Je vous vois venir : « Qu’est-ce qu’il y a de plus à dire sur le phénomène Pokémon Go? ». Le Grenier aux nouvelles s’est posé la question et la réponse est bien simple : l’opinion de différents spécialistes sur la chose! Au fil de cet article, découvrez l’envers du décor « communications » de cette tornade sociale, et ce, grâce à l’expertise de deux directeur des communications. Lire aussi notre première partie sur le « côté marketing ».

Côté communications


« Parlez-en en bien, parlez-en en mal, mais parlez-en! » Ça semble être le mot d’ordre actuel à propos de Pokémon Go sur les réseaux sociaux. Si certaines institutions dénoncent la présence du jeu dans leurs établissements — Camps de concentration en Allemagne, Musée de l’Holocauste aux États-Unis, voire même des cimetières — d’autres choisissent plutôt d’embrasser l’engouement. On en discute avec Geneviève De Blois, directrice des communications au Musée de la Civilisation, à Québec, et avec Mathieu Claise, directeur des communications et des relations publiques à l’Aéroport international Jean-Lesage de Québec.

Comment avez-vous su percevoir les opportunités présentées par un tel jeu, et ce, dans le cadre de vos activités promotionnelles?

Mathieu Claise : Pokémon Go est présentement une grosse tendance mondiale. Même si la clientèle est très ciblée, ça reste un jeu techno, avant-gardiste et tendance. Ainsi, en faisant notre veille médiatique, on a rapidement vu là une opportunité intéressante. Plus vous avez de réseau cellulaire, plus vous avez de Pokémons, donc on a réalisé que nous hébergions plusieurs Pokémons, ce qui peut seulement rendre le temps d’attente plus agréable pour nos passagers, essentiellement les plus jeunes!

Geneviève De Blois : Puisqu’on se situe dans un lieu touristique achalandé, on se doutait que les Pokémons étaient près de nous. Nos soupçons ont rapidement été confirmés! Non seulement on retrouve des Pokémons autour du musée, mais aussi à l’intérieur… même dans les bureaux administratifs! Le Musée de la civilisation est un musée de société qui est attentif à ses sujets et nous abritons des expositions technologiques, donc l’utilisation d’un tel jeu devient pour nous un « fait de société » intéressant. Le Musée a donc décidé de s’amuser avec le phénomène et de participer au lieu de rester un simple observateur.

Publication Facebook du Musée de la civilisation, publiée le mercredi 13 juillet 2016.


Quel est le processus derrière l’intégration d’une telle tactique « dernière minute » à votre stratégie de communications?

G.D.B.: Ça commence par une équipe formidable et passionnée! En effet, le Musée fait une veille médiatique énorme et en continu, c’est d’ailleurs l’une de nos préoccupations quotidiennes. Ainsi, lorsqu’on a pris connaissance du phénomène, on a trouvé naturel d’embarquer dans le train, puisque ça touche au numérique et à ses nombreuses déclinaisons : un sujet qui est d’ailleurs fréquemment abordé au Musée.

M.C.: Il n’y a pas réellement eu de stratégie derrière notre publication Facebook. Nous avons simplement été à l’écoute du marché et nous souhaitions informer les gens que les Pokémons étaient présents à l’aéroport! Ça permet aux gens de passer le temps de manière ludique; c’est un service supplémentaire offert aux passagers.


Avez-vous déjà constaté un certain engouement ou une réponse du public face à votre initiative?

G.D.B.: Pour le moment, nous avons surtout observé beaucoup de joueurs autour du Musée. Toutefois, nous avons fait la demande aux guides de bien observer les salles au cours des prochains jour pour voir si nos clients embarquent dans le jeu!

M.C.: Oui. La publication Facebook de l’Aéroport a joui d’une réponse incroyable, et ce, en un temps record. Ce jeu est un réel outil qu’on ne maîtrise pas encore parfaitement… mais qui est excessivement novateur. Déjà quelques jours depuis de lancement, nous sommes devenus une arène de combat. Je commence d’ailleurs à voir des jeunes s’amuser à chasser des Pokémons!

Publication Facebook de l'Aéroport International Jean-Lesage de Québec, publiée le mardi 12 juillet 2016.


Si certains milieux en profitent, d’autres sont plutôt réticents. Je pense à des cafés dont l’achalandage augmente pour capturer des Pokémons et non pour l’achat de ses produits ou à des lieux de commémoration, tels que le Musée de l’holocauste aux États-Unis. Selon vous, où se trace la « ligne » quand on gère une entreprise et qu’on doit décider si on embarque dans la vague ou si on lui tient tête?

G.D.B.: Le Musée a décidé d’embarquer… mais en gardant en tête le contexte. Le fait d’attraper des Pokémons est cohérent avec certaines de nos expositions, mais pas toutes. Je pense à « 25 x la révolte », qui parle d’enjeux lourds et qui encourage la réflexion. Ces salles ne se portent donc clairement pas à ce genre d’activité et c’est l’une des raisons pour lesquelles on surveille bien nos amis les Pokémons. Au Musée, on est bon joueurs, mais on garde notre rigueur intellectuelle et nous n’hésiterons pas à prendre les actions nécessaires si jamais le jeu contrevient à l’intégrité de nos expositions.

M.C.: À mon avis, Nintendo a une certaine responsabilité vis-à-vis le déploiement du jeu et les enjeux qui en découlent. Il faut garder en tête qu'il y a des avantages et des désavantages dans tous les produits ou les nouveaux jeux qui révolutionnent nos habitudes!

Crédit : The Oatmeal / The Oatmeal Instagram / @Christopher Bireley