Le 16 décembre 2016, le groupe Grey faisait l’acquisition de Tank. « Hérésie ! » s’écriait d’une seule voix le Tout-Montréal publicitaire, « une autre agence locale se fait assimiler ». Cette fois-ci, on peut se demander si ce n’est pas plutôt le contraire qui se produit. À preuve, Tank qui nous ramène directement de New York deux mandats internationaux.

Marc Lanouette, président | Tank et chef de la direction | GREY Canada
Photo : Donald Robitaille

Marc. Voilà 10 ans, plusieurs boites de communication, dont la tienne (Sky Communications), se regroupaient pour donner naissance à Tank. Après quelques bosses et ratées nécessitant quelques ajustements mécaniques, le Tank, enfin bien rodé, s’est mis en mode conquête. Si bien qu’après à peine 9 ans d’existence, le valeureux blindé tombait dans l’œil de Grey — membre du groupe WPP. Cette acquisition faisait-elle partie du plan de match ?

Marc : Pas du tout. L’agence allait très bien. Même qu’on était souvent invité à participer à des gros pitchs nord-américains. Mais quand tu te retrouves finaliste, que tu te fais demander comment tu approcherais le marché de la Chine ou du Japon, et qu’on choisit finalement l’autre agence (faisant partie d’un réseau international), tu deviens un peu plus ouvert à écouter ce qu’un groupe a à t’offrir. On en a écouté deux, mais le fit n’était juste pas là.

Pourquoi Grey ?

Marc : Ça a immédiatement cliqué. Michael Houston, chef mondial du groupe a complètement reviré la marque de bord en 5 ans. On a vu Grey devenir l’agence la plus primée à Cannes ! Michael a vu l’immense potentiel de croissance que nous représentions. Tu le sais, le marché local n’offre plus de croissance. Pour faire croitre notre industrie, il faut désormais attaquer l’international. Comment ? En mettant de l’avant l’incroyable talent d’ici.

Mais du talent, ça demeure tout de même du talent. Y en a partout, même chez Grey New York, non ?

Marc : Oui, mais un créatif assis sur une chaise à New York coûte pas mal plus cher qu’un créatif à Montréal. Ajoute à cela la valeur de notre devise et on devient un puissant vecteur de croissance à l’international. Dans cette nouvelle économie où le Procurement joue un rôle crucial dans les décisions, laisse-moi te dire que notre histoire est bien reçue. Surtout maintenant qu’elle est appuyée par un réseau solide.

Et qu’une grande entreprise y ait cru aujourd’hui !

Marc: On est tellement fier. Revlon qui nous préfère à une gigantesque agence de New York pour prendre en charge — à travers le monde ! — American Crew, sa marque phare de produits de beauté masculine. Et qui nous confie du même coup sa marque Mitchum. Belle première récolte de l’après-fusion, non ?

Comment avez-vous appris ce gain ?

Marc : On a pitché un lundi. Le vendredi, le président de Revlon lui-même m’appelait pour m’annoncer la bonne nouvelle ; il voulait s’assurer que je passe un bon week-end. Il le fut ! (RIRES)

Concrètement, comment seront pris en charge ces deux comptes ? Grey New York va en prendre un bout, de même que Grey Paris, Grey Beijing, Grey Stuttgart, etc. comme c’est toujours le cas dans les réseaux ?

Marc : Absolument pas. 95 % du travail sera fait ici, à Montréal et à Toronto. C’est un mandat 100 % Tank. On est toutefois en discussion avec le réseau afin de déterminer les endroits stratégiques où ouvrir des bureaux de Tank dans le monde.

J’imagine que là aussi, ça doit aider de faire partie d’un réseau. Pas évident de déterminer soi-même quels pays ou quelles villes choisir.

Marc : Le réseau nous apporte effectivement beaucoup d’insights sur la question. Oui, un bureau à Paris peut avoir du sens à nos yeux de québécois, mais si tu prends en considération la localisation des clients actuels et potentiels, les réseaux de distribution, la synergie, tu découvres que tu serais peut-être mieux placé à Berlin ou à Francfort, par exemple. Même chose pour l’Asie. C’est un marché très complexe.

C’est le réseau qui vous a invité à foncer ainsi ou c’est le petit village d’irréductibles Gaulois qui a décidé d’arrêter de se défendre pour passer à l’attaque… armé d’un tank ? (RIRES)

Marc : Lors d’une acquisition, tu ne peux pas attendre que la nouvelle business vienne à toi. Elle ne viendra pas. Tu dois faire ton propre démarchage. Il faut que tu network the network. Ce qu’on a fait dès le premier jour. Et vois ce que ça rapporte. Je devrais même être en mesure de t’annoncer une autre grosse nouvelle avant les Fêtes.

Ben là, ramène pas tout ici. Laisses-en un peu pour les pauvres grosses agences new-yorkaises ! (RIRES)

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