À la lumière des événements survenus dimanche soir au Centre culturel islamique de Québec, les médias ont-ils une part de blâme sur le climat social qui a favorisé cette tragédie ?

Jointe par téléphone, Chris Bergeron, directrice de la création chez Cossette, explique : « Je crois qu’il faut faire attention. On est dans une période sensible. Il y a beaucoup de contre-exemples : des gens qui sont hostiles à la démocratie et aux droits qui ont d’énormes porte-voix. Évidemment, Trump en est une, mais il y en a d’autres. Je crois qu’aujourd’hui il faut choisir son camp et on peut le faire de deux manières. Les médias qui choisissent le camp de Trump le font des fois carrément par omission, c’est-à-dire en ne condamnant pas la haine et le discours haineux face aux minorités. En fait, souvent, ils rajoutent de l’huile sur le feu. C’est ce que font les radios-poubelles en ce moment. On retrouve maintenant ce genre de discours dans les journaux aussi, et ça commence à me faire peur. À la rigueur, ce sont des chroniques semi-neutres. Il y a toute sorte de glissement qui opère. Par exemple, hier, le commentateur Pierre Bruneau, à TVA, parlait de terrorisme à l’inverse, car l’une des deux personnes qui avaient tiré dans la foule était Québécoise. Il faut faire attention à ces petites phrases-là, dites rapidement, car elles portent beaucoup. Il faut faire attention à ce qu’on dit aujourd’hui ».

Chris Bergeron

« Et puis avant de parler, il faut écouter. C’est vrai pour les journalistes et c’est vrai pour les publicitaires, parce que là on avance en terrain miné. On a une responsabilité supplémentaire d’agir comme des barrages aux discours démagogiques, que l’on retrouve maintenant aux États-Unis. Et certains d’entre nous, qui travaillent dans la communication ou dans le journalisme, doivent faire ce travail-là. Il y a beaucoup de responsabilités individuelles là-dedans. Il y a plein de chroniqueurs qui vont dire des bêtises et qui vont continuer à dire des bêtises sur les tribunes radiophoniques. Mais quand tu entends une bêtise, tu la contredis. Tu arrives avec des faits, des statistiques. Il faut aussi qu’on soit à l’ère de la vérité comme arme ».

« Ça, c’est important et tout le monde peut le faire sur les réseaux sociaux et dans les commentaires, poursuit Chris Bergeron. Moi, je le fais beaucoup en ce moment sur les sujets trans dans les commentaires du Journal de Montréal. Je réponds avec les informations que j’aie. Et les gens peuvent faire la même chose, faire acte de rébellion sur les réseaux sociaux par les commentaires face à cette montée de la haine qui risque d’arriver. Il faut répondre systématiquement à ça. Et il ne faut pas répondre à du fake news par du fake news. On voit toutes sortes de données fausses qui se baladent pour appuyer des points de bonne volonté, mais ce n’est pas le débat non plus. On y va avec la vérité, pas avec le mensonge ».

Demain, nous aurons l’avis de Sonya Bacon, stratège (anciennement chez Publicis, Bleublancrouge, Sid Lee et Bos).

Rappelons qu’une vigile pour les victimes de la mosquée de Québec aura lieu au métro Parc dès 18 h ce soir et dans la capitale, les citoyens sont invités à se rassembler à l’église Notre-Dame de Foy, située sur la rue du Chanoine-Martin, à 18 h. D’autres vigiles sont aussi prévues à Ottawa, ainsi qu’à Moncton, Toronto, Halifax, Winnipeg et Whitehorse.