« Dis-moi de quelle fonte tu te sers, je te dirai quel est ton caractère. » J’avais utilisé cette citation de mon propre cru lors d’un party d’agence pour présenter un DA reconnu pour sa passion de la typographie... et son tempérament ! Je la ressors des oubliettes pour vous présenter cette fois M&H, une boite de graphisme publicitaire qui fait preuve de résilience en misant sur le savoir-faire.

Pointe de conversation avec Daniel Gendron


L'avant-ouèbe


Le MAC attaque


De résilience et d'impartition


Daniel, M&H existe depuis 43 années ! Que vous soyez encore actifs et fringants 
de nos jours relève pratiquement du miracle, surtout en publicité.


Daniel : Tu as raison, Normand. Mon arrivée chez M&H remonte à 1981 en tant que technicien de chambre noire. Juste à temps pour vivre les années d’or de la photocomposeuse, des linotronics et des mécaniques. Mais aussi juste assez tôt pour être un témoin privilégié du dramatique impact qu’allait avoir l’arrivée massive des ordinateurs personnels sur notre industrie.

C’est ce qui t’a fait sortir de ta chambre noire jusqu’à ton nouveau poste de président ? (RIRES)


Daniel : En fait, je venais d’avoir mon certificat de compétence-compagnon. J’allais donc devoir remplacer un employé qui possédait plus d’ancienneté que moi sur le quart de nuit. Ce qui ne me tentait pas du tout. Yves Langelier, voyant que j’allais quitter, m’avait proposé un nouveau poste. À cette époque, M&H était la boite de typographie des agences anglaises de Montréal et Avant Garde Typographie, celle des agences francophones, alors en pleine croissance. Peter Marsh [le président à l’époque] voulait changer la situation. On me mit donc sur la route afin d’aller chercher — et servir — les agences francophones.

C’est à ce moment qu’on s’est connu quand tu venais affronter Jacques Hébert, le directeur de production imprimée chez PALM dont tous les reps avaient peur ! ;) Est-ce à ce moment que tu t’es dit que la qualité était essentielle pour passer à travers toutes les vagues qui allaient venir ?


Daniel : Hahaha ! En effet, Jacques était très demandant. Mais la typographie, c’est une spécialité qui appelle la compétence, et donc l’excellence. Les titres qui excédaient 36 points, on ne pouvait pas les faire à la photocomposeuse; ça se faisait en chambre noire. Le DA voulait des titres en outline ? Il fallait les créer de toute pièce. Alors quand on a vu débarquer les macs dans les agences, et le piètre résultat que ça donnait, on s’est dit que ça ne durerait pas. Six mois plus tard, je peux-tu te dire qu’on s’est mis en mode rattrapage ! Pendant que d’autres fermaient tout simplement boutique.

Parce qu’ils ne s’étaient pas adaptés ?


Daniel : Parce qu’ils avaient pris la mauvaise voie du changement. La suite de la chaine de production étant encore analogue, les équipements étaient trop dispendieux pour les agences. Ces boites de production ont donc investi massivement dans l’achat de nouvelles machines et donné naissance à une guerre de prix sanglante. Peu après, lorsque le traitement des fichiers numériques fut rendu possible en prépresse, ce fut la fin pour la plupart de ces entreprises.

Et vous n’avez pas été affectés ?


Daniel : Oh que oui ! On est passé de trois quarts de travail à un seul quart de travail, et d’une quarantaine d’employés à une dizaine seulement. C’était dramatique. Mais on s’est acharné à débusquer des clients qui étaient encore sensibles à la qualité. Et on en a trouvé. Des agences comme Bos et Sid Lee qui se rendirent compte rapidement que pour tirer leur épingle du jeu, ils devaient avant tout utiliser l’ordinateur comme un outil de création et non pas de production.

S’en est suivi votre modèle d’impartition.


Daniel : Et voilà. Plutôt que laisser au client le souci de se monter un studio, de le staffer et de le faire vivre, on s’est mis à installer nos propres employés directement chez le client. Comme j’ai plus de 100 spécialistes de tout ordre, les clients avec des besoins diversifiés trouvent rapidement leur compte avec ce modèle. Et c’est ce même modèle sur lequel table présentement notre bureau de Toronto où l’on collabore déjà avec trois agences. Même si c’est plus cher de l’heure, sur les opérations, on est généralement plus efficace, plus rentable pour les agences.

Et la qualité, meilleure, j’imagine. On en revient à la qualité.


Daniel : Totalement ! C’est un peu triste à dire, mais M&H n’engage pas de juniors. Seulement du personnel aguerri. De par notre situation dans le marché, nous sommes condamnés à demeurer les meilleurs; c’est ce qui faisait notre distinction en 1973 et c’est ce qui continue à nous distinguer aujourd’hui. C’est pourquoi nous nous sommes dotés d’un programme de formation intensif qui s’assure que chacun de nos employés évolue et demeure en avant de sa propre parade.

Une université M&H prochainement, donc ?


Daniel : C’est payant ? (RIRES)

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