Au Canada et au Québec, les programmes de sensibilisation et de prévention se multiplient. Les «jecapote.net», les «cigarrete.com», etc. visent parfois de manière disons discutable de convaincre les jeunes d’adopter des comportements de vie plus sains. Heureusement, de plus en plus de programmes s’inspirent aujourd’hui des pratiques des entreprises propulsées par le marketing en sacrifiant peut-être certains contenus académiques moins accrocheurs et trop théoriques pour les jeunes en compensant par une expérience de navigation beaucoup plus intéressante et engageante pour le jeune.

Ainsi, on veut conscientiser les jeunes à leur santé et différentes études tendent à démontrer parfois des chiffres encourageants, parfois des chiffres alarmants sur la santé de nos adolescents et jeunes adultes. En même temps, plusieurs spécialistes de la santé déplorent une absence assez généralisée des visites d’étudiants dans leurs bureaux ou cliniques.

Pourquoi les jeunes ne se déplacent pas pour des examens de routine et de la prévention en santé qui pourraient leurs permettent plus tard de gagner plusieurs années de vie active?

Au Québec, il faudrait en moyenne 17 heures pour voir un médecin dans un hôpital, selon les chiffres officiels. Bien sûr, au Québec, il est possible de se rendre dans une clinique sans rendez-vous plutôt qu'un hôpital, mais de plus en plus, ces cliniques ne prennent plus de patients dès 9h le matin, parce qu'elles ont déjà fait le plein pour la journée.

Quelques chiffres (…malheureusement pas très récents)

• 94,5 % des jeunes âgés entre 15 et 24 ans auraient consulté un professionnel de la santé.* • Plus de sept jeunes Québécois sur dix ont consulté un médecin au cours de l’année * • À l’heure actuelle, on estime que de 30 % à 50 % de la population québécoise ne consulte pas un dentiste sur une base régulière pour des raisons économiques, sociales, géographiques et culturelles.

*données 2005 ISP

Les chiffres sont loin d’être alarmants…

Comment alors expliquer cette affirmation à l’effet que les jeunes désertent leurs cliniques par certains professionnels de la santé? En fait, les jeunes sont surreprésentés pour certains soins et peu représentés pour des soins de prévention et examens annuels. Le phénomène ne s’explique pas uniquement par le débalancement démographique, les jeunes consultent les professionnels de la santé quand ils se blessent sérieusement, sont gravement malade ou sont inquiets face aux symptômes reliés à certains comportements à risque.

Leur peur de l’aiguille s’estompera rapidement dans une clinique de vaccination si un voyage dans un endroit exotique justifie ce traitement, mais elle reviendra rapidement pour un vaccin préventif pour la grippe par exemple.

L’inhibition des jeunes dans la pratique de sports dits extrêmes et le désir de performance et de surpasser a contribué à augmenter les visites chez le médecins pour soulager des malaises ou blessures. Les nouveaux standards d’image corporelle ont aussi contribué à augmenter la fréquentation de certains centres de santé et outre le sujet de la chirurgie plastique, des services d’ordre esthétiques ont contribué à garnir les murs de certains professionnels d’affiches de blanchiment de dents, de Botox et de d’autres services aujourd’hui banalisés qui n’existaient pas ou peu à l’époque des générations précédentes.

La littératie en santé fait état aussi des conséquences de certains nouveaux produits sur la santé des nouvelles générations. Par exemple, une forte consommation de boisson énergisante contribuerait à affaiblir l’émail des dents. Les produits à forte concentration de sucres auraient contribué à l’augmentation de formes de diabète chez les jeunes de façon dramatique. Finalement, l’industrie de la malbouffe et des gras saturés dont nous commençons à peine à constater les effets aura certainement des incidences sur la santé des prochaines générations.

Bref, la vie moderne amène son lot d’avancées et d’avantages, mais au delà d’une conscientisation plus importante dans la jeune population face à des problèmes d’ordres environnementaux, ils oublient parfois les minutes et les conséquences sur leur corps de se faire dorer sur un lit de bronzage en se disant qu’ils auront amplement le temps de faire attention à leur santé plus vieux.

La prévention sert à sensibiliser et établir les dangers pour le jeune, mais elle devrait aussi revoir le ton moralisateur de certains programmes pour avoir vraiment l’attention des jeunes et les accompagner de par le message, mais aussi dans la pratique à un changement comportemental. Les voitures démolies et les poumons calcinés peuvent certainement en impressionner quelques uns, mais ce n’est plus suffisant aujourd’hui pour changer un comportement.

Pour d’autres étudiants, ce sont les frais associés à des visites médicales et dentaires qui ne sont pas couverts par le programme de base de la Régie de l’assurance maladie du Québec qui les rebutent. Comment rendre accessible ces services essentiels avec un budget d’étudiants ou de jeune professionnel endetté?

Si comme société, nous voulons vraiment devenir des acteurs du changement, nous devons rendre les services accessibles, abordables, adaptés aux plus jeunes générations et adapter nos outils et nos messages de communication.

Il y a quelques semaines, nous traitions dans notre billet de la génération YOLO (you only live once) et bien ces jeunes n’ont tout simplement pas le temps de perdre une journée dans une salle d’attente agrémentée de iPad présentant la version électronique des magazines tendances de l’heure et certainement décorée à l’image des boutiques les plus fréquentées des jeunes… (Vous avez compris mon sarcasme…)

Des cliniques destinées aux jeunes!

Récemment, différentes cliniques destinées à une population jeunesse ont vu le jour. Elles semblent connaître un succès intéressant ! Je n’ai pas eu l’occasion d’en visiter une, mais il semble qu’elles soient localisées pour la plupart dans des endroits connus des jeunes, notamment aux abords d’écoles secondaires. Des cliniques orientées strictement vers des problématiques jeunesse, comme les dépistages, les examens gynécologiques, les premières contraceptions et le soutien du travailleur social. Il semble toutefois impossible de prendre des rendez-vous pour des problèmes généraux de santé, comme le renouvellement de pompes d’asthme ou un mal de gorge. Les jeunes ne veulent pas toujours partager leurs insécurités ou problèmes de santé à leurs parents. Dans une clinique jeunesse, il y a une philosophie adaptée aux jeunes derrière l’approche des intervenants.

Il sera intéressant de voir si les horaires, l’accueil et les installations sont adaptés à ces générations. Le problème qui persiste avec ces beaux projets demeure le manque de ressources professionnelles pour répondre à la demande.

Des avancées technologiques peinent à pénétrer nos cliniques et hôpitaux…

Saviez-vous que quelques rares cliniques sont équipées de bornes électronique qui, moyennant un montant de 3$ à 10$ selon le fournisseur qui achemine aux patients qui préfèrent attendre ailleurs qu'au cabinet du médecin un texto ou un message vocal pour leur dire que c'est bientôt leur tour.

Une solution technologique qui a tout pour charmer les jeunes générations en éliminant le temps d'attente dans les cliniques en permettant aux patients d'attendre à l'endroit de leur choix. L’entreprise TechnowaiT prétend sur son site que cette technologie permet aux patients de diminuer les heures de travail perdues, de diminuer la contamination entre patients et surtout de diminuer significativement le stress causé par la pression de la salle d'attente sur le personnel de la clinique.

Sur le même site, on mentionne : «La technologie est non-intrusive, clé-en-main et sans frais pour les établissements de santé»…ah oui ? On souhaite que le Dr Réjean Hébert soit un fidèle lecteur de notre blogue…

Certaines cliniques offriraient gratuitement une réservation sans frais sur internet ou par téléphone, mais le mouvement est loin d’être généralisé et vous seriez davantage gagnant de vous inscrire sur Internet la veille…

Diagnostic sur le web

Entretemps, les jeunes se tournent vers l’Internet pour se faire leur propre diagnostic. Les sources sont multiples et pas toujours fiables…

Une donnée inquiétante de ce phénomène repose sur une étude de statistique Canada quant à l’habileté de ces jeunes d’assimiler l’information en santé. On parle ici de la littératie en santé qui est la capacité pour des individus de repérer, comprendre, évaluer et communiquer de l’information pour être capables de composer avec les divers contextes de santé afin de promouvoir la santé tout au long de leur vie. Les 16 à 25 ans auraient des compétences inférieures au niveau acceptable de 3 sur l’échelle de littératie en santé dans une proportion de 51,3%. Est-ce que l’on peut extrapoler qu’un jeune sur deux expliquerait de façon erronée ses symptômes ou ferait des choix douteux pour sa santé ?

En résumé

Les jeunes de 15 à 17 selon l’Enquête québécoise sur la santé de la population (EQSP) se considèreraient en majorité comme en excellente ou en très bonne santé physique. La perception de leur santé buccodentaire aussi. Derrière leurs lunettes teintées de rose, les chiffres font mentir leur évaluation et les professionnels s’accordent pour dire que la prévention et les soins notamment pour les professionnels de première ligne devraient être plus soutenus. Les comportements sexuels précoces et à risques, la consommation de drogue, de malbouffe et l’éclosion de troubles de santé mentale ont connu une courbe d’augmentation beaucoup plus prononcée que celle des effectifs dans les cliniques pour prévenir et tenter de stopper ces hémorragies.

Comme société, même en période de déficit zéro, nous devrions d’abord être en mesure de prévenir plus efficacement et d’y investir les moyens nécessaires. Mais pour atteindre des résultats plus appréciables, il sera nécessaire de répondre aux besoins, attentes et préférences des jeunes Québécois dans les installations, le type de services, mais aussi dans les moyens à utiliser pour les conscientiser.

Les statistiques sur le sujet des jeunes dans le réseau de la santé sont presque aussi vieilles que certains magazines que l’on retrouve dans certains cabinets ou cliniques…mais en recoupant plusieurs études, il est évident que le système de la santé doit être repensé pour protéger nos générations futures!