

Les investissements en commandites des sociétés d’État jouent donc un rôle d’importance au sein de la communauté. Il reste à voir si, à long terme, les coupes budgétaires imposées par le Conseil du trésor, de même que les baisses de revenus, vont venir modifier le paysage de la commandite.


Article paru dans le Grenier magazine du 24 octobre 2015. Pour vous abonner, cliquez ici.