J’aime beaucoup mon métier et la plupart du temps, ma situation de travailleur autonome me convient. Il m’arrive rarement de le claironner, par ailleurs : parce que j’en suis satisfaite, je ne ressens simplement pas le besoin d’en parler.

Mon métier m’amène à vivre des moments de joie intense, par exemple lorsque mon travail fait en sorte que je suis témoin du retour à la santé et à une vie professionnelle active d’une personne que j’ai tout d’abord connue alors qu’elle était très malade et en questionnement face à son avenir professionnel. Je bénéficie aussi de beaucoup de liberté pour la gestion de mon temps, qui s’équilibre entre des périodes de travail à mon bureau à domicile et des rencontres à l’extérieur. Bien sûr certaines tâches qui m’incombent me plaisent moins que d’autres et parfois, le cadre administratif d’un mandat m’occasionnera des frustrations – généralement, il s’agit de situations ou le budget alloué pour le soutien d’une personne me semble irréaliste.

La nature même de mon travail fait en sorte que je rencontre quotidiennement des gens qui sont insatisfaits de leur situation professionnelle. Plusieurs sont en emploi, mais malheureux ou mécontents de leur conditions, certains recherchent activement une nouvelle opportunité, mais plusieurs sont paralysés ou entravés dans leurs efforts, en raison de leur vision négative et cynique du marché du travail. Découragés, ils diront souvent «c’est partout pareil!»

Lorsque je conteste ce point de vue, ils me diront qu’à chaque fois qu’ils entendent parler du travail de quelqu’un, c’est pour s’en plaindre. Bien sûr, il y a des gens qui peinent au travail dans des conditions exécrables. Mais il y a aussi des individus qui sont prisonniers de cages dorées, des personnes qui hésitent à quitter un emploi qui leur déplait ou les rend malades parce qu’ils savent qu’ils ne pourront pas retrouver l’équivalent de leurs conditions d’emploi dans une autre entreprise ou une autre profession.

Dans ce groupe les enseignants me viennent tout d’abord en tête : leurs conditions d’emploi se sont dégradées très significativement au cours des années, leurs classes sont trop nombreuses, on y intègre des élèves en difficultés sans support additionnel, ils doivent constamment s’adapter aux nouvelles façons de faire que leur impose le Ministère de l’Éducation, on leur transfert des responsabilités éducatives qui devraient relever des parents et j’en passe. Pourtant, plusieurs demeurent en poste, à leur grand malheur, parce qu’ils ne veulent pas perdre leur été de vacances…même si chaque année ils arrivent en juin épuisés et parviennent à peine à s’en remettre avant la rentrée.

Certains travailleurs du secteur public et de la grande entreprise font face à un dilemme similaire, en raison de leur sécurité d’emploi, ou de la qualité de leur régime de retraite. Il existe également des secteurs de l’économie qui offrent des salaires plus élevés que la moyenne du marché. Même s’ils sont las de leurs situations, les personnes employées par ces organisations y demeureront souvent, prisonniers de leur rémunération élevée…et des engagements financiers qu’ils ont contractés, puisque leur niveau de revenu le permettait.

Il y a beaucoup de choses que l’on peut déplorer du marché du travail d’aujourd’hui, pourtant je crois fermement que beaucoup de gens sont relativement satisfaits de leur situation d’emploi. Pourquoi ne les entendons-nous pas? Parce qu’au travail comme dans la vie amoureuse, les gens heureux n’ont pas d’histoire… Vous ne m’entendrez d’ailleurs pas m’exprimer beaucoup non plus à l’égard de ma vie de couple, parce qu’encore là je considère être parmi les privilégiées! Qu’est-ce qui fait qu’on est heureux et motivé au travail? Les raisons sont différentes pour chacun, mais les facteurs de base sont les mêmes pour tous. À cet égard, je vous invite à consulter l’article suivant dont je vous souhaite bonne lecture.